Chapitre XIX

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On lui avait coupé les cheveux. C'était un passage obligé en prison. On lui avait rasé le crâne, et étrangement il avait pleuré. Une nouvelle liberté lui était prise, celle de l'apparence. Ronor pleura doucement, et de plus en plus à chaque mèche sur le sol. Il fallait s'échapper, il allait devenir fou ici. On devient fou au milieu des fous, on perd l'esprit, on ne reste pas sain d'esprit. Ce soir allait se dérouler le pire moment de sa vie. Ce soir soit il s'échappait pour recouvrir une liberté partielle et arrachée, ou alors il mourrait sous les balles de ses geôliers qui tenterait de l'arrêter. A peine fermait-il ses paupières qu'il avait cette image d'horreur: lui, mort, des trous rouges sur le torse...Allait-il mourir pour la liberté? On meurt pour moins que ça. Il fixait l'horloge murale qui trônait en maître du temps dans les dortoirs. A vingt-heures, les gardiens se relevaient, changement d'équipe pour la nuit. C'est à ce moment qu'il fallait intervenir. Ils avaient deux minutes, seulement deux. Ruben avait sûrement déjà volé les clés, et agressé le gardien qui les possède. Vingt-heure moins cinq. Ronor demanda au gardien du dortoir s'il pouvait aller aux toilettes. On l'accompagna, le suivant de près. Il pénétra dans le cabinet et attendit. Il n'avait que ça à faire. Brusquement le gardien tomba sur le sol, la tête sur le carrelage, du sang s'échappait de sa bouche. Gustave ouvrit la porte:

-Aller gamin!

-Sortie Sud. Dit Ronor. Il n'y a que deux gardiens lors du changement, car elle est la plus éloignée des dortoirs.

-Bien. Ruben est juste là. On a deux minutes!

Ils se mirent à courir. L'adrénaline monta. Ronor se sentait euphorique et effrayé. Il jouait sa vie. Il courrait, jouant sa vie. Il courait. Son souffle était inexistant, son existence était au pause durant sa course. Il vivrait après, pensa-t-il. Ruben sauta sur les deux gardiens qui étaient devant l'entrée. L'un d'eux hurla et Gustave l'assomma. L'alarme résonna. Ils semaient les gardiens inconscients, l'un d'eux a dû être trouvé. Ronor, qui avait la clé, ouvrit la porte. Ils arrivèrent dehors. Courant. Courant. Courant. A bout de souffle, ils prirent les outils que Gustave avait caché deux jours auparavant et coupèrent les barbelés. Les gardiens et chiens arrivaient vers eux. La transpiration et l'anxiété possédaient le corps entier de Ronor. Ses mains tremblaient. Il n'arrivait pas à couper les barbelés. Gustave venait de finir. Il sortit courant dans la foret voisine. Ruben disparut lui-aussi au milieu de arbre. Ronor utilisa leur passage et courut dans la foret. Les chiens aboyaient, les gardiens tiraient vers eux. Les balles fendaient l'air, touchaient des arbres et se plantaient dans le sol. Ronor ne cessait de courir. Il trébucha, se releva et continua. Ronor sentit une douleur sur son bras, et un liquide chaud coula le long de son poignet. Une balle l'avait atteinte. Il continua à courir. Il ne pouvait pas faire ça éternellement, il devait trouver une cachette. Comme-si le destin était avec lui, il entendit un train au loin. Il suivit le bruit et tomba sur une voie ferrée. Le train arrivait. Les chiens aussi. Ronor courut vers le train. Il ne savait pas s'il allait réussir à monté dessus alors qu'il était en route. Tout à coup il aperçut Gustave. Le prisonnier tendit la main à Ronor pour l'aider à monter. Ronor courra et attrapa la main de Gustave. Le train fila à vive allure. Ronor souffla enfin, et les chiens ne furent qu'un lointain souvenir. Ronor reprit son souffle plus de dix minutes avant de dire:

-Comment tu es monté?

Gustave ria avant de répondre:

-Je suis plus baraqué que toi. Tu as eu de la chance de tomber sur la voie ferrée. Comme moi.

-Et Ruben?

Gustave eut un regard peiné:

-Balle dans le dos. Je pense qu'il est mort. Tu saignes?

Les Seigneurs de Fallaris Tome 2: MonterreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant