La nuit tombait avec langueur sur la cité, qui se parait de ses lumières étincelantes. Depuis la fenêtre de sa chambre, Link observait l'activité se ralentir, chacun rentrant chez soi.
Il avait probablement passé la meilleure journée de sa vie. Une des meilleures, au moins.
L'appréhension était toujours là, logée quelque part dans un creux de lui-même. Qu'allait-il se passer à présent ? Ah, ça, c'était une question qui ne trouverait pas de réponse immédiate. Link songeait à ces plantes, ces fleurs, sans cesse soumises aux lois de la pluie, de la neige, du vent ; il se sentait comme ces plantes, aujourd'hui.
Mais quand avait-il commencé à être moins vulnérable ? