Comme d'habitude, elle disposa l'assiette sur le plateau-repas ainsi qu'un verre de jus d'orange. Elle était passée a son restaurant mais elle n'avait pu continuer à travailler, trop inquiète qu'elle était du bien-être et de la sante de son beau-frère. En plus d'être devenu muet, il avait perdu l'appétit et s'était renfermé sur lui-même, évitant le plus possible la famille qui faisait tout pour le mettre à l'aise et le faire accepter sa situation de la meilleure manière possible. Mais il les ignorait. Il avait même mis de la distance entre Brandon et lui, et ce dernier était désolé de cette situation. Ian avait perdu toute joie de vivre. Et sa femme, Soraya, ne faisait rien pour arranger les choses, bien au contraire. Soit elle évitait son mari, soit elle se rendait dans sa chambre pour l'accabler de reproches et de paroles blessantes.
Cela faisait maintenant 2 semaines, presque trois qu'il ne parlait pas et se nourrissait a peine. Il avait les joues creuses, ombrées d'une barbe de 6 jours, et le regard vide...mort mais aujourd'hui, Sorya était bien décidée à le sortir de son inactivité.
D'un pas décidé, elle gagna l'étage avec son plateau en mains. Sans prendre la peine de frapper, elle ouvrit la porte d'une main, le plateau cale contre sa hanche. La chambre était plongée dans la pénombre mais la jeune femme sut se repérer. Elle posa son fardeau sur le bureau et s'approcha des fenêtres. D'un coup sec, elle tira sur les rideaux pour faire entrer les rayons du soleil dans la pièce, et un grognement sonore accueillit son geste. Assis sur son lit, Ian fronça les sourcils et plissa les yeux sous l'intensité de la lumière. Il semblait... grognon, et Sorya s'en réjouit car c'était mieux que l'indifférence qu'il offrait a tout le monde depuis un certain temps.
- Bonsoir Ian. Il fait beau n'est-ce pas ? tu devrais faire un tour dans le jardin pour le constater par toi-même.
En parlant, elle s'était approchée du lit et avait déposé le plateau sur les genoux d'Ian qui la regardait d'un air mauvais. Sans se départir de son assurance, Sorya prit la fourchette et piqua dans une boulette de viande qu'elle dirigea vers la bouche du patient récalcitrant. Ian détourna la tête. Elle réessaya, il repoussa sa main. Elle répéta son geste encore une fois et il poussa sa main faisant voler la fourchette à travers la pièce.
- Ian, il faut que tu manges !s'emporta-t-elle. Tu dépéris petit à petit. Je n'aime pas te voir ainsi, personne n'aime te voir dans cet état ! tu te refermes sur toi-même, tu te laisses aller...tout le monde prie pour toi, souhaite ton rétablissement. T'isoler ne t'apporteras rien de bon.
Perdue dans sa tirade, elle n'avait pas remarqué l'expression furieuse qui avait soudainement animé le visage d'Ian dont le torse se soulevait de plus en plus vite. Sorya sursauta et étouffa un cri lorsque, du bras, Ian envoya au sol le plateau-repas qui valsa à travers la chambre avant de s'écraser contre le mur, renversant la nourriture de l'assiette et salissant par la même occasion le sol.
- Arrête de me faire la morale ! je ne suis pas un petit garçon à qui tu dois passer des ordres ! mais qu'est-ce que vous avez tous avec vos discours pourris !? hurla-t-il. Je ne vous ai jamais demandé de vos occuper de moi et encore moins de vous faire du souci pour moi !
La surprise de Sorya se mua peu à peu en colère. Elle avait préparé ce diner avec tout le soin et la tendresse dont elle était capable et il l'avait jeté au sol ? Juste comme ça ? Trop. C'était trop !
- Qu'est-ce qui te prends enfin ! tu te fous de ce que nous ressentons ? tu ne te rends pas compte qu'on se fait tous du souci pour toi parce qu'on t'aime idiot !? tu te fais du mal, et tu nous fais du mal à nous aussi !
- Je ne vous ai rien demandé. Rien ! juste que vous me foutez la paix et que vous me laissez seul ! seul ! tu comprends la définition de ce mot au moins ?
- La solitude ne fera qu'empirer les choses Ian. Tu ne vas pas aller mieux, ça te fais du mal. Et moi je suis là, je t'aide de mon mieux. Pourquoi refuses-tu...
