Infidèles

Chapitre 85

Depuis ce matin, je n'avais pas eu une seconde de répit. Je devais m'entendre avec Landry pour trouver une solution pour notre ami Hervé, mais il était quasiment introuvable. J'avais dû utiliser mes contacts et mes relations pour lui dénicher un bon avocat. Ce dernier l'a rencontré, l’a interrogé pour savoir comment il comptait le défendre au procès. Tout semblait bien se passer, jusqu'à ce que l'on apprenne que Winnie avait déposé une nouvelle plainte pour menaces et tentative d'intimidation à l'encontre de la mère d'Hervé.

La situation se compliquait sérieusement. D'un côté, je voyais mon ami souffrir, conscient des erreurs qu'il avait commises. Mais de l'autre, je savais qu'il avait franchi des limites qu'il ne pourrait pas s'en sortir facilement. Alors, après un dernier entretien avec lui, j'ai pris la décision d'aller parler à son ex-femme.

Je voulais tenter une approche, lui demander de revoir sa position. Peut-être qu'elle céderait, peut-être qu'un geste de ma part pourrait changer le cours des événements. Lorsque je suis arrivé à l'hôpital où elle travaille, je l'ai trouvée en compagnie de Maëlys. La présence de ma femme, dans ce contexte, m'a déstabilisé.

Maëlys s'est figée en me voyant. Je pouvais lire dans ses yeux qu’elle ne s'attendait pas à une telle rencontre, et même si la situation de mon ami méritait toute mon attention, la tension entre nous était palpable.

— Bonsoir, ai-je dit, brisant le silence.

Elles ont répondu d’un ton glacé, sans grande chaleur.

— Winnie, est-ce qu’on peut parler ?

Elle m’a lancé un regard perçant avant de répondre d’un ton sec :

— D’accord.

Elle s’est ensuite tournée vers Maëlys, lui précisant qu’elle ne mettrait pas long. Ensemble, nous avons quitté son bureau, et je pris quelques instants pour rassembler mes pensées avant de lui parler.

— Je sais que tu es en colère, et franchement, à ta place, je le serais aussi, mais je suis là pour te demander de reconsidérer la situation. Tu sais que Hervé a toujours agi sur un coup de tête, qu’il est impulsif. Je t’assure qu’il le regrette sincèrement.

— Paddy...

— Laisse-moi finir, s’il te plaît. Je sais que ton homme a beaucoup de pouvoir, et face à lui, mon ami ne pèse pas lourd, mais je te demande de réfléchir, vraiment. Si tu le laisses partir, je te garantis que je ferai en sorte qu’il reste à l’écart de vos vies, qu’il ne vous fasse plus jamais de mal.

Elle m’observa en silence un instant, puis, avec une froideur qui n’avait pas disparu, elle répondit :

— Je suis impressionnée, Paddy. Honnêtement, je me demande comment un homme comme Hervé a pu être ton ami. Vous êtes tellement différents... mais qui suis-je pour juger ? Elle marqua une pause avant de poursuivre.__ Je ne te promets rien, mais je vais y réfléchir.

Un poids s'enleva de mes épaules. C'était déjà un progrès.

— Merci, Winnie. Tu es une personne exceptionnelle. Je te souhaite d’être heureuse dans ta nouvelle vie. Tu le mérites.

Elle haussait les épaules, comme pour minimiser, avant de murmurer un simple « Merci. »

Je pris une profonde inspiration avant de reprendre.

— J’aimerais te demander une dernière chose.

Elle leva les yeux vers moi.

— Je t’écoute.

— Est-ce que tu peux me laisser discuter quelques instants avec Maëlys ? Je sais qu’elle t’a sans doute parlé de notre situation, et...

Elle m'interrompit, me fixant droit dans les yeux :

— Paddy, je sais que tu es un homme bien. Tu m’as prouvé que tu l’étais par la façon dont tu as pris soin de mon amie. Et je lui ai dit qu’elle devrait reconsidérer sa décision, parce que je sais que tu l’aimes. Même si tu as fait des erreurs, je ne me permets pas de te juger sur ça. Mais je te demande une chose : prends soin d’elle. Je sais que les hommes peuvent faiblir, mais je t’en prie, n’oublie pas ce que tu risques de perdre si tu la trahis à nouveau.

Je la regardai intensément, conscient de la gravité de ses paroles.

— Je ne referai pas la même erreur, Winnie. Avant, je pensais que c’était la seule manière d’être un homme épanoui, mais j’ai compris que c’était faux. J’aime Maëlys. Et cette vie, ce bonheur avec elle et notre enfant, c’est tout ce qui compte pour moi.

Elle me sourit doucement, comme si elle avait enfin trouvé une sorte de réconfort.

— Tant mieux, alors. Je vais vous laisser discuter, mais... pas de bêtises, hein ?

Elle me lança un clin d’œil complice, avant de s’éclipser. Je la remerciai silencieusement pour la sagesse qu’elle venait de me transmettre.

*

Par la suite, je poussai lentement la porte de son bureau, et la refermai derrière moi avec un bruit sec. Maëlys sursauta, levant les yeux de son portable pour me fixer, surprise par ce geste inhabituel. L’air, jusque-là calme, semblait désormais chargé d’une tension palpable. Je ne savais pas exactement pourquoi j'avais agi ainsi, mais l'incertitude qui flottait entre nous exigeait que je prenne ce moment en main.

__ Il faut qu'on parle.

Elle se redressa, les yeux écarquillés, comme si mes mots l'avaient frappée en plein cœur.

__ On n'a rien à se dire, Paddy. Sa voix tremblait, mais elle tentait de masquer son trouble.

__ Oh, mais si… Et tant que cette conversation ne sera pas terminée, tu ne quitteras pas ce bureau.

Elle me regarda, les lèvres légèrement entrouvertes, un frisson d'incertitude traversant ses yeux.

__ Tu n'oserais pas… murmura-t-elle, une pointe de défi dans la voix.

Je m'avançai d'un pas, rapprochant mon visage du sien, chaque mot venant briser le silence lourd qui s'était installé entre nous.

__ Pour toi, je serais capable de tout. Absolument tout…