27

8 3 0
                                    

William commençait à paniquer. Il était 23h03 et le gardien ne passait toujours pas. Il ne pouvait en aucun cas partir avant son passage, auquel cas sa fuite serait surprise bien trop tôt. D’un autre côté, il ne lui restait maintenant qu’une douzaine de minutes pour tenter de rejoindre l’avion. 23h04. Il entendit des pas feutrés dans le couloir. Le gardien s’approchait de sa cabine.  Puis soudain le déclic du judas. William se mit à compter jusqu’à trente. Vingt-huit, vingt-neuf, trente ! Il se leva d’un bond sur ses pieds, colla une dernière fois son oreille à la porte et ouvrit le hublot en grand. Un vent glacial emplit alors la chambre. William n’avait pas de manteau. Il n’avait pas non plus de bonnet, ni de gants. Juste un parka qu’il enfila rapidement. Il sortit ensuite la chaîne de draps de dessous son lit et accrocha l’une des extrémités. Puis il fit glisser le reste de la corde à l’extérieur. Il testa une dernière fois la solidité de l’ensemble, puis s'élança vers le vide.
Une longue et pénible descente commença alors. Le vent cinglait son visage et ses mains. Il ne sentait presque plus ses pieds. De longues secondes s’étaient écoulées mais il n’avait aucun moyen de savoir l’heure exacte. Plus que quelques mètres. Le drap blanc ondulait sous l’effet du vent. William essayait de chasser la douleur de son esprit. Il descendit encore un peu, puis, alors qu’il se trouvait à une hauteur raisonnable, il sauta dans le vide.
Le jeune homme atterrit sur ses pieds sans trop se faire mal. Il se mit alors à courir vers l’arrière du navire, en-dessous duquel l’avion de ravitaillement avait l’habitude d'atterrir. Le sang commençait de nouveau à circuler dans ses jambes et dans ses pieds. Personne n’avait pu voir l’exploit qu’il venait d’accomplir. Il espérait seulement qu’on ne se rendrait pas compte trop tôt de sa disparition. Pour l’instant, rien n’était joué !

Delseny marchait dans les couloirs de l’Endurance, tout en essayant d’étouffer le bruit de ses pas. Il n’avait pas peur. Depuis qu’il avait quitté la base, il n’avait d’ailleurs eu peur de rien. De rien, sauf de ses sentiments. Chaque porte, chaque couloir, chaque odeur, chacun des bruits de ses pas qui heurtait le sol, ne cessait de lui rappeler son passé et d’augmenter son émoi. Il s’arrêta et prit une profonde inspiration. Pour l’instant, il n’avait remarqué personne dans le bateau. Y avait-il vraiment quelqu’un dans ce navire endormi. Il avait pourtant bien entendu un avion se poser tout près de l’Endurance quelques minutes plus tôt.
Un bruit de voix parvint alors à ses oreilles. Il tourna la tête et bifurqua dans un couloir perpendiculaire. A quelques mètres en face de lui, une porte légèrement entrouverte laissait passer la lumière. Deux hommes parlaient en anglais, visiblement à un troisième personnage. Delseny s’approcha un peu plus de manière à entendre ce qu’ils disaient. Il se posta finalement à environ un mètre de la porte et écouta.

William venait d’arriver près de l’appareil, un petit avion blanc qui se fondait presque dans le décor. Le jeune homme cherchait à monter le plus discrètement possible à l’intérieur de celui-ci. Les hommes étaient affairés à l’entrée du bateau. Ils avaient presque terminé leur transaction. Mais alors que l’un deux venait de faire tomber sa marchandise, William profita de l’agitation du moment pour se faufiler à l’intérieur de l’appareil. Il se dépêcha de trouver une cachette avant le retour des hommes. Une fois en sûreté, il se permit alors de relâcher un peu son attention. Il en profita pour protéger ses mains endolories par le froid.
Soudain un bruit énorme retentit. Tout devint noir. On venait de fermer la soute. William ne savait même pas où cet avion allait l’emmener.

Le Secret de l'Endurance Où les histoires vivent. Découvrez maintenant