Chapitre 53

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#Landry

Je savais que j’étais allé trop loin, mais l'indifférence de ma femme et sa colère sourde ne pesaient rien face à tout le temps que j’avais passé avec Eva.

Ce soir-là, je rentrais chez moi dans l’idée de préparer ma valise. J'avais l’intention d'emmener Eva à l’étranger, histoire qu’on puisse mieux se connaître et renforcer notre relation.

Quand j'arrivai à la maison, un silence inhabituel régnait. Où étaient ma femme et, surtout, ma fille ? À peine avais-je formulé la question dans ma tête qu’Olivia fit son apparition dans le salon.

Elle semblait calme, se contentant de me regarder fixement.

__ Où est la petite ? demandai-je, légèrement confus.

__ Elle est chez ma mère, répondit-elle froidement.

__ Pourquoi tu l’as laissée chez ta mère, Olivia ?

__ Ta belle-mère, Landry. Et ce n'est pas comme si c'était une inconnue.

__ Hum...

Son calme me mettait de plus en plus mal à l’aise. Olivia n’avait jamais été aussi détachée, surtout dans une situation comme celle-ci. Je tentai de reprendre mes esprits.

__ Je suis juste venu préparer mes affaires, annonçai-je d’un ton presque banal, espérant briser cette tension.

Elle ne broncha pas, se contentant de me fixer avec ce même air distant.

__ Et tu pars où, Landry ? demanda-t-elle finalement, sans une once d’émotion dans la voix.

Je pris une inspiration. Je devais rester prudent.

__ Un voyage d'affaires, répondis-je en choisissant mes mots avec soin. À l’étranger, quelques jours seulement.

Elle hocha légèrement la tête, comme si c’était un détail insignifiant, puis esquissa un sourire imperceptible.

__ Un voyage d’affaires, répéta-t-elle calmement. Fais ce que tu as à faire.

Sa réaction, ou plutôt son absence de réaction, me déstabilisait plus que je ne voulais l'admettre. Pas de questions, pas de reproches... Son indifférence me glaçait.

Je pris quelques vêtements ensuite dans notre chambre, mais l’atmosphère me pesait. Olivia n’avait pas bougé. Son calme me rendait nerveux. Je savais que cette tranquillité masquait quelque chose, mais quoi ? Je ne pouvais pas partir sans avoir une réponse claire.

Je retournai dans le salon, la valise à la main. Elle était toujours là, assise sur le canapé, aussi impassible qu’au moment de mon arrivée.

__ Olivia... Tu es sûre que tout va bien ? demandai-je, cherchant à comprendre ce qui se passait dans sa tête.

Elle leva les yeux vers moi, avec ce même détachement qui me rendait fou.

__ Qu’est-ce que tu veux que je dise, Landry ? répondit-elle d'une voix mesurée. Que je suis furieuse ? Que je vais te supplier de rester ? Que je vais te demander où tu étais durant tout ce temps ? Je ne vais pas le faire.

Son ton était si calme, presque trop. Pas de reproches, pas de questions. Juste ce vide qui me mettait mal à l’aise.

__ Ce n’est pas ça... commençai-je, mais elle m’interrompit.

__ Tu fais ce que tu veux, Landry. Si tu as décidé de partir, je ne vais pas m’y opposer.

Elle se leva lentement, me regarda droit dans les yeux, puis ajouta d’un ton neutre :

__ J’espère simplement que ce voyage d'affaires vaut la peine. Parce qu’une fois que tu seras parti, il n’y aura plus de retour en arrière.

Je restai figé, ma valise à la main, incapable de bouger ou de dire quoi que ce soit. Olivia me regardait toujours avec ce calme imperturbable qui me rendait fou. J’avais l’habitude de ses reproches,  mais là, elle était silencieuse. Trop silencieuse.

Je tentai de reprendre contenance.

— Olivia… tu ne peux pas être sérieuse.

Elle haussa les épaules, un geste si léger qu’il aurait pu passer inaperçu, mais qui, dans ce moment précis, résonnait comme une claque.

— Je suis très sérieuse, Landry, répondit-elle, le ton plat, presque désinvolte. Je t’ai déjà dit ce que j'avais à dire. Si tu veux partir, pars.

Son détachement me déroutait plus que tout. D’habitude, elle se battait, elle s’accrochait. Là, elle se tenait devant moi, comme si tout était déjà fini.

Je cherchai ses yeux, essayant de comprendre ce qu’elle ressentait, mais ils étaient froids, impénétrables.

— Tu ne vas rien dire ? Pas un mot sur… tout ce qui se passe ?

Elle me regarda longuement avant de répondre, sa voix toujours aussi calme :

— Que veux-tu que je dise, Landry ? Que je suis en colère ? Que je vais te supplier de rester ? Je t’ai déjà dit que je ne le ferai pas.

Je sentais mon cœur battre à toute allure. Ses mots étaient comme des coups de poignard. Je m’attendais à tout sauf à ça. Je voulais qu’elle crie, qu’elle explose, qu’elle me demande des comptes. Mais elle n’en fit rien. Elle se contenta de rester là, à me regarder avec une sérénité qui me glaçait.

Je déglutis, sentant la panique monter en moi.

— Tu fais ça exprès, c’est ça ? Pour me faire culpabiliser ?

Elle esquissa un sourire, un sourire si faible qu'il disparut presque aussitôt.

— C'est toi qui te mets dans cette situation, pas moi.

Je me sentais soudain stupide avec ma valise à la main, prêt à partir comme si de rien n'était, alors qu'elle avait déjà tout compris.

*

Je voulus répliquer, mais au même instant, mon téléphone sonna. En voyant le nom d’Ava s’afficher sur l’écran, une vague de culpabilité m’envahit. J’hésitai un instant, puis renvoyai l’appel et me tournai vers Olivia.

— C'était qui ? demanda-t-elle d’un ton neutre, sans même regarder son téléphone.

Je marquai une pause, cherchant les mots justes.

— Juste un contact, dis-je, feignant l’indifférence.

Olivia hocha la tête, toujours impassible, comme si ma réponse n’avait aucune importance.

— D'accord, murmura-t-elle en s’asseyant sur le canapé, les yeux rivés sur un point éloigné.

Le calme qui régnait dans la pièce me devenait insupportable. Olivia ne semblait pas vouloir en parler, comme si cette conversation n’était pas digne de son attention. Elle se leva et commença à ranger des objets sur la table, totalement absorbée par cette tâche.

Je me sentis plus perdu que jamais. J’avais toujours cru qu’Olivia serait la première à me demander des comptes, à exprimer sa colère, mais là, elle restait silencieuse, me laissant dans un flou déroutant.

InfidèlesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant