Sombres Héritages-5

chapitre 13

Sa terreur l'avait conduit dans le seul endroit sur Terre où elle se sentait en sécurité : le cottage hé-rité de sa grand-mère maternel, Rosae Maclachan.

Personne hormis Dante ne savait qu'elle se cachait ici, pratiquement au pied du Càrn Eige, quand les démons de son passé remontaient à la surface.

Elle s'en voulait d'avoir abandonné Drake, pire de l'voir transposer à la place de son Némésis. S'il avait su...Il ne lui aurait sans jamais proposé son aide, ni même de l'aurait regardé comme aucun homme ne l'avait fait jusqu'à maintenant.

Au lieu d'essayer, de lutter contre sa peur, elle s'était enfuie, lâchement. Elle aurait du lui dire qu'elle ne supportait pas d'être portée et touchée ainsi, que cela remontait aux sévices endurés durant son enfance.

Mais elle en avait été incapable. Les mots s'étaient bloqués dans sa gorge, paralysés par les souve-nirs immondes, liés à cette peur impossible à réfréner. Elle s'était une fois de plus fourvoyée en croyant pouvoir guérir.

Harassée par plusieurs heures passées au volant, elle songea qu'il était désormais bien trop tard pour attraper le ferry et rejoindre Callanish. De toute manière, elle aurait été incapable de se concentrer sur son travail.

Elle avait plusieurs nuits sans sommeil à rattraper, seulement pour cela, elle devait prendre les somnifères prescrits par Mark. Sans eux, les cauchemars revenaient la hanter et elle supportait de moins en moins les médicaments. Ils la rendaient si malade que c'était un miracle si elle parvenait à s'extraire de son hamac.

Cela faisait plus de 7 ans qu'elle n'avait dormi dans un lit. Elle n'arrivait pas à fermer l'œil et guettait dans le noir le moment où Eliot viendrait la chercher. Un lit lui rappelait sans cesse cet enfer. Le hamac s'était révélé le seul moyen efficace pour trouver un peu de repos ; Douglas l'avait initié à cette manière de dormir dans leurs premières années passées sur les chantiers de fouilles à l'autre bout du monde.

Grâce à lui, ses nuits n'avaient plus été un moment de crainte. Seulement avec le temps, cette solu-tion commençait à devenir inefficace...Alors, elle prenait des somnifères.

Mark l'avait prévenu : ce n'était qu'en cas de force majeur, car avec ses antécédents, les médica-ments lui faisaient au final plus de mal que de bien.

Elle abandonna sa veste sur le dos du fauteuil au cuir éclairci ici et là à cause des rayons du soleil perçant les fenêtres. Elle n'avait absolument rien changé à la décoration. Tout y était toujours rustique, des imposants meubles en chênes aux différentes teintes de miel, aux rideaux blancs, aux tapis colorés et aux plaids en laine soigneusement pliés sur les chaises.

Ces uniques changements avaient été pour la chambre à coucher et la salle de bain. Le lit avait été remplacé par deux énormes poteaux lui permettant de fixer son hamac, au lieu de la moquette, elle avait posé du parquet. L'entendre craquer dès qu'elle franchissait le pas de la porte de sa chambre était extrêmement rassurant. Ainsi, si quelqu'un entrait dans sa chambre durant son sommeil, elle pouvait immédiatement l'entendre et aviser.

Dans la salle de bain, elle avait fait installer une baignoire îlot traditionnelle en forme de sabot sur pieds. Cela lui permettait de sortir plus facilement de la baignoire juste au cas ou...et aussi pour se détendre après une journée harassante.

Ôtant ses chaussures, elle se traina dans la cuisine, se fit réchauffer une tasse de café et s'appuyant au comptoir regarda le soleil se coucher derrière la cime des pins. Le ciel orangé à l'horizon se mariait parfaitement avec ce paysage magnifique dont elle ne se lassait jamais. Elle resta un moment à attendre que les derniers rayons du soleil disparaissent en sirotant lentement son café au goût exécrable.