Cavalier d'Argent - Tome 2 : Elduniria

Chapitre 11 : le chevaucheur d'ombres et l'invocateur de lumieres

Ian jurait comme un charretier mais maître Tom ne le retint pas. Lui-même ponctuait le récit des récents événements par des mots que la morale désapprouve. Maitre Huto avait du s'assoir et son aura écrasait tellement la pièce que nous avions dû quitter la grande salle. Le froid c'était encore renforcée sur l'île de Cers et Ian avait posé son front contre la pierre des murs pour garder la tête froide. Les travaux que nous conduisions pour réaménager les lieux avançaient bien même si le manque de matériaux se faisait sentir. J'étais assis proche de la cheminée dans lequel mon maître avait allumé un grand feu sans bois, pour me réchauffer. J'avais retrouvé mon épaisse tunique rouge en laine, mon bandeau blanc et mes cheveux s'éclaircissaient de jour en jour. La pâte de charbon était resté dans mes sacs à Étésien.

Les bandelettes qui recouvrait mes bras blessés luisaient doucement d'un éclat vert, enchantés par Camélia et son maître. Leurs tentatives pour avancer ma guérison se révélaient peu fructueuses. Aussi ils décidèrent d'enchanter les bandelettes pour apaiser la sensation de brûlure.
Quand je finis par évoquer l'exploit de maître Anila, les deux maîtres sourirent, et maître Tom se mit à rire.

- Cette gamine est vraiment exceptionnelle.
- Mais vous avez quel âge au juste ? Demande Ian sans tact en se retournant.

Maitre Hûto commençait à compter sur ses doigts mais il finirent par se contenter d'hausser les épaules. Ils n'en avaient aucunes idées, ni l'un, ni l'autre. J'explosais de rire en repensant à mon pari avec Jo. Si les maîtres eux même ne se rappelaient pas de leur âge, nous ne saurons jamais lequel de nous deux avaient raison.

Je fis quelques mouvements de bras, et réajusta l'épée à ma ceinture, le poignard de la mère contre ma cuisse puis le bandeau sur mon front, plus par habitude que par nécessité. Ian portait deux cimeterres jumeaux sous une lourde cape. Aucun doute ne subsistait sur l'identité de son maître. Lorsqu'il approchait, j'examinais un peu la broche d'attache de cette dernière avant de sourire. Ian avait à disposition la protection de son maitre physique et énergétique.
J'avais sauté jusqu'à Cers en appelant un rayon qui me conduirait à Soliane. Lorsque ma main s'était refermée sur le fil lumineux pour m'emmener, même en ayant protégé ma main la plus valide, l'énergie m'avait traversé avec tellement de violence que j'avais failli m'évanouir à l'atterrissage. Au final c'est Ian qui avait pu diminuer mes douleurs en glissant des ténèbres dans mon corps. Il était près à partir. Je l'étais aussi. J'embrassai la grande tête triangulaire de Soliane qui ronronnait comme un gros chat. Il me manquait beaucoup mais le savoir en sécurité me soulageait d'un poids. Ses angoisses, par contre, ne trouvaient aucune source de réconfort.  

"Jolan, si cet homme peut suivre ton énergie, est-il vraiment utile de ne pas communiquer lorsque tu es sur le continent ?"

"Je pense que oui mon ami. Il me fait peur. Je ne peux pas lui offrir sur un plateau d'or l'opportunité de faire encore du mal à quelqu'un. Surtout aux gens que j'aime, et encore moins à toi. Il ne doit pas savoir pour cet endroit."

"S'il a un dragon..."

"Son compagnon ne lui révelerait jamais l'endroit où s'en prendre à ses congénères."

"J'espère. Jolan, je refuse cependant de mettre du tissu dans notre lien. Je sais que..."

"D'accord. le coupais je."

Il ronronna et fronta sa tête écailleuse sur ma joue. Nous étions suffisament proche pour ne pas avoir besoin de parler. Notre relation est personnel. Il est inutile de mettre de la distance entre nous. Si nous restions loin de la télépathie, aucun changement n'affectera l'énergie. Il n'y aura donc rien à détecter. Je me retournais en entendant le bruit d'une personne en train de courir dans la neige. Charlie arrivait à toute vitesse. Il posa avec la délicatesse qui était la sienne, ses mains sur les oreilles de Ian et je sentis le tranfert d'énergie de notre position. Charlie devenait de plus en plus fort et j'admirais son aura. Il bailla en retirant sa main de la boucle d'oreille triangulaire. Un salut de la main en guise d'encouragement et il repartit aussi vite qu'il était arrivé. Ian lui rendit avec un sourire en coin et les coins de mes lèvres s'étirèrent aussi.