XVII

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L.A, dans la soirée du 13 juin 2000

-« Tu as tout ce qu'il te faut, finalement ? »

Je serrai contre moi le paquet de chips, goût barbecue et la bouteille de coca-cola que je venais d'acheter à l'instant, tout en hochant la tête. Henry parut satisfait de ma réponse et concentra à nouveau son attention sur la route, les deux mains sur le volant, sans piper mot.

Même si nous avions échangé quelques bribes de phrases depuis le début du trajet, je sentais que l'ambiance était sous tension. Lorsque je lui avais fait part de mon enthousiasme à me rendre à la soirée d'anniversaire d'Edwige, lui était resté réticent. Mais au final, avait quand même accepté. A contrecœur...

Pourtant, il n'avait opposé aucune résistance, et ne passait pas son temps à se plaindre du moindre détail de la future soirée, ou de mon choix. Il ne soupirait pas, ne rechignait pas, ne rouspétait même pas.

Il était simplement lointain, voir même absent.

C'était frustrant cette ambiance. De ne pas savoir ce qu'il pensait, ce qu'il aurait aimé faire. S'il était rancunier, si ça lui passait au dessus de la tête ou s'il s'était senti obligé par rapport à notre couple.
Le déni était parfois pire que la critique.

Je décidai de briser cette fâcheuse atmosphère afin de ne pas envenimer ce silence qui nous enveloppait. Non pas que je commençais à suffoquer, mais je préférai régler les problèmes maintenant, au lieu de le faire plus tard et de gâcher l'anniversaire d'Edwige. Ses vingt ans étaient une chose très importante pour elle, hors de question que je gâche la soirée de mon amie.

Je tortillais mes doigts, mal à l'aise, essayant d'engager la conversation avec mon copain. C'était la première fois que j'avais peur de lui parler de la sorte, nous qui osions nous parler de tout, ce qui rendait les choses beaucoup plus simples entre nous. Mais cette situation embarrassante était également une première. Autant amener le problème en douceur.

-« Sinon, nous arrivons bientôt ?

- Eh bien, nous avons fait un peu plus de la moitié du chemin. Le trafic est assez chargé ce soir.

- Seulement ? J'ai l'impression que ça fait des heures qu'on est dans cette voiture. »

Il ne répondit pas, le regard toujours rivé sur le pare-brise, tandis que les muscles de ses bras se tendaient un peu plus face à mon intervention. Mais moi, je ne détournai pas mon regard de lui. Je savais qu'il me distinguait du coin de l'œil. Il attendait que je crache le morceau.

Autant être directe maintenant.

-« Dis-moi que tu n'avais pas envie d'aller à cette fête. » déclarais-je soudain avec un débit de parole si rapide que j'eus moi-même du mal à me comprendre

Je crus qu'il allait s'énerver ou m'ignorer, mais il fit pire. Il changea de sujet, ce qui confirmait mes doutes.

- Mince, je sais plus si j'ai mis les deux sacs de couchages dans le coffre, tu avais vérifié ?

- Henry, s'il te plait... »

Il tourna quelques secondes la tête vers moi en soupirant, avant de reporter son attention sur la route, sans dire un mot de plus. Son soudain changement de sujet me faisait bien supposer qu'il y avait un problème, mais qu'il n'était pas prêt d'en parler. Quelle tête de mule ! Cela n'arrangerait pas la situation s'il gardait tout pour lui.

Je rivais alors mon regard vers mon paquet de chips, pensant qu'il ne voudrait pas répondre, mais je l'entendis murmurer doucement à mon égard :

À portée de main [en longue réécriture...]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant