Chapitre 17 : Murmures (Partie 2)

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— J'ai eu l'occasion de voir le carnage accompli par son armée. Des centaines et des centaines de personnes ont été égorgées, et des royaumes entiers ont été mis à feu et à sang. Il a appris des erreurs de son père. Je prévoyais un voyage à la capitale les prochains jours pour m'entretenir avec l'ensemble des gouverneurs afin de débattre du dossier. On décidera après avoir exposé les faits s'il faut ou non envisager une solution militaire.

— Nous avons amplement des soldats à notre disposition, mais je préfère les garder pour la conquête de l'Ora. Il nous est impossible de mener deux batailles simultanément et je désavoue l'Armée fédérée. J'appellerai tous les gouverneurs à se regrouper à la capitale. Arrange-toi pour y séjourner le temps nécessaire, je tiens à ce que tu rencontres Isleen. J'aurais souhaité prolonger notre temps ici, mais le devoir m'appelle ailleurs. J'espère te retrouver bientôt à la capitale.

Sloane se leva. Il embrassa Alcor et il disparut derrière les rideaux de soie. Sloane s'arrêta devant son carrosse. Son regard grave se posa successivement sur la montagne et ses chevaliers. Un rapide courant d'air, annonciateur de l'hiver proche, balaya les trois hommes. Le visage du roi s'était affaissé en l'espace de quelques instants.

— Avez-vous entendu tout comme moi ?

Les chevaliers acquiescèrent. Il poursuivit :

— Où en sommes-nous avec les gouverneurs ?

— Nous avons été obligés d'utiliser la force avec dix d'entre eux, expliqua Cimon. Ils persistaient à reconnaitre la légitimité de Thaumas. Nous avons à l'heure actuelle le vote de l'ensemble des vingt-trois gouverneurs.

— Il ne reste plus que le Conseil et... votre sœur, ajouta Marius.

— Je me charge de ma sœur, expliqua le roi. Nous retournons à la capitale. Marius, informe le grand prêtre qu'il peut utiliser l'artéfact du temps afin de ramener tes frères, et demande-lui qu'il me fasse des propositions de noms pour remplacer les dix renégats. Nous devons rapidement clore ce dossier. Je vais ensuite rappeler à ce vaurien d'Hadrien qui est le roi.

Sloane prit place à bord de son carrosse. Sa voix était pleine de colère et d'amertume. Le cocher actionna aussitôt la manœuvre. Les chevaliers sellèrent leurs chevaux et ils devancèrent le cortège.

— Quel temps de chien ! Nous sommes pourtant en plein été, constata Marius.

Il revêtit sa capuche et il souffla dans le creux de ses mains raidies par le froid.

— Tu n'as pas encore compris ! poursuivit son interlocuteur. Tous les signes qui annoncent le déclin de notre monde sont apparus. Les choses iront en empirant.

— Je ne te savais pas fataliste. Ne me dis pas que tu croies à ces histoires de bonne femme ? Soit ! Tout espoir n'est pas perdu. La Fille Fleur est censée tous nous sauver.

— La croyance des Fandragores n'a certainement pas prédit qu'elle serait entourée de rois fous, ironisa Cimon.

— Cimon, serais-tu en train de contester les agissements de notre roi ? répliqua Marius d'un air outré.

— Isleen est fait pour régner et son père en est conscient. Après l'Ora, le prince Hadrien, nous assisterons à une vendetta au sein de la famille royale. Le jour viendra ensuite où nous serons tous obligés de choisir notre camp, car il ne peut y avoir deux rois. J'y pense et tu devrais en faire de même.

Cimon mit sa capuche et lança son cheval au galop. Il se sépara du cortège et coupa à travers les bois. Marius cogitait sur les révélations de son frère d'armes. Le Chevalier de la Lumière réalisait peu à peu l'aspect sinistre de cette guerre menée par leur roi au nom de l'Ora. Il lui parut clair que les raisons profondes de Sloane étaient personnelles et qu'il n'engageait en rien la grandeur de leur patrie, Varda.

Ofelia, la Fille Fleur. Tome1: Origines.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant