S, comme Shinigami [Ace X OC]

XVI En conséquence

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          Allongée sur la large baleine de la proue du Moby Dick, Sasha se prélasse au soleil. Son débardeur remonté en dessous de ses seins, elle prie pour que les rayons dorent à nouveau sa peau. Quel plaisir d'être revenu à un climat plus tropical, même si l'humidité ambiante pèse sur les corps autant que les nuages. Au moins peut-elle laisser les pulls au fond de la malle qu'elle partage avec Rafael - plutôt mécontent de voir la pile de vêtements qu'entasse la jeune femme sans ne rien plier.

Aujourd'hui, le navire résonne du vide, mais l'atmosphère est électrique. Sur cette île inhabitée, petite zone de terre où la végétation est reine, un rassemblement se déroule depuis le matin. Un rassemblement annuel auquel Sasha n'a jamais assisté autre qu'en patientant sur le pont - tout en essayant d'écouter les conversations. Mais les concernés se trouvent toujours trop loin : précaution de Barbe-Blanche de placer le Moby Dick le plus éloigné possible du lieu de rendez-vous, pour éviter à la shinigami de céder à sa curiosité. Ne sont invités que les commandants des divisions et chaque capitaine de la quarantaine de navires alliés du pirate pour discuter des objectifs à venir de chacun : protéger des îles, trouver des trésors, recruter des membres d'équipage, découvrir de nouveaux lieux... Une réunion rondement menée par Blenheim et où tous prennent plaisir à échanger autour d'un - ou plusieurs - verre. Une réunion de chefs, en somme. Une demi-journée à se prélasser pour les autres, en clair.

Pourtant, quelque chose dérange les oreilles de Sasha. Ce ne sont pas les autres navires de la flotte stationnés tout autour de l'île - pour l'encadrer et éviter les attaques - ni les éclats de voix qu'elle récupère de cette lointaine réunion. Quelque chose se trouve sous l'eau. Une sorte de très large banc de poissons, ou plusieurs. Elle ne reconnaît pas les échos des monstres marins ou de tout autre cétacé des profondeurs ; elle ne détecte pas non plus le bruit significatif de centaines de petites nageoires qui filent à travers les courants. Alors qu'est-ce que ce léger sifflement qui vient à ses oreilles depuis l'océan ? Comme un bateau... Qui se déplace... Sous l'eau.

— ENNEMIS A LA PROUE, hurle Sasha en sautant sur ses pieds, consciente d'avoir tardé à détecter la menace.

Sa voix porte moins loin que celle de son père adoptif, mais elle résonne sur le pont où flânent ses camarades endormis. Maria accourt la première, en bonne vice-commandante.

— Sous l'eau, trois navires, ils sont... Quatre cents, se concentre la jeune femme.

Même sans les têtes d'affiche de l'équipage, rien ne perturbe l'organisation millimétrée d'avant un combat. Les pirates s'activent, traversent le pont de long en large, apportent les armes et chargent la poudre à canon. Les ordres fusent, alignés notamment par Maria et quelques vieux lascars des mers qui connaissent les rouages. Alors que le plus rapide de la première division est envoyé courir sur l'île pour prévenir le capitaine, les ennemis apparaissent. Devant les yeux tout aussi admiratifs qu'apeurés de Sasha, trois bateaux de taille moyenne, floqués du drapeau du Gouvernement Mondial, émergent. Chacun est entouré d'une fine bulle permettant de naviguer sous la surface. Ils se sont tant rapprochés du Moby Dick que la shinigami n'a pas besoin de ses sens affutés pour découvrir les occupants, simplement de sa vue : des pirates armés jusqu'aux dents et d'étranges personnages en costumes noirs qui arquent un sourcil en découvrant l'adolescente aux cheveux blancs qui les fixent.