Mi-octobre, année de première.
-Moi ?!
-Non, le pape ! Oui, toi !
Je brûle d'embarras, prie pour que le fauteuil dans lequel je suis installée m'avale, mais rien n'y fait. La proposition tourne en boucle dans ma tête. Le silence qui l'a suivie aussi, d'ailleurs, car il a contrasté avec le vacarme du débat qui faisait rage jusque-là.
Danser seule, c'est super. Danser de la danse classique seule, c'est encore mieux. Danser devant tout un lycée ? Eh bien...
-Plutôt crever, franchement.
Toutes les filles et quelques garçons rouspètent bruyamment suite à mon refus catégorique. Je rembobine un peu la scène pour tenter de prendre du recul sur la situation.
Pour faire court, quand Denki a rappelé à tout le monde que le festival du lycée était dans trois semaines, ça a déclenché une guerre civile. Les idées plus ou moins farfelues se sont succédées, n'arrivant jamais à convaincre la majorité de la classe. Un concert, bien sûr que ça aurait mis tout le monde d'accord, mais reprendre la même idée qu'en seconde, ça reflèterait mal l'esprit de compétition et l'investissement de la classe.
Momo a proposé quelque chose de, je cite, "plus délicat", Eijiro a répliqué que "c'est pas comme si on était des danseuses étoiles", Mina m'a lancé un regard appuyé, s'est écriée bien fort " Gigi pourrait faire un solo de danse classique", une vingtaine de têtes s'est tournée vers moi, et mon arrêt de mort était signé.
Voilà, c'est allé un peu trop vite à mon goût.
Toujours est-il que maintenant, je panique à l'idée de devoir danser seule une scène. Une vraie scène. Et surtout, seule. Donc, la méthode la plus simple est de refuser, dans ce cas-là.
À ce moment précis, la porte claque et Bakugo rentre sans même nous lancer un regard. Lorsqu'il daigne enfin tourner la tête et m'aperçoit enfoncée dans mon fauteuil, gênée et entourée de cinq fous furieux qui semblent prêts à m'égorger, il s'approche, une expression méprisante au visage (destinée à mes camarades plus qu'à moi, il me semble).
Mina et Denki, qui ont enterré leur instinct de survie il y a bien longtemps, se précipitent vers Bakugo et débitent les dernières idées et paroles de chacun. Ce dernier appuie ses coudes sur le dossier du fauteuil dans lequel je suis installée, légèrement penché au-dessus de moi. Je tente de rester stoïque, mais il a l'idée folle de saisir une mèche de mes cheveux pour jouer distraitement avec. Il fait tout le temps ça, et je ne m'en plains pas, loin de là. Cela relève presque du réflexe maintenant, je suis certaine qu'il ne s'est pas rendu compte de son geste. Je me mords la lèvre jusqu'au sang et baisse la tête, pour éviter que toute la classe ne voit mon sourire béat, et remarque encore plus son geste. Mon deuxième arrêt de mort et celui de Katsuki serait signé si quelqu'un remarque son mouvement.
-C'est quoi votre bordel ?, s'agace-t-il. Vous pouvez pas arrêtez de piailler en même temps ?!
Ils se taisent tous, je saute sur l'occasion. Je relève le tête jusqu'à m'en tordre le cou pour croiser son regard et explique:
-Ils veulent que je joue la danseuse étoile pour le festival.
Simple. Efficace. Le genre de résumé qu'on aime.
-Et ?
-Et je veux pas, moi. Danser devant tout le lycée ? Seule ? Sous les projecteurs ? Imagine que je fasse un faux pas. La honte.
-Personne ne fait de la danse classique dans ce bahut à part toi, tu peux faire autant de faux pas que tu veux et avoir trois temps de retard que ces imbéciles ne s'en rendront même pas compte.
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𝕋𝕖𝕒𝕣𝕪 𝔼𝕪𝕖𝕤 B. Katsuki x OC
Fanfiction''Prestance, Gisela.'' ''Eloquence, Gisela.'' La voix de sa mère s'infiltre comme un serpent dans chacune de ses pensées. Et Gisela, elle aimerait tellement être aussi impassible que ce garçon dans sa classe. Ne pas avoir les yeux larmoyants si vite...