Villains With The Scabbed Wings

Chapitre 15 : Marilyn

— On va voler des poussins.

Ashley me regardait, déconcertée. Elle n'avait jamais entendu parler de cette folle idée et semblait assez abasourdie, encore en train de digérer l'information.

— Des poussins ? répéta-t-elle en arquant un sourcil.

— C'est une idée de Jeordie, pour le prochain concert, expliquai-je avec hésitation.

— Tu veux balancer des poussins dans le public ? tenta-t-elle de comprendre.

L'idée ne semblait pas vraiment lui plaire, assez réfractaire, et j'allais passer pour un con. Pourtant, j'étais persuadé qu'elle aurait été de la partie.

— On ferait comme la dernière fois. On balancerait—

— J'ai compris, me coupa-t-elle.

Son visage était dur et son regard s'assombrit. Tout ça ne lui plaisait pas, c'en était certain. On s'était éloignés et ça se sentait vraiment malheureusement.

Puis son visage s'illumina et elle se mit à rire à gorge déployée. Elle s'arrêta bien que je ne comprenne toujours pas sa réaction. Elle posa sa main sur mon épaule et me gratifia d'un regard angélique.

— Je te faisais marcher ! Bien sûr que je suis partante ! On va jusqu'au bout de ce qu'on a commencé ! lança-t-elle accompagné d'un clin d'œil.

— Ce n'était pas drôle Ashley, la sermonnai-je gentiment. J'ai vraiment cru que tu flippais !

— C'était ce que je voulais te faire croire ! rit-elle fièrement.

— La prochaine fois réserve ça à Jeordie, histoire de le faire chier un peu.

— Non, rétorqua-t-elle, amusée. C'est plus drôle avec toi. Tu t'énerves facilement.

N'importe qui l'aurait trouvée agaçante, pourtant, je la trouvais très charmante et son rire était irrésistible. En ce moment même, elle n'avait rien à voir avec Hanna. Hanna ne riait jamais à ce point.

— Je vois, fis-je mine d'être frustré.

— Mais ne te vexe pas ! C'était une blague... Enfin, ne le prends pas comme ça.

— Moi aussi je me foutais de ta gueule, répliquai-je d'un air malin.

— Je te déteste ! lâcha-t-elle d'un ton sarcastique.

— À la bonne heure !

Nous descendîmes de la voiture, puis marchâmes l'un à côté de l'autre dans le calme jusqu'à la ferme.

— Comment tu veux attraper des poussins ? s'enquit-elle. Ça va vite ces conneries !

— J'ai un sac et je pensais qu'on les mettrait dedans une fois attrapés, dis-je pour décrire mon plan.

— Les pauvres ! s'exclama-t-elle, horrifiée.

— Ce sont des poussins. Ils en abattent bien plus ici pour rien. Au moins on leur fera écouter de la bonne musique, ça leur fera du bien.

Elle rit de nouveau et posa sa main sur mon épaule. Elle s'en rendit rapidement compte et défit le contact entre nous.

En entrant dans le domaine, on put apercevoir de nombreux poussins, tous endormis. Avec Ashley, nous nous échangeâmes un bref regard lançant le coup de départ. Immédiatement, on tenta chacun d'en prendre un, délicatement, mais celui-ci s'en allait toujours, réveillant les autres. Bien rapidement, ils se mirent à courir de partout et les attraper devint une tâche délicate. À plusieurs reprises, nous nous retrouvâmes au sol, les vêtements recouverts de boue.

Nous nous arrêtâmes subitement lorsque l'on put entendre quelqu'un hurlant. Sûrement le propriétaire. Prenant Ashley par le poignet, je la conduisis jusqu'à la voiture dans l'euphorie de cette étrange expérience peu concluante. Dès que mon regard croisa celui du propriétaire, je m'empressai de démarrer le moteur et de quitter cet endroit. Ashley ne cessait de rire, sûrement le stress et l'excitation.

— En attendant, on n'a pas réussi à en choper un seul ! m'exclamai-je, un peu déçu.

N'ayant aucune réponse de sa part, je me tournai vers elle et aperçus une petite boule jaune dans ses mains. Elle avait réussi à en attraper un ! Je me concentrai de nouveau sur la route, bien qu'ébahi par son exploit.

— Je n'en ai eu qu'un seul et il est trop mignon ! s'extasia-t-elle sur celui-ci en le caressant.

Le poussin semblait assez calme. Peut-être qu'il dormait, à moins qu'il ne s'en fiche.

— On ne peut pas aller bien loin avec un poussin...

— En effet.

— On n'a qu'à le garder ! proposa-t-elle, enjouée. On peut même lui trouver un nom !

— Et comment veux-tu l'appeler ?

— Spooky. C'est mignon, ça lui correspond bien. Il est encore innocent pour l'instant...

Ses mots restèrent dans mon esprit durant de longues secondes. L'innocence ne durait jamais longtemps et j'étais prêt à parier qu'elle aussi avait subi les conséquences de cette perte d'innocence.

— En effet, c'est mignon, marmonnai-je.

Elle continua d'observer cette petite boule jaune, souriante. Elle semblait si insouciante et tellement fragile. Pourtant, je savais qu'elle avait vécu des coups durs dans sa vie. Ce n'était sûrement pas le bon moment pour en parler et il valait mieux détourner dès maintenant le sujet de la conversation.

— Et sinon, tu comptes venir au concert ce samedi ?

— Bien évidemment ! Je suis toujours partante ! Par contre, il va me falloir toutes les informations.

— Je t'enverrai un message, mais on devra se creuser la tête pour remplacer ces poussins, déclarai-je d'un ton sérieux.

— Ne t'en fais pas, on trouvera une idée...

Nous nous échangeâmes un sourire, comme si tout s'était arrangé. Mais pour combien de temps ?