Chapitre 84

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Plus tard.

Je clignai des yeux, essayant de chasser le brouillard dans ma tête. La pièce semblait se déformer autour de moi, les murs blancs ondulant doucement comme une mer calme. J'avais du mal à respirer, comme si l'air était trop lourd, trop chargé de questions sans réponse. Comment avais-je bien pu me retrouver ici ? Quelque chose clochait, mais impossible de mettre un mot dessus. Mon esprit était en morceaux, un puzzle dont chaque pièce semblait me fuir.

Les images défilaient dans ma tête sans ordre. Eva… Son visage, son sourire. Et puis la douleur, la trahison. Mais au-delà de ça, il y avait un vide, un abîme, comme si la réponse m’échappait à chaque instant.

Un bip régulier résonnait dans la pièce, troublant encore plus ma concentration. Je tentai de tourner la tête, d’identifier un élément familier qui pourrait m'aider à comprendre, mais mes mouvements étaient lents et chaotiques, comme si tout se passait sous l'eau.

Soudain, la porte s'ouvrit dans un grincement sourd. Un frisson me parcourut, et je tournai les yeux, instinctivement, vers l'entrée.

C'était elle. Ma mère.

Elle entra, sa silhouette se découpant dans l'embrasure de la porte. Une lumière froide la suivait, accentuant la rigidité de ses traits. Ses yeux, pourtant habituellement pleins de douceur, étaient aujourd'hui emplis d'une colère silencieuse, presque glaciale. Elle s'arrêta un instant, scrutant mes yeux comme si elle attendait que je réalise quelque chose, que je trouve la clé de ce qui venait de se passer.

__ Landry… Sa voix était tremblante, mais pas de peur. Non, c'était la rage contenue, prête à exploser. __ Comment as-tu pu être aussi stupide ?

Je clignai des yeux, cherchant à retrouver mes repères dans ce monde qui semblait avoir perdu tout sens. Ses mots, bien que pleins de douleur, me frappèrent comme des vagues violentes. Je voulais répondre, mais les mots me manquaient. Comment lui expliquer ce qui s'était passé ? Comment lui dire que j'avais été aveuglé, que tout avait dérapé si vite ?

Elle fit quelques pas vers le lit, les bras croisés, son regard toujours aussi dur.

__ Comment as-tu pu faire confiance à cette femme ? Sa voix s'éteignit un instant, mais elle reprit avec une précision glaciale : _ Tu l'as à peine rencontrée et voilà où cela nous mène.

Un poids lourd s’abattit sur ma poitrine. Eva. Je pensais à elle, à ce sourire si sincère, à la douceur de ses gestes. Et puis la douleur. Les mensonges. La trahison.

__ Maman… Tentai-je, mais elle me coupa, sa voix plus acerbe encore.

__ Tais-toi ! Elle hurla presque, les mots frappant l’air entre nous. __ À cause de toi, nous sommes ruinés. Ils nous ont tout pris. Tout.

Je serrai les poings, sentant la chaleur monter dans mes joues. Il y avait cette culpabilité qui me rongeait de l’intérieur, mais aussi cette colère, cette impuissance face à ce que j’avais perdu.

Elle poursuivit, sa voix tranchante.

__ Ton gestionnaire m’a contactée. Il m’a dit qu'il n’avait rien pu faire. Quand j’ai appris la nouvelle, j’étais sidérée. Et puis je suis allée à l’entreprise, tu n’étais pas là, alors j'ai pris la décision d’aller chez toi. Et là… je t’ai trouvée inconscient.

Ses mots me perçaient, chaque syllabe comme un poignard.

__ Tu vois ? Elle s’arrêta, son regard se durcissant.__ Tu vois où l’amour des fesses t’a mené ?

Je restai figé, l’image de ma mère me frappant avec une brutalité inattendue. Elle était là, en face de moi, mais en même temps si loin. Ses reproches étaient comme un tourbillon, un maelstrom dont je ne pouvais m’extraire. Tout ce que je voulais, c'était que la douleur s’arrête, que cette conversation cesse, mais la réalité me rattrapait à chaque seconde.

La tension monta d’un cran, la pièce semblait se resserrer autour de moi. Chaque mot de ma mère était comme une claque. Et pourtant, au fond de moi, je savais qu'elle avait raison. J'étais responsable. Complètement responsable. Mais comment lui expliquer ? Comment lui faire comprendre que ce qui semblait être une erreur de jugement, une défaite personnelle, était en réalité bien plus compliqué que cela ?

Elle fit un pas en avant, sa silhouette se détachant nettement dans la lumière froide.

__ Tu sais, Landry, continua-t-elle, sa voix plus calme mais toujours mordante,__tu m’as toujours dit que tu savais ce que tu faisais. Que tu avais le contrôle, que tout était calculé. Elle s’approcha de moi, me fixant avec une intensité presque terrifiante. __ Mais regarde où nous en sommes. Regarde ce que tu as fait de nous.

Je sentis une douleur sourde se propager dans ma poitrine. Je voulais réagir, lui dire que je n’avais jamais voulu que tout cela arrive, que je n'avais pas prévu les conséquences, mais les mots se bloquaient dans ma gorge. Tout ce que je ressentais était un mélange confus de honte, de culpabilité, et cette rage intérieure qui m'empêchait d'agir.

Elle détourna le regard, comme si elle ne pouvait plus me regarder.

__ Ton père paix à son âme a tout sacrifié pour nous, pour cette famille. Et toi, tu n'as même pas été capable de poursuivre cet héritage comme un fils digne. Quelle honte ! Je suis sûr qu'il doit être en train de te maudire dans sa tombe.

Je pouvais entendre les tremblements dans sa voix, mais il y avait quelque chose de plus… quelque chose de plus profond que la colère. Une douleur. Une déception. Et ça me frappait de plein fouet. Chaque syllabe qu’elle prononçait me renvoyait à l'échec de mes choix. Mes décisions. Ma vie.

__ Maman, je… Je commençai, mais elle me coupa net.

__ Non, dit-elle, sa voix soudainement faible, presque brisée.__ C'est trop tard, Landry. Tout est trop tard.

Je restai là, les poings serrés, incapables de répondre. Un silence lourd s’installa entre nous, aussi glacial que l’atmosphère qui nous entourait. Je voulais m’excuser, lui dire que j’avais tout gâché, mais il n’y avait rien à dire. Rien qui puisse réparer le mal que j'avais causé.

Elle tourna les talons et s’éloigna de moi, mais avant de franchir la porte, elle s'arrêta. Un dernier regard en arrière, lourd de reproches.

__ Tu t'es perdu, Landry, murmura-t-elle, presque inaudible. __ Et moi aussi. Olivia ne t'aurait jamais fait un coup pareil !!!

Puis elle disparut dans le couloir, me laissant seul avec ma culpabilité, ma honte, et cette sensation amère de tout avoir perdu.


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