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Une semaine plus tard, 19 janvier 2015

Sheila attendait dans la salle d’attente du commissariat depuis plus de trois quarts d’heure. L’inspecteur était, paraît-il, en entretien important. Il avait dit qu’il n’en avait pas pour longtemps mais il avait visiblement oublié sa promesse. 
Sheila, elle, par contre, était au rendez-vous. Toute la semaine, elle n’avait cessé de regarder son téléphone dans l’espoir de nouvelles de Brahms. Mais rien. Et aujourd’hui, encore rien…
Pour passer le temps, elle jouait à “Candy Crush” sur son portable, tout en jetant de brefs coup d'œil vers la porte. Elle avait l’habitude de cette gymnastique. En effet, il est essentiel pour tout professeur d’élaborer un plan “distraction-concentration” à mettre en œuvre à chaque interrogation. Sheila possédait ces yeux détecteurs de triche qui n’avaient toutefois pas besoin de fixer constamment leur auditoire. C’est grâce à ses compétences qu’elle remarqua un policier en train de passer au fond du couloir.
— Excusez-moi monsieur ?
Celui-ci se retourna. Elle reconnut alors l’adjoint de l’inspecteur qu’elle avait vu la dernière fois.
— Vous savez si M.Brahms en a encore pour longtemps ? Il m’a dit, il y a trois quarts d’heure, qu’il avait presque fini.
Gen connaissait bien son patron et il savait que celui-ci n’avait pas vraiment la notion du temps.
— Je vais voir mademoiselle.
— Merci.
Le policier s’effaça quelques secondes puis annonça à la jeune femme qu’elle pouvait entrer, et qu’il fallait excuser M.Brahms de l’avoir fait attendre. Quand elle passa la porte, elle remarqua, derrière une montagne de dossier, un autre homme qu’elle ne connaissait pas. Cheveux grisonnant, élégamment habillé, il avait l’air surpris de la voir entrer. Il devait être complètement absorbé par son travail, pensa Sheila en riant.
— Ah mademoiselle ! Excusez-moi ! M. Delseny et moi étions tellement accaparés par notre affaire, que j’avais oublié de vous faire entrer.
— C'est pas grave.
— Installez-vous, je vous en prie. Je vous présente M. Delseny, détective privé. Voilà Mlle Sheila Delaire. Elle vient ici pour la disparition de son frère qui a eu lieu la semaine dernière.
Cette fois Delseny sursauta tout à fait.
— Enchantée monsieur.
— Euh… oui… excusez-moi… enchanté mademoiselle.
Il avait l’air de revenir tout droit d’un aller-retour flash éclair au bout du monde.
— Je suis vraiment désolé mademoiselle, commença Brahms, mais si je ne vous ai pas contacté cette semaine, c’est parce que je n’ai eu aucune nouvelle de votre frère pour l’instant.
— Oui je m’en doutais.
— Nous avons eu quelques appels de personnes qui l’auraient aperçu, mais rien de concluant.
— Je vois.
— Mais ne désespérez pas. Je vous tiendrai au courant. Et je vous donne rendez-vous pour la semaine prochaine.
Brahms savait que ces petits rendez-vous ne servaient à rien du point de vue de l’enquête. C’était plutôt un moyen d’aider les gens à tenir, à ne pas désespérer.
Sheila remercia l’inspecteur et se dirigea vers la porte. Dès qu’elle fut sorti, Delseny explosa :
— Tu as bien dit Sheila Delaire ?
— Euh oui, pourquoi ?
— Et son frère, celui qui a disparu, comment il s’appelle ?
— William, William Delaire.
Delseny hésita.
— Et… leurs parents ?
— Je ne me souviens plus de leurs noms, mais ils sont morts… lors d’une mission en Arctique. Eh qu’est-ce qui t’arrive mon vieux ? T’as avalé ton café de travers ? Tu veux que j’appelle un médecin ? T’as l’air tout pâle !
— Non, passe-moi plutôt son numéro s’il te plaît !

Sheila marchait rapidement, comme toujours, en direction de son appartement. Il n’y avait que quelques pas entre le commissariat et chez elle. Elle regarda sa montre : 10h30. C’est bon, elle ne serait pas en retard. Elle traversait le parc en face de son immeuble quand son téléphone sonna. Elle décrocha en une demi-seconde :
— Allo ?
— Oui allo, Mlle Delaire ?
— Oui.
— C’est M. Delseny… euh je ne sais pas si vous vous souvenez de moi ?
— Oui je me souviens très bien.
— Bien, alors, c’était pour vous proposer mon aide en tant que détective privé.
Sheila hésita.
— Je vous remercie monsieur, j’aimerais beaucoup. Je ne sais pas à quel prix vous me proposez vos services, mais voyez-vous, le problème c’est que je ne pense pas avoir les moyens.
— Ne vous inquiétez pas, il n’est pas question d’argent. Vous savez, cette affaire m'intéresse beaucoup. Je suis prêt à travailler pour vous gratuitement.
— Gratuitement ! Vous rigolez ?
— Non mademoiselle, je suis sérieux.
— Mais je ne peux pas vous laisser travailler gratuitement !
— C’est soit ça, soit rien mademoiselle.
Sheila ne savait pas quoi répondre… Pouvait-elle faire confiance à ce M.Delseny ?
— Est-ce que je peux vous donner ma réponse demain ?
— Oui pas de problème. Rappelez-moi dès que vous êtes décidé.
Sheila raccrocha. Elle n’en revenait pas.

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