Chapitre 5.

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"Vous avez deux nouveaux messages de Louis."

Je répondrais plus tard. Je le rappellerai. Je vais le faire. Voilà. Voilà, exactement ce que je me suis répétée toute la journée, depuis deux semaines en vérité. Les genoux serrés, une main sur la bouche, comme si j'étais sur le point de déglutir, et le regard rivé sur cet écran qui m'affiche ma plus grande peur. Comme si la pression des examen à venir ne suffisait pas.

— "Pourquoi aussi loin ? On ne va rien entendre," gémit Maya en me rejoignant en haut des rangées de l'amphithéâtre.

Ah, et j'allais oublier le meilleur dans tout ça...

— "Je préfère rester le plus possible de son bureau, si ça ne t'ennuie pas." dis-je en tenant fermement mon téléphone.

Car oui, me revoilà dans ce stupide cours de biochimie. Je mentirai si je disais que je n'avais pas de boule au ventre. Car, depuis ce qui s'est produit lors de la soirée chez Lawrence, je ne saurais véritablement plus capable de le regarder en face. L'alcool qui avait pénétré mon cerveau ce soir-là m'a fait disjoncter et j'ai encore du mal à me faire accepter que j'ai presque insulté un professeur, et.. Peu importe ce qui s'est passé ensuite. La simple pensée à l'égard de lui me donne des spasmes dans tout le corps. Alors me voilà perchée aux derniers rangs de cette salle, à l'abri de toute attaque et de tout missiles.

— "Du bureau ou du professeur, tu veux dire ?" sourit Maya en esquissant un petit rire joueur - remarquant mon évidente antipathie.

Ce n'est pas drôle.

— "Tu m'as comprise." lui dis-je en ouvrant un peu trop brutalement mon livre de sciences sur la table.

— "T'as raison de rester loin de ce type, quand on était au lycée c'était vraiment un sacré numéro." lance-t-elle légèrement en sortant tranquillement ses affaires.

Curieusement, cette affirmation ne me surprend pas du tout.

—"Oui et bien, il l'est toujours."

Mon ton sec et aride retient soudain son attention, tournant son regard alors vers moi, j'ai droit à un sourire amusé.

— "Dis donc, tu lui en veux vraiment." ajoute-telle en m'observant.

Je réalise un peu tard que mes raisons pour le détester sont alors insuffisantes à ses yeux. Il faut dire que, après ce qui s'est passé chez Lawrence, je n'ai jamais parlé à personne de ma rencontre avec son frère dans cette fichue salle de bain. Autant que cela ne se sache pas.

— "Changeons de sujet," déclarais-je.

Son silence soudain suggère une réflexion que j'aurai préféré éviter, mais heureusement, l'arrivée tardive de notre très cher professeur vient interrompre cet échange. Dès qu'il franchit les portes de l'amphithéâtre, un silence précipité s'installe parmi les étudiants, comme s'ils redoutaient la sanction.  Mes yeux sont malgré moi aussitôt captivés par ses mouvements. Sa silhouette, vêtue d'une simple chemise blanche aux manches retroussées et au col légèrement ouvert rentrée maladroitement dans un jean, captive l'attention de la salle. Sa démarche est calme et assurée alors qu'il se dirige vers l'estrade, sans accorder le moindre regard aux étudiants qui l'observent avec appréhension.

— "Sortez tous vos livres," lâche-t-il tout à coup.

Il laisse tomber sa pochette de cuir noir sur le bureau, fourre une main dans sa poche, et s'avance nonchalamment vers nous, une expression de profonde lassitude ancré sur la face qui me donne envie de me terrer sous le sol. De là où je suis, il y a fort peu de chance pour qu'il m'aperçoive.

The Bad One - JungkookOù les histoires vivent. Découvrez maintenant