- Tu n'as rien de mieux à faire de ton temps ? t'es complètement bouchée ma parole !...mais le manque de sexe y est peut-être pour quelque chose ajouta-t-il méchamment après quelques secondes. Ca fait quoi...deux semaines ? 4 mois ? un an que t'as pas baisé ? peut-être qu'en te mettant un doigt ou deux là où j'pense tu verras le monde avec des yeux autres que ceux d'une femme mal baisée et...
L'écho de la gifle se répercuta contre les murs de la pièce et résonna aux oreilles de Sorya qui venait d'abattre sa main sur la joue de son beau-frère. Choquée par son geste, mais satisfaite quand même, Sorya regarda sa main qui tremblait légèrement.
- Je...je suis désolée.
- Espèce d'hypocrite ! sale chienne ! tu...
Le souffle d'Ian lui manqua lorsque la main de Sorya s'abattit une seconde fois sur son autre joue, sans trembler cette fois. Ses cheveux trop longs lui tombèrent dans les yeux alors que, tremblant, la main sur la joue agressée, il tournait lentement la tête pour regarder Sorya qui le fixa sans ciller. Il laissa retomber sa main et battit des cils, sentant la brûlure provoquée par les larmes qui s'amenaient déjà. Seigneur il était devenu une vraie gonzesse ! Toujours à chialer ! Il se passa lentement les mains sur le visage et inspira profondément. Ses joues le piquaient.
- Ian, reprit doucement la voix de Sorya, ne me repousse pas, ne me garde pas à l'écart de tes pensées. Je suis ta belle-sœur, ton amie. Je suis là pour t'aider de mon mieux. Confie-toi a moi.
Le regard qu'Ian lui lança lui fendit le cœur.
- Je n'ai plus rien à dire Sorya murmura-t-il. Je ne ferais que m'apitoyer sur mon sort et je ne souhaite pas t'infliger ça.
Il baissa la tête et se mit à jouer avec ses doigts.
- Hé dit-elle en lui soulevant le menton. Je suis là pour ça...je sus la pour toi.
Ian lui prit la main et lui embrassa les doigts avec ferveur.
- Pardonne-moi...je ne pensais pas toutes les choses que je t'ai dites. Je ne voulais pas te manquer de respect c'est juste...
- Chuuuuut souffla-t-elle en lui caressant la joue. Tu n'étais pas toi-même. Tu n'as rien à te faire pardonner... Ian, t'isoler ne servira à rien. Au contraire, cela ne fera que retarder ta guérison et amener de sombres pensées.
- Ma guérison ? de quelle guérison tu parles ? je ne vais plus jamais remarcher !
- Le docteur a dit...
- Le docteur se trompe ! j'ai essayé de me mettre debout mais je n'ai pas pu. Mes jambes refusent de me porter !
- Mais ce n'est pas en restant inactif et enfermé chaque jour que tu vas pouvoir marcher Ian. Tu dois sortir, voir du monde, respirer de l'air frais.
- Je suis très bien ici marmonna-t-il buté.
- Tu sais bien que c'est faux...écoute, j'ai une idée. étant ton amie et belle-sœur la plus dévouée, je compte t'aider à te remettre sur pieds.
- Et comment ?
- Eh bien, en commençant par les exercices recommandés par le docteur...et après, on verra.
Ian esquissa un triste sourire.
- Je te remercie de t'occuper de moi comme ça Sorya.
- Mais de rien. Tu pourras toujours compter sur moi Ian.
Il sourit puis sursauta lorsqu'elle repoussa brusquement la couverture.
- Qu'est-ce que tu fais ?demanda-t-il anxieux en la regardant se lever et soulever doucement son pied.
- On commence avec les exercices aujourd'hui.
- Sorya je...
- Je ne veux rien entendre Ian l'interrompit-elle en pliant lentement sa jambe jusqu'à son torse, et en la dépliant tout aussi lentement.
Elle répéta ce mouvement sans se fatiguer, sans se douter que les yeux d'Ian restaient braqués sur elle, sans se détourner.
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La famille Freizer
RomanceFaire partie d'une richissime famille c'est bien; être entouré de gens aimants dans une maison familiale c'est également bien; mais découvrir que chacun à sa part de noirceur et de secrets peu provoquer une envie de fuir une famille trop envahissant...