De l'Aube au Crépuscule

Chapitre 5 : Sarinah

Sarinah

On me dit de ne pas être en retard, mais que fais-je ? J'arrive une heure après, refusant catégoriquement d'obéir aux ordres de mon mari. Cela semble être une mauvaise habitude, mais je ne vois même pas ce que je fais ici, dans cet endroit bondé de monde. La vérité, c'est que je ne suis pas ce qu'on pourrait décrire comme sociable. En fait, je n'aime pas les gens. C'est quelque chose qui m'a toujours suivie depuis mon enfance.

Quand j'étais enfant, même en ayant des amis avec qui je m'entraînais, je passais le plus clair de mon temps à les éviter, préférant de loin la solitude à leur compagnie. Mes parents avaient bien tenté de me socialiser, de m'initier à des jeux d'enfants et à des activités de groupe, mais rien n'y faisait. Je me sentais toujours plus à l'aise quand j'étais seule, plongée dans un livre ou en train de rêvasser à des mondes imaginaires. C'est cette inclinaison vers la solitude qui me pèse maintenant, alors que je me retrouve ici, entourée de visages inconnus, dans une fête que je n'ai pas choisie d'adorer.

Heureusement, personne ne m'accorde d'attention, pas même Goliath, mon mari. Tout le monde semble trop occupé à boire à en finir – ou presque – ivre mort. Cette situation me convient parfaitement. Éviter le regard des autres est devenu une forme de soulagement pour moi, une manière de me préserver dans ce monde que je n'ai jamais vraiment compris.

Je m'approche de la table du banquet, attirée par un verre de vin, mais une main m'en empêche, me rappelant brutalement à la réalité. Je reconnais immédiatement la main ferme de Goliath, mon époux.

— Aussi longtemps que tu seras ma femme, je t'interdirai de boire, déclare-t-il d'un ton péremptoire.

Je le fixe avec mépris. Le ton qu'il utilise est celui d'un maître imposant des règles à son subordonné, ce qui me révolte encore plus. En réponse, je repousse sa main avec vigueur.

— Je ne te permets pas de me toucher, rétorqué-je en repoussant sa main.

Il ne se démonte pas et continue de me regarder avec un mélange de désapprobation et d'arrogance.

— Tu n'en fais qu'à ta tête décidément. Tu n'es pas restée enfermée dans la grotte assez longtemps. Une nuit ne t'a donc pas suffi ?

Je secoue la tête, un sourire amer se dessinant sur mes lèvres.

— J'ai trouvé cette nuit merveilleuse étant donné que je n'ai pas eu à voir ta sale tête de rapace, mens-je avec une note d'ironie. J'ai vraiment soif, ce n'est pas cool de m'empêcher de m'hydrater... !

Toujours dénué de sourire, il m'attrape brusquement par le col de ma robe, et la dureté de son emprise me fait mal. Il me tire avec lui vers une sorte d'estrade que je reconnais comme étant le centre de l'attention de cette soirée. À sa vue, tout le monde s'incline avec une révérence exagérée, et les musiciens cessent de jouer. L'atmosphère devient pesante, et l'humilité feinte de la foule me dégoûte. Je suis témoin de la servilité des hommes autour de moi, leurs postures accablées par une adoration forcée, alors que les voix dissidentes restent silencieuses.

Goliath se positionne sur l'estrade, et la foule se tait, absorbée par le discours imminent. C'est terriblement pitoyable de voir à quel point ces hommes, avec leurs pieds recouverts de verrues, s'abandonnent à la flatterie. Les bonnes personnes, celles qui devraient vraiment être entendues, semblent se faire rares dans ce lieu.

— Mes chers amis, nobles invités et estimés citoyens du royaume, commence Goliath d'un ton solennel, c'est avec une immense gratitude et une profonde humilité que je me tiens devant vous ce soir, en tant que votre nouveau roi, Goliath de Dreyfus. Cette soirée marque un moment historique pour notre royaume, un moment où nous nous réunissons non seulement pour célébrer, mais aussi pour regarder vers l'avenir avec espoir et détermination. Ma priorité étant d'écouter vos voix, de comprendre vos préoccupations et de travailler inlassablement pour bâtir un royaume plus juste, plus prospère et plus uni, j'ai réuni ce jour même un conseil de dix Mages. C'est avec cette vision en tête que je suis honoré de vous présenter ce soir les nouvelles lois qui guideront notre chemin commun vers un avenir meilleur. Certaines ont un rapport commun, mais d'autres ont un rapport personnel et sont plus connectées aux affaires royales.