La Meute des Barbelés [Terminé]

Chapitre 45 L'épopée : camp en flammes

L'emblème de la meute reste un peu plus longtemps que d'habitude, un cercle de flammes rougeoyantes traversé de barbelés noirs.

Il s'anime, le brasier crépitant envahit l'espace. Des silhouettes se découpent sur l'incendie. Un rhinocéros, un éléphant et un rat se jaugent du regard. Des backens, sous forme humaine, sautent de joie et se tapent dans le dos.

Sur le côté, Maestro et Luau observent le spectacle. Le visage de Max reflète les lueurs dansantes. Maestro pose la main sur son épaule.

— Ne t'inquiète pas, lui dit-il. Elle va arriver. Elle a besoin de quelques instants pour accepter la situation.

— Papa a dit que ce serait toi mon père à présent, répond celui qui est mon neveu.

Son interlocuteur s'agenouille devant lui.

— Je te protégerai et t'élèverai comme mon fils, annonce Ange avec solennité. Je t'adopterai comme le veut la coutume.

Ses traits semblent si jeunes qu'il ne paraît pas beaucoup plus âgé que son futur fils.

À côté d'eux, des backens sous formes humaines s'allongent dans l'herbe, la humant avec délectation, riant du bonheur d'être libres. Le rat commence à tourner autour de l'éléphant, le rhinocéros observe.

— Allez, allez, crie Luau, tout le monde se prépare à avancer, vers la forêt. Les brigades de renforts vont arriver, allons nous placer hors de vue.

Il s'adresse à tous, mais ses yeux reviennent toujours vers le reste de la cohorte.

— Mais maman ?

Tout en gardant lui aussi un œil sur les trois animaux, Maestro se relève d'un bond et le rassure :

— Elle saura nous retrouver, ne t'inquiète pas, et n'oublie pas qu'elle va venir par les airs, c'est beaucoup plus rapide !

L'éléphant pivote sur lui-même de manière lente et pesante, le rat tout en légèreté court autour du pachyderme. Le visage du rhinocéros semble sourire.

— Ils la croient déjà morte, devine le fils en désignant les trois garous. Ils veulent se défier pour devenir le chef mais ta présence les en empêche.

— Je vais régler cela.

Les traits de Ange se durcissent et il émet un sifflement au son duquel tous se tournent vers lui, même les trois animaux qui demeurent vigilants l'un envers l'autre :

— Nous allons repartir. Tous derrière Luau, sauf les surv, qui restent avec moi

Les backens s'élancent vers le couvert de la forêt. Ange fait passer Max derrière lui et croise les bras. Lagna est la première à bouger. Elle soulève sa patte avant, doucement, comme si elle hésitait. Ange se contente de pencher la tête sur le côté. Elle recule d'un pas et baisse les yeux, imitée par les deux autres. Marik commence sa métamorphose. Tous attendent les cinq minutes nécessaires pour qu'il se retrouve nu et à genoux, tête baissée.

— As-tu quelque chose à dire, Marik ?

— Nous ne te remercierons jamais assez de cette évasion, Maestro. Notre reconnaissance te sera éternelle. Cependant, puisque nous sommes dehors, notre alliance peut prendre fin.

Max a tourné la tête vers Ange, qui éclate de rire.

— Vous les purs n'avez aucune idée de comment fonctionne une meute. Je n'ai pas le temps de vous expliquer toutes les règles, dit leur chef en contenant un sourire dans la voix. Alors, je vais vous montrer ce que signifie être enfant de la Madrée.

Il tend les mains vers le sol et de fines particules s'en élèvent, de l'irhe. Celles-ci suivent le mouvement de ses doigts et s'enroulent autour de la cohorte. Marik redevient rat, les deux autres prennent forme humaine. Leur métamorphose a été instantanée.

— Que... ? demande Lagna

Le visage de leur alpha se durcit quand il énonce :

— Les garous sont enfants de la Madrée et les ordres de la Madrée passent par mon intermédiaire pour notre meute. Ce sera le premier et le seul avertissement. Miro, tu portes Max.

Un claquement de doigts et l'éléphant réapparaît. Il saisit mon neveu avec sa trompe et le place sur son dos.

— Bien, à présent, rattrapez les autres.

La cohorte se met à courir, Max riant d'être chahuté. Ange sourit et lance un dernier regard en arrière avant de s'élancer.

L'ombre d'un aigle s'élève devant les flammes.