S, comme Shinigami [Ace X OC]

VII Princesse sonar

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          Les mots d'Izou résonnent par escargophone dans tout le Moby Dick, réveillant son capitaine par la même occasion. Un monstre marin passe encore, mais autant, regroupés en un même lieu, ne laissera pas un navire indemne. Celui de Blenheim en particulier ne possède pas de coque en granit marin, une victime de choix pour les colosses.

L'annonce faite, Sasha essuie son nez ensanglanté du revers de son bras, laissant une trace rouge sur sa peau. L'odeur du fer lui donne envie d'éternuer, mais Izou ne lui en laisse pas le temps. Tout en ouvrant la vigie, il l'attrape par la taille et saute avec elle pour atterrir sur le pont. Elle n'a pas le temps de hurler de peur que la voilà de nouveau sur ses deux pieds, abasourdie d'avoir effectué un tel saut. Chancelante, la jeune fille se dirige vers le bastingage et se penche tant que d'aucun croirait qu'elle compte se jeter à la mer. Son regard se perd sur l'eau aussi calme qu'un lac. Difficile d'imaginer que des bêtes en colère se cachent en-dessous.

— Sasha !

Ajoutée à l'appel de Barbe-Blanche, l'air qui tremble donne un frisson désagréable à l'adolescente dont les tympans manquent d'éclater après toutes ces sollicitations. Au petit trot, elle rejoint le centre du navire.

— Qu'as-tu senti ? Questionne le capitaine devant ses fils et filles, dont une bonne partie s'est rassemblée autour d'eux.

— Quatorze monstres marins sous le bateau de la neuvième division, détaille-t-elle sans se faire prier.

— A quelle profondeur ?

— Je... Débute-t-elle, prise de court par une demande si précise. Je vais trouver.

Les yeux à nouveau fermés, Sasha se concentre d'abord sur sa respiration pour calmer les soubresauts de son cœur, fait pour tout sauf l'action. Ses poumons se gonflent à un rythme régulier, se calquant sur les vagues, toujours elles. Il lui faut s'échapper du Moby Dick, des chuchotements des pirates qui l'entourent, des bruits de ceux qui courent pour affaler une voile, de ceux qui hurlent des ordres et surtout de ceux, impatients et sceptiques, qui ne cachent pas leurs doutes.

— Est-ce qu'elle ment ?

— Quatorze monstres marins ici, c'est pas possible, on est super loin de Calm Belt... Rétorque Yan, le grand blond à la mèche folle, en grommelant dans sa barbe.

Sasha les ignore. Leurs voix s'effacent une par une, tout comme le sifflement de leur respiration, le battement de leur cœur, le frottement de leurs vêtements, le pas de leurs chaussures sur le sol. Tout. Elle plonge. Sa peau frissonne à l'instant où elle s'imagine immergée dans cet espace si vide, où la lumière disparaît mètre après mètre. Plus elle s'enfonce, plus son corps tangue sur le Moby Dick, jusqu'à ce que ses genoux touchent le pont. Elle les entend à nouveau, ces signaux stridents qui lui brisent le crâne à mesure qu'elle accepte de les écouter. Instinctivement, Sasha entoure ses oreilles de ses mains, comme pour se protéger de ce qu'elle s'apprête à faire : s'enfoncer plus profondément. Elle compte la distance, ses lèvres bougeant sans qu'aucune parole ne sorte. Une animosité sans pareille s'échappe de leurs complaintes, comme si le passage de la flotte avait dérangé les monstres tapis dans l'ombre, prêts à dévorer la première coque à portée de crocs.