Chapitre 7: La vraie course

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Ça matin je suis tout excitée. Enfin, je vais pouvoir aller dans un vrai club, avec une vraie piste, un vrai coach et je vais pouvoir faire une vraie course. Je prends mon legging, ma brassière et mon t-shirt Nike, que j'ai gagnés à une compétition et sors. J'ai repéré le chemin hier et là encore, ce n'est pas très loin.

J'arrive devant un bâtiment blanc, moderne, Club Athlétisme Dakar. À l'accueil, on l'indique la piste n°3. Je vois un grand entraîneur, qui cette fois-ci a un physique de sportif, sifflet au tour du coup et baskets de course. 5 ados sont en train de s'étirer. Je m'avance.
"-Bonjour, je m'appelle Marieme et je viens de France. Je vais passer 3 mois ici et pour ne pas perdre mon niveau et surtout pour pouvoir continuer à courir dans de bonnes conditions, je cherche un club d'athlétisme. On m'a conseillé le votre, je fais du 100m et 200m.
-Bonjour. Ton niveau tu dis? Et quel niveau as-tu exactement ?
-Oui, je suis championne de France de 100 et vice championne de 200.
-Intéressant. 5tours de terrain à 75% de ta VMA."
Je m'exécute, au moins, lui, il ne veut pas me tuer. Je m'étire dès que j'ai fini. Les autres m'attendent sur la piste. On enchaîne les courses. J'en gagne 2 sur 7. 1 a été gagnée par une fille plus petite et plus musclée de nom de Maïmouna, 4 autres par un jeune libanais qui s'appelle Anas et la première par un gars prénommé Lucas. C'est un français qui vit ici depuis 2 ans car ses parents travaillent à l'ambassade. Il a gagné la première course, mais s'est cramé et n'a pas pu gagner les autres. Anas est plus fort que nous, mais il ne peut pas enchaîner les courses. Maïmouna a triomphé sur la 6ème et moi la 4ème et la dernière. Il y a un autre garçon et une fille, Amine et Marie qui sont moins rapides. Évidement, j'ai perdu au 200m. Nous n'avons fait que deux courses gagnées par Lucas. On a fini par des abdos et des squats. J'ai aussi reçu un programme qui consiste à aller courir 2fois par semaine, en dehors des 3jours d'entraînement au club. On a deux jours de repos par semaine, le vendredi et le dimanche. J'ai adoré l'entraînement, je pense que je reviendrai.

***

Ça fait maintenant 2semaines que je cours au CAD. Je pense sérieusement à m'inscrire. Aujourd'hui ils m'ont inscrites à une compétition, à laquelle j'ai dû payer car je n'ai pas de licence. Je suis fin prête. J'ai l'impression que Maïmouna boite un peu mais elle a tenu à faire la course. Je vais d'ailleurs la chercher car elle n'est toujours pas sortie du vestiaire. J'arrive devant la porte quand j'entends.
"-Tu vas courir. Je n'en ai rien à faire que tu aies mal à la cheville. C'est la course de ta vie. Je te rappelle que c'est grâce à moi que tu en es là. Le prix à gagner est important. Ton père est notre financeur, tu ne voudrais pas le décevoir n'est ce pas ? Non? Alors cours.
-D'accord."

J'écarquille les yeux. Maïmouna se fait sermonner par le coach. Il ne peut pas l'obliger à courir. Elle risque de se faire une entorse ou pire, si ce n'est pas déjà fait! Quel genre de coach se préoccupe plus de son intérêt que de la santé de ses athlètes ? En plus, il a été champion du Sénégal dans sa jeunesse et est passé au deux doigts des JO  à cause d'une blessure ! Il paraît qu'il avait un super coach! Quand Maïmouna arrive, je lui demande si ça va. Elle me répond que oui en fuyant mon regard. Bon. On se met en place. Je n'ai pas la tête à courir. Ces deux semaines passées à courir avec des garçons m'ont amenées à me dépasser et à m'endurcir. Ma coéquipière avec qui la lutte est serrée d'habitude est loin derrière. Je gagné aisément. Les garçons et le coach viennent me féliciter. Maïmouna baisse la tête face au regard assassin de l'entraîneur. Sa cheville a enflé. Alors qu'il commence à lui hurler dessus, je m'interpose.

"-Non mais ça va pas! Vous ne voyez pas qu'elle a mal? Tout ça c'est à cause de vous. Vous la forcez à courir. Mais jusqu'à quand? Jusqu'à ce qu'elle se fasse trop mal et qu'elle ne puisse plus jamais faire de sport. Vous êtes fou.
-Pour qui tu te prends. Je ne te garde pas dans l'équipe après aujourd'hui.
-Ah, Assan, tu n'as pas changé. Quand j'étais ton coach, tu n'as pas voulu m'écouter et tu as continuer à courir malgré ta foulure. Et regarde où tu en es. Tu veux infliger la même épreuve à cette jeune fille."
Stupéfaite, je me retourne et aperçoit l'entraîneur ventru chez qui je m'étais rendue la première fois. C'était donc lui, son coach! Je n'ai pas le temps de m'attarder car c'est l'heure de la course de 200m. Je me dépasse, furieuse contre le coach. Je finis en tête, pour une fois. Ce n'est qu'une petite compétition de toute façon. Après la remise des prix, je vais dire au revoir à mes coéquipiers. De toute façon, après ce que j'ai vu, je ne compte pas rester plus longtemps dans ce club. Ils sont surpris et je leur recommande de faire attention à eux. Ils ne comprennent pas mais ne disent rien. Il ne me reste plus qu'à aller présenter mes excuses au père de l'ami de mon oncle. En espérant qu'il les accepte.

"-Bonjour, je suis désolée pour ce que je vous ai dit l'autre fois. J'ai eu tort. Si vous voulez bien accepter mes excuses, je serai ravie que vous soyez mon entraineur. Je baisse la tête et il me regarde longuement.
-Bien. Sache que je n'accepte pas ton comportement, mais ce que tu as dit aujourd'hui a prouvé que tu aimes ton sport. Je te laisse donc une chance. Demain, 16h30 sur la piste, ne sois pas en retard.
-Merci beaucoup."
Finalement, l'apparence n'a rien à voir avec la performance. Ce vieil homme a formé une homme attirant. Pourtant, leur vision de ce magnifique sport est différente. Je suis contente de pouvoir revenir en arrière.


Du Bout des doigtsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant