Elle glissait sur la glace bras dessus, bras dessous avec ses deux amis. Leurs partiels étaient finis depuis un peu moins de vingt-quatre heures, et le soulagement de déjà avoir la certitude d'avoir réussi sa première année lui donnait des ailes. À ses côtés, Damien et Olivia essayaient de suivre le rythme. Elle leur était reconnaissante de ne pas l'avoir mise à l'écart depuis qu'ils s'étaient mis en couple quelques semaines plus tôt. Elle se rappelait encore quand elle avait essayé pendant quelques jours, sûrement les plus gênants de sa vie, de sortir avec lui en fin de terminale.
Au moins, ça lui avait permis à lui de comprendre ce qu'elle savait déjà : ils n'étaient pas faits l'un pour l'autre. Leur amitié n'en avait été que plus forte après, et il avait enfin pu tourner la page.
Lise, elle, était restée seule depuis, et savait très bien pourquoi.
- On devrait y aller, si on veut avoir le temps de se faire beaux pour ce soir. Lui fit remarquer Damien.
Elle hocha la tête, et essaya d'ignorer la petite boule au creux de son ventre, qu'elle n'avait pas sentie depuis si longtemps. Mais ça lui faisait à chaque fois bizarre de savoir qu'elle serait désormais seule pour tous les moments importants de sa vie.
Elle se corrigea intérieurement, elle n'était pas seule, elle avait les parents et les amis les plus aimants du monde. Mais le vide qu'il avait laissé ne pourrait jamais être comblé. Elle apprenait chaque jour à vivre avec, et il faut dire qu'elle ne se débrouillait pas mal. Peut-être pas la meilleure élève de sa promo, cette place était réservée à Olie, mais elle s'était déjà fait une réputation dans l'orchestre de sa fac, et la majorité des élèves appréciaient sa compagnie.
Quand ils se séparèrent à l'arrêt de bus, Olivia la prit dans ses bras.
- On se retrouve en coulisse avant le concert ? Et pas de stress, tu vas gérer. Tu as bossé dur pour ça.
En montant dans le bus, Lise se rappela le dégoût profond qu'elle avait ressenti pour la brunette à l'époque où elles s'étaient rencontrées. Ça la fit sourire. Il fallait vraiment être étrange pour ne pas tomber sous le charme de son amie, de sa gentillesse, sa douceur et son oreille attentive.
Son téléphone sonna, elle le coupa et ne rappela qu'une fois descendue du bus.
- Coucou maman.
- Coucou ma puce, comment ça va ? Pas trop stressée ?
- Non, pas réellement, juste excitée.
- Ton père m'a dit qu'il devrait arriver une heure avant ton passage, j'ai dû lui renvoyer l'adresse, il ne s'en rappelait plus.
Lise rigola doucement, c'était son père tout craché.
- Tu ne m'en veux pas trop de ne pas être là ce soir ? Lui demanda sa mère à l'autre bout du téléphone.
- Et rater le spectacle de Thomas ? Sûrement pas ! Ce n'est pas tous les jours qu'il aura la chance de jouer un bout de bois dans une pièce de théâtre !
Cette fois, c'est sa mère qui rigola franchement.
- Je t'interdis de répéter ça devant lui ! Et d'ailleurs, ce n'est pas un bout de bois, mais un majestueux chêne !
Chez elle, elle prit une douche rapide, embarqua sa robe dans son sac et se rendit à pied jusqu'à la salle de spectacle. Ça lui faisait un peu plus d'un quart de marche, mais elle avait besoin de s'aérer les idées. Quand elle arriva, son père était déjà là, en grande discussion avec Damien.
- Lisouille ! Pas trop le trac, ma puce ?
Elle haussa les épaules.
- Moins que quand on est passé devant le comité d'organisation pour la sélection.
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Le marchand de sable
FantasiaDans le monde réel, Lise se sent seule, menacée, écœurée des humains. Sa vie quotidienne, elle la passe en apnée, s'accrochant à son secret pour supporter et survivre. Car Lise est une rêveuse. Chaque nuit, alors que les autres dorment, elle, a la c...