✧ Chapitre 4

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Je me glisse alors, craintive dans les toilettes publiques, la capsule de drogue entre mes mains moites et tremblantes. L'homme dont j'ignore toujours le nom me fixe amèrement devant la porte.
- Fait-le, incite-t-il.
- Je vous en prie...
- FAIT LE ! ET DEPECHE TOI !

Les doigts froids et le cœur battant de panique, j'approche la drogue de mes lèvres.
Je n'ai plus aucune chance, pensais-je.
Je la glisse entre mes lèvres.
- Avale, ordonne-t-il.
Je prend une grande bouffée d'air par le nez, met ma tête en arrière, et à mon plus grand désespoir, avale la capsule. Je la sens descendre dans ma gorge, puis dans mon ventre. Je gémis, bois un peu d'eau.
- C'était difficile ?
- ... Je vais mourrir, chuchotais-je.
- Bien sûr que non. Ça ne craquera pas. Normalement..
Mon dieu. Aidez-moi.
••
Lorsque j'arrive vers la douane, mes membres tremblent et je transpire. Je ne vais jamais y arriver. J'ai de la drogue dans le ventre. Des tas de films défilent dans ma tête. J'ai de la drogue dans le ventre. Cette drogue vaut des milliers d'euros. J'ai tellement peur.
Je passe la douane sans sonner, bien que mon pouls ait accéléré à sa vitesse maximale. Je suis à 25% rassurée.
Néanmoins, j'ai toujours de la drogue dans le ventre. Je ne sais même pas ce que c'est, ce que ça vaut exactement, les effets si ça se déverse dans mon ventre, si des gens seraient capable de me tuer et d'ouvrir mon ventre pour récupérer cette substance que j'ignore totalement.

Je monte dans l'avion qui décolle à dix heures moins cinq, comme prévu. J'ai de la drogue dans le ventre, je ne peux pas arrêter d'y penser. Normal. Ça me stresse. Normal. J'ai peur de mourrir. J'ai peur de mourrir. Bon, écoute, tout va bien se passer, me chuchote faussement ma conscience.
Les deux heures qui suivent sont horribles. Je vais aux toilettes toutes les deux minutes, pour au final ne rien vérifier. Je sens des brulures dans mon ventre, et je sais très bien que c'est mon cerveau qui me joue des tours.
J'arrive à Budapest à midi quinze.

J'arrive dans le grand aéroport de Budapest, et me dépêche de récupérer ma valise. Ça y est. J'y suis. Pas tout à fait saine et sauve mais bon...
J'ai hâte de me débarrasser de la drogue. L'homme m'a dit que celui qui devait la récuperer me trouverait sans que je n'aie besoin de le chercher, j'espère qu'il disait vrai.
Une main se dépose sur mon épaule et me coupe de mes pensées. Je me retourne brusquement.
Un garçon d'une vingtaine d'années, le regard pérçant, la barbe mal rasée, le teint beige hâlé, un long sweet et un bonnet noir écrasant ses cheveux bruns se tient derrière moi, et me regarde droit dans les yeux.
- T'es Joyce ? murmure-t-il.
- Ou.. Oui...
Il me prend par le poignet et me tire dans les toilettes réservées au personnel.
- Tu es sur que on... commençais-je.
- T'inquiete pas, fait-il.
Je l'imaginais différemment. Pas aussi jeune. Il a l'air d'un adolecent, le visage rond, la peau lisse, les lèvres roses, pulpeuses. Ses sourcils sont parfaitement symètriques et il a un piercing à son arcade droite.
- Bon, je peux l'avoir ma drogue ? s'impatiente-t-il en faisant claquer ses lèvres.
Je recommence de trembler. Okey, garde ton calme Joyce.
- Elle est encore dans ton ventre ?! s'étonne-t-il.
Je hoche timmidement la tête.
- Bon va-y, j'ai d'autres trucs à faire.

J'avale ma salive. Je me penche au dessus du lavabo. T'as rien mangé avant ni après tu vas vomir que la capsule, me convainquis-je plusieurs fois.
- C'est gênant, lâchais-je.
Je ne pouvais pas vomir devant ce gars sans gêne.
- Si je sors, j'ai quoi comme garantie que tu ne vas pas la mettre dans les chiottes ? me reproche-t-il.
- Oke, oke...
- T'es majeure au moins ?
- Oui, chuchotais-je.
- Ils t'ont forcé à faire ça ?
- Oui.
- Ils auraient pas du. Désolée si tu es traumatisée.
Merci, je me sens beaucoup mieux maintenant. Ironie.
Brooks. Son nom m'est revenu soudain. Je respire un bon coup, met deux doigts au fond de ma gorge et me force à vomir. Je n'y arrive pas du premier coup, il soupire, impatient. Je dois être vraiment ridicule. Je réessaie une deuxième fois. Je déteste cette sensation, c'est vraiment immonde. Plus jamais. Je parviens à faire ressortir la capsule cette fois.

Ouf. Elle est intacte. Je bois un peu, puis passe la gélule sous l'eau claire. Je la donne à Brooks, il me remercie avant de la mettre délicatement dans une petite boite.
Il m'intimide, je ne sais même pas pourquoi. Il ouvre son porte monnaie et me compte 1'800€ en passant ses longs doigts sur chaque billet, qu'il me tend ensuite.
C'est finit. Je suis en vie.

- Ça va ? demande-t-il. Tu es blanche.
- Je vais bien. Il faut que je m'en aie.

Sans affronter son regard, je pousse la porte des toilettes pour aller prendre un taxi afin de rejoindre mon hôtel, très chamboulée.
- Non, l'entendis-je.
Je me retourne pour de lui faire face.
- Je te racompagne à ton hôtel, annonce-t-il.
- Quoi ?! Non. Je ne vous fait pas confiance, hors de question.
- C'était pas une question. Tu vas me donner le nom de ton hôtel et je vais t'y accompagner en voiture. Je suis garé dehors.
- Pourquoi ?
- Parce que j'en ai envie, et parce que je ne veux pas que tu sois en danger

En espérant qu'il ne me veuille pas du mal. Nous marchons jusqu'au parking, moi traînant ma valise derrière moi, lui jouant avec les clés de sa voiture. Il embarque ma valise dans le coffre de sa Tesla noire, puis me fait monter à côté de lui. Il allume le contact et sort du parking.
- Attache ta ceinture, ordonne-t-il.
Sa voix est tellement stricte que je le fais sans même y réfléchir.
- Sérieusement vous êtes un dealer, je suis dans votre voiture et je ne sais même pas votre nom.
- Si tu le sais, murumure-t-il de sa voix aux intonations profondes en s'engageant sur l'autoroute.
Il ne sait même pas ou il va.
En espérant qu'il ne me veuille pas de mal, répète ma consience.
- Brooks, fis-je. Mais je ne connais pas votre prénom.
Je suis beaucoup trop curieuse, et j'en suis consciente...
Il soupire, les muscles de sa mâchoire se tendent et se détendent.
- T'es dans quel hôtel ? demande-t-il.
- Bohem Art.

Il tourne à gauche, sans prononcer un mot.
- Les gars à l'aéroport n'auront pas du te forcer. Ils sont débutants, pardonnes-les. Mais tant que tu vas bien... C'est ce qui compte.
Je n'arrête pas de jeter des coups d'oeil à l'arrière de la voiture, je ne sais pas pourquoi. Je n'arrête pas de le regarder aussi, il m'intrigue.
- Dites-moi votre prénom, demandai-je.
- Tu es exigeante, dit donc. En fait, je ne le dis jamais.
- Mais moi j'aimerai le savoir. J'aurais peut-être un peu plus confiance.

Il eut un rire moqueur, laisse apparaitre ses dents. Ah tient, il sait sourire. Etonnant.
- En quoi ça va chager les choses ? remarque-t-il.
- J'aimerai le savoir, juste comme ça.
Il soupire, laisse passer quelques secondes, à nouveau, silencieux. Il fait à nouveau déplacer sa mâchoire, passe sa langue sur ses lèvres.
- Je m'appelle Jaidon.

❖ Trapped In Addiction - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant