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L.A, dans la nuit du 3 juillet 2000.

[Dans ce chapitre, Tom est le narrateur.]

Son visage s'enfonça à nouveau dans la cuvette des toilettes, tandis que je prenais soin de remonter ses cheveux, non sans lever les yeux au ciel.

Depuis le début, elle gémissait, essayant de parler entre ses sanglots et ses vomissements, mais elle n'était arrivée qu'à balbutier. Du coup, je n'avais pas plus d'information sur la situation. Je savais juste que j'étais là, dans sa salle de bains et que le reste de la nuit s'annonçait long.

Elle finit enfin par redresser lentement la tête, le visage blême et la bouche pâteuse. Elle haleta, les yeux encore embués et me fit signe de lâcher ses cheveux. Je n'opposais pas de résistance, trop heureux de pouvoir m'écarter, tandis qu'elle essayait lamentablement de leur redonner du volume. Vomir l'avait épuisée et l'effort s'était payé.

Je m'accoudais contre le mur de sa salle de bains, ne la perdant pas de vue. Certes, j'allais passer une nuit blanche plutôt désagréable, mais je ne pouvais pas la laisser seule. J'avais peur qu'elle rechute à nouveau, son état fébrile laissant présager sa désaccoutumance.

Et qui disait désaccoutumance, disait inconscience. Ce qu'elle avait fait ce soir ne lui ressemblait pas. Cela était même aux antipodes de ses principes. De ses envies. Il y avait donc de quoi s'inquiéter doublement.

Elle pivota vers moi, dans un ultime effort qui la fit grimacer. Puis elle me sourit faiblement :

- « Merci, Tom. »

Je lui rendis son sourire, plus crispé.

- « Ce n'est rien, Kerrie. »

Elle hocha lentement la tête, avant de fermer le capot et d'actionner la chasse d'eau. Et tandis qu'un grondement retentit dans toute la pièce, Kerrie s'adossa de l'autre côté de la salle d'eau, entre la baignoire et les toilettes, à l'opposé de moi, les jambes repliées.

Elle prit sa tête entre ses mains en soupirant, celle-ci semblant incapable de tenir seule. Elle était malléable, telle de la pâte à modeler, comme si tous les os de son corps s'étaient dissous, la rendant souple et flexible. Vulnérable.

- « Je... Je ne sais même pas pourquoi j'ai fait ça. » finit-elle par murmurer.

Je ne pus m'empêcher de lâcher un ricanement, qui fut accueilli par un regard noir de sa part. Mais il y avait bien longtemps que ses états d'âme ne m'atteignaient plus, aussi haussais-je les épaules, indifférent.

- « À vrai dire, je ne sais toujours pas non plus. Je ne sais même pas ce qui s'est passé. Heureusement que ma mère a été assez sympathique pour me transmettre le message.

- Quoi ?! J'ai appelé Erica ?

- Eh oui Kerrie. Grâce à toi, j'ai pu échanger quelques mots avec ma mère, que je n'avais pas revue depuis dix jours. Je ne sais pas trop si je dois te remercier ou non.

- Je présume que ça s'est mal passé. »

Je posais mon bras sur le rebord de la baignoire, sans lui répondre. À vrai dire, nous n'avions absolument pas parlé de nous deux, évitant soigneusement d'y faire allusion. Notre seul sujet de conversation s'était orienté sur l'appel imprévisible de Kerrie et ses paroles quelque peu... alarmantes, qui nous avaient semblé beaucoup plus urgentes à régler sur le moment.

Autant dire que la conversation n'avait pas duré longtemps. Qu'elle avait même été froidement expéditive, puisque nous nous étions empressés de tomber d'accord. Et je m'étais donc rapidement retrouvé avec deux problèmes sur les bras.

À portée de main [en longue réécriture...]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant