Chapitre 15 : gueule de bois

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Un mal de tête atroce, des nausées, j'avais la gueule de bois. En me levant, je risquais presque de tomber. J'aurais bien voulu rester au lit toute la journée, m'enrouler dans les draps et oublier tout ce qui s'était passé. Mais je savais que cela n'était pas une option. Le souvenir de la soirée précédente me hantait, surtout son regard et ses mots : "Tu es belle, Aria." L'alcool m'avait-elle fait halluciner ? Que lui avait-il pris de dire ça ? Ce genre de comportement venant des Allemands n'était pas habituel. Généralement, ils ne nous parlaient pas, sauf pour nous donner des ordres, et surtout, ils ne cherchaient pas à nous connaître comme Hantz l'avait fait.

Alors que je m'habillais, une peur bleue m'envahissait à l'idée de ce qui m'attendait aujourd'hui. Amaury m'avait dit : "Je n'en ai pas fini avec toi, petite traînée." Et Hantz, qui m'avait demandé de faire ses appartement.

En entrant dans la cuisine, je saluais les filles, tentant de cacher mon anxiété derrière un sourire. Je commençais à prendre mes habitudes ici, comme si ce lieu pouvait devenir une seconde maison. Je chargeais le chariot et me dirigeais vers la chambre 118, le cœur battant. Je frappais doucement, mais aucune réponse ne venait. Après trois coups, je décidais d'entrer. À l'intérieur, c'était le chaos. Des verres cassés, des bouteilles entamés, le désordre d'une soirée trop arrosée. Une odeur de cigarette envahissait la pièce.

En nettoyant, j'entendais des bruits dans le couloir, mes mains se mirent à trembler. Je me retournais brusquement, et c'était la personne que j'avais redoutée depuis mon réveil. Il me regardait sans dire un mot, son regard froid et perçant m'intimidait. Puis, dans un geste soudain, une brûlure intense parcourut ma joue droite. Je passais ma langue sur ma lèvre, goûtant le fer de mon sang. Mes mains se portèrent à ma joue enflammée, je le regardais, le cœur battant, craignant qu'il ne recommence.

— Tu sais pourquoi je te frappe ?!

J'étais paralysée, mes yeux fixés sur le sol, le terrorisme au fond de mon être. Une deuxième gifle, plus forte que la première, me fit vaciller.

— Parce que j'ai dansé avec le Lieutenant Van Rosen.

— Exacte, tu aurais dû tenir ta place ! Pour qui te prends-tu ?

— Mais si j'avais refusé ?

Il leva la main à nouveau, mais se ravisa, la colère se mêlant à une hésitation que je n'avais pas perçue auparavant.

— Fini ce que tu as à faire et dégage d'ici.

Mon cœur battait à tout rompre. Fallait-il que je lui parle de la demande de Hantz ? Je décidai de prendre le risque.

— Il m'a demandé de faire ses appartements, je...

— Écoute-moi bien, petite traînée, c'est à moi seul que tu obéis. Tu comprends ? Si tu tiens à ta vie misérable, ne t'avise pas d'obéir aux désirs du Lieutenant Van Rosen.

Je ravalais ma salive, presque en m'étranglant. Il sortit, laissant derrière lui une atmosphère de tension oppressante. Que devais-je faire maintenant ? Je ne pouvais pas me permettre de lui désobéir, sa menace résonnait dans ma tête. Hantz serait peut-être plus clément si je ne faisais pas ce qu'il m'avait demandé.

Après avoir terminé le nettoyage, je sortis pour retourner en bas. Dans le couloir, je tombais nez à nez avec la fille d'hier. Ses cheveux étaient lâchés, elle portait la même robe que la veille.

— Tu es la boniche ? me demanda-t-elle, son ton condescendant.

— Oui.

— Va à la chambre 124, personne n'est passé.

Elle reprit son chemin sans un regard. Elle n'avait pas dû remarquer que c'était moi que Hantz avait pris pour danser. J'avançais donc vers la chambre 124, pensant que c'était ses appartements. Mais, en approchant, je reconnaissais immédiatement la porte. J'étais déjà venue ici. Mon cœur se serra. C'était chez lui. Je portais ma main à ma bouche, la douleur sourde de ma lèvre me rappela brutalement à la réalité. Je décidais de faire demi-tour, mais soudain, la porte s'ouvrit. C'était Hantz.

— Je ne t'attendais plus. me dit-il en s'approchant. Entre.

Je n'avais plus le choix. L'odeur de l'eau de cologne embaumait la pièce, un contraste troublant avec le désordre ambiant.

— Que t'est-il arrivé ? me demanda-t-il en voyant ma lèvre.

— Votre ami, il n'a pas apprécié ce qui s'est passé hier.

— Hier ?

Il devait avoir oublié ce qui s'était passé. Je me sentais déjà fatiguée de l'expliquer.

— Vous m'avez prise pour danser, et apparemment, danser avec une juive aux yeux de tous n'est pas très bien vu.

Il fronça les sourcils en allumant une cigarette. La fumée dansait autour de nous, ajoutant une tension palpable à la situation.

— Je crois que j'ai trop bu hier.

Moi aussi, pensais-je, un sourire amer au coin des lèvres. Si seulement il savait que j'avais bu une demi-bouteille de champagne.

— Et donc, il t'a frappée parce que tu as dansé avec moi ? En même temps, tu n'aurais pas pu refuser.

— C'est ce que j'ai essayé de lui dire, mais il a voulu me frapper de nouveau.

Le silence s'installa, pesant. J'en conclus que la discussion était terminée et entrepris de nettoyer et ranger. Tout en m'activant à la tâche, je sentais son regard sur moi, pesant, observateur. Je m'attaquais au lit, et je remarquais un plateau à côté de la table de nuit, encore plein de restes de son petit déjeuner. Il mangeait comme un ogre, sans même me proposer quelque chose comme la dernière fois.

Dans un coin de la chambre, je remarquai un livre posé sur la table de nuit. Gatsby le magnifique. Je l'avais lu, mais je n'avais pas eu le temps de le finir. Le prenant, je le feuilletai rapidement, les pages jaunies par le temps.

— Tu aimes la lecture ? demanda-t-il en sortant de sa salle de bain, son uniforme impeccable sur lui.

Je le posai furtivement sur la table de nuit, le cœur battant.

— Oui, j'aime énormément lire.

— Quel est ton style de lecture ?

— Un peu comme toutes les filles.

— Romance à l'eau de rose ?

— C'est un peu ça, oui. Mais pas que. J'ai beaucoup apprécié celui-ci. Je n'ai pas eu l'occasion de le finir.

— Gatsby ?

— Oui. Pourquoi vous intéressez-vous à ce que je lis ?

— Prends-le, je te le donne.

Je le regardais, perplexe.

— Je te le donne. Enfin, je te le prête, tu me le rendras quand tu l'auras fini.

Étonnée, je ne pouvais m'empêcher de m'interroger sur ses intentions. Que pouvait-il bien y gagner en me prêtant un livre ?

— À moins que tu ne veuilles pas le finir ?

Bien sûr que j'en avais envie. Je m'étais arrêtée au moment où Jay et Daisy se retrouvaient enfin. La tension dans l'air semblait se dissiper un peu.

— Oui, je veux bien. Merci.

— Bien. Je n'ai pas parlé à Amaury de ton travail ici. Je vais aller lui en parler pour que cette lèvre ne saigne plus.

En feuilletant le livre je me perdis dans mes pensées. J'étais ahurie, complètement choquée par ses intentions envers moi. Qu'est-ce qui l'animait vraiment ? J'avais terminé mon nettoyage. Je priais intérieurement pour qu'il parle de moi en bien, que j'avais bien fait mon travail ici. La dernière fille était morte. Morte parce qu'il s'emportait vite. La peur m'habitait depuis la première fois que je l'avais vu, et je savais que ça ne ferait qu'empirer.


**** Chapitre un peux court. Mais j'écris bientôt la suite. hésitez pas à laisser vos commentaires et ce que vous aimez est ce que vous aimez pas ! Désolé pour les fautes d'orthographe****

Je suis tombée amoureuse de mon ennemi ...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant