Oraison Funèbre (terminé)

Chapitre 9 - Esclave de son amour

Love me wrong - Isak Danielson

Rebekah

J'ai cru au grand amour une fois dans ma vie. Je le ressentais dans chacun des battements de mon cœur. Il était partout. Chaque cellule de mon corps lui appartenait.

J'ai lu des centaines de livres en parlant, j'ai écouté des centaines de chansons le clament.

J'ai grandi en idéalisant les relations et l'amour. J'en rêvais. Une seule fois, j'ai eu la chance de connaître ce sentiment grisant. Celui qui me donnait l'impression de flotter sur un nuage, constamment euphorique. Aucune drogue ne pouvait égaler ce sentiment. L'amour et l'attention que j'ai toujours cherché me tendait les bras. J'existais enfin pour quelqu'un et il était près à se consumer pour moi, tout comme je l'étais pour lui. À peine m'avait-il souri que je brûlais pour lui. Dès le premier instant, et jusqu'au dernier, je l'ai aimé.

De tout mon cœur et à en mourir. Un véritable incendie, les flammes grandissaient aussi rapidement que mes sentiments, elle se répandait en moi. En un battement de cil, j'étais prête à lui offrir mon coeur et mon âme. J'aurai combattu mille et une guerres pour lui, jusqu'à traverser les océans s' il me l'avait demandé.

Tout était parfait. L'homme que j'aimais était le plus extraordinaire de tous. Il a soigné mes plaies les plus profondes. Il m'a portée si haut, que lorsqu'il a fini par me lâcher, la chute était d'autant plus vertigineuse. Il m'aimait à la folie, celle-là même qui nous a détruits. L'amour s'est présenté à moi sous la forme d'un oiseau, le plus pur qu'il puisse exister. Il m'a enveloppé de ses somptueuses ailes, telle une protection. Mais derrière cette pureté, parmi ses plumes, se cachait une lame. Une lame suffisamment tranchante pour couper le fil qui me maintient en vie. En une fraction de seconde, mon monde bascule.

Peu à peu, jour après jour, son comportement changeait et le mien tout autant. Je n'étais que colère et souffrance, à son image. Mais peu importe la haine et la violence qui m'ont habités, ce n'était jamais comparable à la sienne. Il avait toujours le dessus et il gagnait chacune des batailles. Je ne faisais pas le poids face à lui, je ne le pourrais jamais. L'ascendant psychologique qu'il avait sur moi, envoyé tout valser. Esclave de mon amour, je ne pouvais trouver de réconfort que dans la mort.

Plus que tout, je voulais prendre mes affaires et passer le pas de la porte. Les voix à l'intérieur de ma tête me criaient de le faire. Mon traître de cœur lui, refusait de le perdre. J'étais complètement accro à cette relation tordue, bien trop accrochée à ce que nous étions. Deux parties d'une même âme, toutes les deux cabossées et fêlées. Personne ne pourra jamais le comprendre et personne ne pourra jamais aimer quelqu'un comme on s'est aimés.

Ils me prennent pour une cinglée, ils ont probablement raison. Ils ont vu nos cris, nos larmes et notre folie. Mais ils n'ont pas vu le moment exact, celui où nos cœurs se sont reconnus.

Nos souffrances se sont comprises et la douleur de l'autre nous a fait écho. Nous étions désespérément seuls, tristes et perdus. J'ai vu en ce garçon, un remède à cette solitude, une manière de combler le vide en mon cœur.

Il existe une légende, contant que les humains avaient à l'origine 4 bras, 4 jambes et 2 têtes. Ils étaient tellement obsédés par cette deuxième âme, qu'ils en oubliaient de prier. Zeus, fou de rage, les a séparés. Scindé en deux. Depuis des siècles, nous sommes donc en quête de la partie manquante de notre cœur.

Lucas était de cette partie là. C'était la raison même de ma vie, à la fois le début et la fin. J'ai vu sa peine, je l'ai comprise et ressentis. L'enfer serait sûrement plus doux, mais je n'arrive pas à me passer de ce brasier au creux de mon ventre. Parce qu'il était l'extension de mon être, je n'imaginais aucun avenir avec qui que ce soit d'autres. J'ai essayé. Ô oui, j'ai réellement essayé et des centaines de fois.