"C'est ma dernière course. Mes derniers Jeux Olympiques. Car on ne part pas après un meeting, non, il faut tenter le coup une dernière fois, ajouter une médaille, tenter le record, régner sur sa discipline et multiplier les sacres. Alors je partirai après cette compétition. Et après cette course, plus précisément, puisque j'ai réussi à me qualifier pour la finale, à 31 ans."Je transmet le flambeau, ou plutôt le témoin haha, aux jeunes. J'ai vraiment l'impression d'avoir 200 ans en disant cela. Mais c'est la vérité. Je ne les vois plus comme des adversaires. Je sais ce que j'ai fait et ce que j'ai prouvé. Mais maintenant c'est fini. Je n'ai plus rien à apporter à ce sport ni aux gens en tant que coureuse.
"Je laisse mes course et mon expérience. Je n'ai pas peur pour mes records. Ils sont à leur portée. Un record est fait pour être battu de toute façon. Aujourd'hui ou dans 20 ans, peu importe. Je suis fière de ce que j'ai vécu et accompli. Je suis heureuse. Je sais que la vie qui m'attend le sera tout autant. Ce sport m'a comblée. Maintenant, il est temps pour moi de le regarder des tribunes ou de ma télé et de soutenir les pépites qui vont arriver. Et il y en a. A mes cotés, sous les mêmes couleurs que moi et dans les couloirs opposés au mien sous d'autres.
"J'espère que tout ce que j'ai pu expérimenter, montrer, réussir ou échouer lors de mes courses sera utilisé pour développer de 'nouvelles techniques et améliorer ce sport et les performances.
"Je suis fière de voir de plus en plus de spectateurs dans les stades et devant leur télé. Je suis contente de savoir que le nombre de personnes regardant l'athlétisme augmente et qu'il est aimé tout comme le football.
" Je suis redevable à toutes les concurrentes pour m'avoir poussée à me dépasser, à rester fair-play. Ces victoires sont dues à elles aussi en partie. Je remercie tous mes coachs, même si certains ne sont plus de ce monde. Ils m'ont grandie et sont l'engrais qui m'a fait devenir une belle plante. Dans eux je ne suis rien. Mes médailles sont pour eux. Je remercie les équipes médicales, l'INSEP, mes camarades, les marques et sponsors, les médias, malgré quelques fausses rumeurs. Mon succès vient de vous. J'ai une pensée pour ma famille et mes amis qui m'ont encouragée et ma mère qui m'a obligée à passer 3 mois au Sénégal juste avant mon envolée. C'est ce séjour qui m'a transformée. Je leur dois ce que je suis aujourd'hui. Je remercie tous les sportifs qui font briller ce sport de jours en jours. Grâce à eux j'ai appris. Enfin, je suis admirative, redevable et attachée à tous ceux qui m'ont encouragée, qui sont venus me voir, ou pas d'ailleurs, ceux qui sont restés dans les tribunes en salle ou dehors, tous mes "fans", ceux qui me suivent au quotidien, même les haters qui m'ont donné la rage de continuer à me battre. Je vous remercie. Je vous dédis mes titres. Sincèrement, merci, merci, encore et toujours. Merci aussi à ceux que j'ai oublié.
" En attendant il me reste une course que je courrai comme les autres même si elle aura un goût spécial. Elle est pour vous tous. Et c'est sur ce discours barbant et digne d'un politique que je vous laisse, avec toute ma gratitude. "
Des applaudissements retentissent, des sifflements aussi. Les larmes me montent aux yeux, j'adresse un baiser à la foule et quitte l'estrade après cette interview émouvante. Et oui, c'est ma dernière course. Dire que ce sport m'a apporté joie, peines, douleurs, moments inoubliables, de Dakar, à mon club de quartier en passant par la réception à l'Élysée. Je souris, les yeux trempés.
Je me souviens encore de mes début. J'avais 7 ans. J'étais devant ma télé, comme des millions d'autres personnes. 2008, Pékin, Usain Bolt et le nouveau record Olympique. J'étais restée scotchée. Son gabarit m'avait impressionnée et les regards que lui portaient les gens m'avaient remplie d'envie. Il debordait de fierté, lorsqu'il s'est posé près du chrono pour esquisser son fameux geste. C'est à ce moment-là que j'ai su que je voulais être comme lui et que l'athlétisme serait mon sport.
Alors je me suis inscrite dans mon club de quartier, j'ai travaillé, perdu mon surpoids et ai réalisé des chronos. Je me suis toujours battue, sans rien lâcher.
Aujourd'hui j'ai créé mon association qui permet aux jeunes des quartiers défavorisés du monde entier de pratiquer l'athlétisme, mais pas que, le sport de leur souhait en fait. Un stade de ma ville natale, en France, porte mon nom, pour ma plus grande fierté et je m'apprête à pénétrer dans le stade, pour mon ultime course.
J'agite ma main, les doigts collés et la foule reprend mon geste. Dire qu'il est imité aux quatre coins du globe alors que je faisais ça pour me moquer d'Antoine au départ. C'est la dernière fois que je le fais en live. Je ne cours pas le 4×100. Ceci est ma dernière course, un 200 mètres et je viens de l'annoncer aux médias.
Je me souviens encore de ma première course. Il n'y avait presque pas du supporters, juste quelques parents transis de froid qui regardaient d'un oeil distrait leurs gamins. Les disciplines étaient mélangées et il n'y avait pas de sprint. C'est mon aversion pour le demi-fond qui m'a fait réalisé que j'étais faite pour le sprint.
Aujourd'hui tout est différent. Les tribunes sont bondées. Mon mari qui a pris sa retraite trois ans avant est dans les tribunes, avec ma fille. Les gens me connaissent et les caméras filment. Je suis connue mais c'est ma dernière course.
Pars en beauté alors, reste inoubliable.
Mes pieds dans les starts, qui semblent taillés sur mesure, je respire un grand coup. Je ne pleurerai pas. J'attends le coup de feu. Nous sommes en place... Prêtes.... Le coup retentit et je m'élance. Vous avez compris que le départ détermine presque toujours l'issue de la course. Les années d'entrainement ont servi, mon départ est presque parfait...
"Donnez vous le moyens de réaliser ce qui vous plaît, ce qui vous rend heureux et ce que vous voulez accomplir. Donnez vous les moyens d'être le meilleur et de réussir. Il ne tient qu'à vous de vous créer votre avenir. N'en déplaise aux autres ou aux standards."
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Du Bout des doigts
General FictionMarieme est une jeune ado qui ne vit que pour le sprint, pourtant, sa mère l'oblige à vivre pendant 3mois au Sénégal, son pays natal, pour qu'elle apprenne ce qu'est la vraie vie....