Lucifer in Love

Chapitre 19 - Grace

— Je vais te tuer sale gosse ! 

Je suis cachée sous ma couette comme si elle pouvait me protéger du monstre qui rode dehors. J'entends la poignée tourner et le déclic du pêne dormant. Le grincement de la porte resonne dans le sombre silence de ma chambre et le raie de lumière sur le parquet me tends.

Je sens que ma couette est arrachée et qu'on me retourne sur le dos. Je vois son visage tordu de haine pour moi, sa fille. Ses yeux semblent brûler du feu des enfers. Sa main se pose sur mon cou d'enfant et commence à serrer. 

— Où t'as foutu mes bières, espèce de garce ! T'es comme ta mère de toute façon, petite pute ! 

Je lui cache son alcool, bouteille par bouteille au fil des mois parce que j'ai vraiment l'impression qu'il peut nous tuer lorsqu'il est soul. Et même s'il finit par le découvrir à un moment ou à un autre, il ne nous frappe qu'une seule fois et les fleurs du mal qui éclosent sur nos peaux, on le temps de disparaitre pour quelques temps.

 Pour une fois, quand je sens que l'air me manque, je ne lutte pas et ferme les yeux. Je me résigne, j'abandonne. 

— Grace ! 

Ma raison de vivre. J'ouvre les yeux et voie le monstre me lâcher et se retourner pour frapper mon rayon de soleil. Je hurle. 

— La cave ! Derrière les valises !

Il se retourne un sourire carnassier sur le visage, un sourire qu'on oublie pas, même dans la mort. 

Je me réveille en sursaut. J'ai fait un cauchemar et la seule chose que je vois lorsque je referme les paupières, c'est le visage de mon géniteur. Je panique et met plusieurs secondes avant de réaliser que j'ai échappé à mon subconscient. Je suis assise sur mon lit les jambes tendus, le cœur a mille. Je me rallonge et sens Lucifer se redresser dans mon dos.

— Grace qu'est ce qu'il y a ?

Je me met sur le dos, et je le vois à peine à cause des larmes qui s'accumulent dans mes yeux. J'ai du mal à parler à cause des soubresauts qui agitent mon corps. 

— L'homme que j'ai vu dans la grande salle c'est... mon... mon... père pas vrai ?

Il hoche douloureusement la tête en essuyant les larmes qui roulent sur mes joues. 

— Tu sais... il a... mon frère... horrible...Tim...

La moitié de mes mots se perd dans le torrent de mon chagrin mais Lucifer semble comprendre où je veux en venir. Il ne me demande rien. Il me laisse me libérer de ma tristesse avant qu'elle ne puisse empoisonner mes organes. Parce que c'est ce que font nos émotions lorsqu'on refuse de les exprimer, elles finissent par nous pourrir de l'intérieur. Lucifer attends et dans son regard je vois toute la patience que possède un homme comme lui. Un roi. Mais le plus important pour moi, c'est qu'il tient sa promesse. Je souhaite porter ta tristesse et ta douleur. Et c'est ce qu'il fait, il tient mon âme dans ses mains pour me protéger en attendant que je me reconstruise. Et ce constat m'aide à retrouver mon calme. 

Il caresse l'arrière de ma tête en me tenant dans ses bras. Je commence à me rendormir, comme a chaque fois près de lui, lorsque sa voix traverse la brume du sommeil. 

— Il paiera, je te promets. 

***

— Allez debout la marmotte. 

Je souris bêtement et ouvre les yeux après avoir senti une secousse. 

— J'espère que tu as une bonne raison de me réveiller avant le lever du soleil.