XXXVII

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L.A, 25 août 2000, au soir.

[Dans ce chapitre, Tom est le narrateur]

Mes yeux s'ouvrirent péniblement, ma vision quittant le néant pour un décor désormais flou et incertain. Les couleurs pastelles – presque pimpantes, me déchiraient la rétine, me donnant presque envie de refermer les yeux.

Rapidement, toutes les douleurs de mon corps semblaient se réveiller une par une. Le sentiment de manque ne tarda pas à se faire ressentir, me forçant à descendre ma main vers le creux de mon dos. Mes doigts se heurtèrent à un pansement rugueux sans fin, qui me ramena aussitôt à la réalité.

L'opération avait l'air d'avoir fonctionné.

Un faible sourire naquit sur mon visage, encore paralysé par l'anesthésie et la fatigue. Nina allait désormais pouvoir vivre la vie qu'elle méritait d'avoir, et cette idée sembla me faire passer outre les moindres douleurs que je pouvais ressentir. En effet, je ne sentais presque plus ma gorge irritée, mon nez bouché et mes yeux humides qui peinaient encore à s'ouvrir. Encore moins le capteur qui était clippé à mon majeur, et que je tentais à présent d'enlever.

Cependant, une main se posa sur mon poignet pour m'intimer l'ordre de ne pas aller plus loin. Pris de panique, je sursautai et tournai brusquement la tête vers le corps d'une jeune femme de dos, que je ne connaissais que trop bien. Elle me l'avait beaucoup trop montré, à chaque fois que nous nous étions retrouvés ici.

- « Je t'ai fait peur ? demanda-t-elle, soudainement inquiète.

- C'est le cas de le dire. » soufflai-je avec difficulté.

Elle secoua la tête, faussement consternée. Voilà qu'elle me dévoilait désormais son meilleur profil, ainsi qu'une humeur moins massacrante. Je retrouvai donc doucement mon souffle.

- « Tu es là depuis longtemps ?

- Depuis une petite demi-heure, je crois, déclara-t-elle.

- Donc depuis une demi-heure, tu fixes le plafond en attendant que je me réveille, assise sur le coin de mon lit ?

- C'est à peu près l'idée, acquiesça-t-elle. Mais ne t'en fais pas, mes pensées m'ont tenues compagnie, et je ne me suis pas ennuyée ! »

Je finis par ricaner, mais rapidement, mes railleries se transformèrent en suffocation, dues à l'irritation permanente de ma gorge. Cela valu un coup d'œil de Kerrie, qui ne tarda pas à remettre sa tête là où elle était au départ.   

J'étais assez surpris de la retrouver là, alors que sa sœur était dans la chambre juste en face et qu'elle avait sûrement plus besoin de sa présence. Non pas que je ne m'attendais pas à ce qu'elle vienne jeter un coup d'œil empli de dédain dans l'embrasure de ma porte, pour s'assurer que je ferai toujours parti de sa vie ; mais de là à l'apercevoir droite au bord de mon lit me rendait presque curieux.

C'était étrange ce sentiment. Je venais à l'instant de sortir d'un sommeil profond que je n'avais même pas eu le temps d'anticiper, et voilà que le retour à la réalité était brutalement alléchant. Kerrie ne m'avait même pas laissé une seconde de répit, elle et ses inquiétudes mal placées.

- « Comment tu te sens ? finit-elle tout de même par demander.

- Comme un gars avec un rein en moins, qui se remet d'une opération. Ce n'est pas le genre de question que tu devrais poser à Nina ?

- Ne t'en fais pas, c'est prévu. J'attends juste qu'elle se réveille ; l'anesthésie a l'air de l'avoir achevée. »

Je hochai la tête difficilement. C'était sûrement facile de jongler entre la chambre de sa petite sœur et le gars qu'elle avait traité d'ordure, juste avant qu'il ne se fasse charcuter. D'ailleurs, son penchant pour celui-ci commençait à devenir assez ciblé, sans quoi elle n'aurait pas pris la peine de rester aussi calme à ses côtés.

À portée de main [en longue réécriture...]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant