Ofelia, la Fille Fleur. Tome1: Origines.

Prologue (Partie 2)

Les terres qui coutèrent la vie à tant de Métamorphes et à tant de Fandragores furent octroyées à Anisville. Lyse, la nouvelle reine d'Anisville décida après son couronnement d'y ériger une cité. Au cours d'une mission d'exploration, les Fandragores finirent par découvrir l'Ora. 

La rumeur de l'existence d'une telle arme se rependit telle une trainée de poudre. Cela donna lieu à d'énormes convoitises des royaumes voisins. Anisville était constamment en ligne de front. Menées par une reine tyrannique, ces différentes guerres permirent aux Fandragores d'acquérir l'expérience, la notoriété et la richesse. 

Fine stratège, Lyse noua de nombreuses alliances avec plusieurs royaumes voisins, notamment Varda. Ce peuple de braves chevaliers, descendants de la divinité Soleil, avait su dompter le feu et le fer. Anisville s'ouvrit aux autres civilisations sous le règne de Lyse. Les Fandragores partaient étudier dans les plus prestigieuses écoles de Val Este. La reine invita les meilleurs architectes à bâtir une métropole.

Le roi de Varda était face à un cruel dilemme au moment où tous échafaudaient un plan pour s'emparer de l'Ora et sursoir à l'ascension d'Anisville. Le vieux souverain, fatigué et malade, devait choisir son successeur parmi ses fils jumeaux, Varus et Créon. Le premier était brave et aimé du peuple tandis que l'apparence abominable du second n'avait d'égal que la noirceur de son cœur. Le choix paraissait évident, mais la reine vouait un profond attachement à Créon.

Le roi eut alors une idée : celui qui tuera le dragon Knut lui succèdera au trône. L'engouement autour de ce dragon était lié à la légende qui avait forgé sa réputation. Le dragon autrefois monté par la Divine Chloris serait invincible. La disparition de tous ceux qui osèrent franchir son repaire renforça la légende.

Les princes prirent séparément la route qui menait à l'antre de Knut. Varus fut le premier à le débusquer. Le prince s'était armé d'une épée et d'un bouclier. Le terrifiant Monstre bondit hors de sa cachette à l'approche du prince. Son souffle chaud déneigeait le sol sur plusieurs mètres. Son imposante queue écrasait avec fracas les rochers avoisinants.

Varus se tapit derrière son bouclier afin de braver chaleur. Le prince exécuta quelques attaques au moment où les flammes cessèrent. Le dragon esquiva toutes ses attaques malgré son adresse. Le prince réussit une percée à un moment donné. Il réussit à toucher Knut à la patte gauche. Varus profita de ce léger avantage et lui porta quelques coups successifs. L'épée rebondit sur la carapace écailleuse et visiblement impénétrable du Monstre. Le prince se concentra sur des endroits où la peau semblait plus molle.

Varus était téméraire. Il réussit finalement à infliger quelques blessures au Monstre. Absorbé par le combat, il en oublie le terrain escarpé. Un geste mal maitrisé lui fit perdre l'équilibre. Varus trébucha et perdit ainsi son avantage. Knut le plaqua au sol à l'aide de ses griffes acérées. Le prince se perdait dans ces yeux vitreux, son armure se tordait sous les griffes du Monstre. Elle imprimait les dessins du métal sur le corps meurtri du prince.

Varus ne désirait plus qu'une seule chose, que le supplice prenne fin. Ses hurlements résonnèrent au sommet de la montagne. Une épée s'écrasa soudainement près de lui. La lame fine était encore chaude et fumante. Le poignet portait la marque des Divines, une couronne à six rayons, entourée de feuilles de laurier.

Le prince appela ses dernières forces. Il effleura l'arme, s'en saisit, et sectionna la patte de Knut. Le dragon lâcha immédiatement sa prise et s'éloigna. Ses rugissements firent trembler la montagne. Des blocs de rocher se détachèrent et libérèrent de la lave en fusion. Varus se releva avec l'épée en main et il bondit sur les ailes de Knut. 

Le Monstre secouait son corps. Il tentait de faire tomber le prince. Varus accomplit quelques cabrioles et atteignit le cou de Knut. Il lui enfonça l'épée dans le cou avec un geste décisif. Le prince maintint l'arme et se laissa tomber. Une blessure béante partit du cou du dragon jusqu'à son thorax.

La carapace du Monstre était si dure que la lame en fut brisée. Knut tituba avant de s'écrouler à quelques pas du prince. De violents spasmes accompagnèrent le rendement de son âme. Varus se redressa. Il était blessé, mais vivant. Il saisit un morceau de son épée et monta le dragon. À l'aide de la lame ébréchée, il finit de lui ouvrir le thorax. Une flamme dorée brillait à la place de son cœur. Le prince hésita, mais elle n'était pas chaude au toucher. La main tremblante de Varus la porta à ses lèvres. Il ferma les yeux puis il l'avala.

Une vive douleur à la poitrine le saisit aussitôt. Elle partait de ses entrailles puis elle se propageait dans tout son corps. Les hurlements d'agonie du prince retentissaient au loin. Une voix apparue soudainement, elle invita le prince à cesser toute résistance. Varus se laissa peu à peu gagner par cette énergie. Miraculeusement, il n'avait plus mal. Il fut gagné par un sentiment d'invincibilité, et il l'était. Il voyait, il sentait et il entendait tout autour de lui. Il percevait la vie même sous les pierres. Tel était le secret de Knut.

Varus regagna les siens en vainqueur. Créon jalousa le sacre de son frère. En complicité avec la reine, il échafauda une conspiration qui visait à le tuer. Varus mourut dans d'étranges circonstances. Son frère mort, Créon fut couronné roi, mais il n'eut jamais la paix. Il sombra dans la démence, et le royaume tomba dans la décadence. 

Créon se convainquit que le fantôme de son frère hantait les murs du château, et il se retrancha. Un mystérieux prédicateur le guida par ses conseils, et il condamna à mort tous ses fils. Le trône de Varda reviendrait désormais aux fils de princesses. Afin de perpétuer le nom des Flint, les fils de princesses portaient le nom de leur mère, et les filles celui de leur père. Cette tradition entra dans les mœurs de Varda et perdura.

Une nouvelle datation débuta à la mort de Knut. Elle marquait le commencement d'une nouvelle ère. Elle serait le point de départ de ce récit. Les circonstances de la mort de Varus ne furent jamais élucidées. Ce fut bien plus tard qu'on retrouva les mémoires du prince. L'épopée de Varus, une autre vérité qui mérite d'être contée.