Chapitre 7 - Impossible à aimer

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                            Daylight - David Kushner

Rebekah, deux ans plus tôt

Nous venons de rentrer d'une soirée organisée par Avery. Nous étions les premiers à quitter les lieux. Et pour cause, j'ai eu la mauvaise idée de répondre à une question de l'un des invités. Une règle à ne jamais transgresser. Lucas, alcoolisé au possible, n'a pas pu conduire sur le chemin du retour. J'ai dû m'en charger et je suis rentrée accidentellement dans le portail de celui-ci.

Je n'ai pas mon permis de conduire et je sais pertinemment que si je me fais chopper au volant, c'est toute ma vie et mes rêves qui seront réduits en cendres. Ce n'est pas ce qu'il souhaite après tout ? Me détruire et ramasser les lambeaux de mon corps. C'est plutôt tordu, de rester avec un homme qui ne veut en rien mon bien non ? Pourtant c'est bel et bien mon quotidien. Il a sans aucun doute dû me faire un lavage de cerveau pour que je continue à l'aimer de toutes mes forces.

Il est inutile de préciser qu'une mention sur mon casier judiciaire me fermerait les portes d'une potentielle bourse qui m'est vitale. Je rêve d'entrer à Oxford depuis toujours, de faire de longues études, d'apprendre et de voyager. Je ne vois pas ma vie autrement. Je me donne corps et âme pour atteindre ce but. Lucas m'a toujours encouragé à ne pas passer mon permis, pour une raison toute simple: je n'y arriverais pas. Mon anxiété me rend faible. Il a par ailleurs toujours une remarque à me faire, une conduite à me dicter.

« Ne conduis pas, tu es maladroite, tu finiras par tuer quelqu'un! »

« Ne sois pas ami avec cette personne, elle t'utilise. Pourquoi voudrait-elle te côtoyer ? »

« Ne porte pas cette robe, tu n'as pas le corps pour. »

« Tu souhaite être psychologue ? Mais tu n'es même pas stable, tu es complètement fêlée. »

« Personne ne pourra jamais t'aimer. »

Peut-être a-t-il raison ?

« Je dis ça pour ton bien tu sais. Je suis la seule personne qui tient à toi, n'écoute que moi. »

Il est le seul à pouvoir supporter le poids que je suis. Le seul à rester à mes côtés.

Mais par moment, même lui n'y arrive pas. Je l'aime à en mourir, à m'en écorcher. Je meurs chaque jour à ses côtés. Notre histoire a autant de haine que d'amour, autant de violences que de douceurs. Avant lui, je n'avais jamais connu de sentiments aussi forts. Je n'avais jamais aimé d'une façon aussi puissante. Jamais personne ne m'avait aimé de quelque manière que ce soit en fait. Il est le remède à ma solitude.

« Tu es trop compliqué à aimer Rebekah, parfois je me demande pourquoi tu t'es raté. »

Il a raison. Alors pourquoi ça fait aussi mal ?

Il est mon ancre et il m'entraine avec lui dans les profondeurs de la folie.

« Tes cicatrices sont si laides, cache-les. »

J'aurais dû couper plus profondément.

En passant la porte d'entrée, Lucas titube tellement que je dois le traîner jusqu'à sa chambre. Notre chambre.

— C'est à cause de toi si je me suis mis dans cet état. Regarde ce que tu me fais faire !

Je ne réponds rien, dépose mon sac sur le sol et le déshabille avant de l'installer au bord du lit.

— Dégage putain ! Casse-toi !

Il hurle si fort que j'en sursaute. Sa voix est tranchante et ses mots dévastateurs. Mais je le mérite, je ne suis qu'une épave. Un poids pour lui c'est bien ça ?

Oraison Funèbre (terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant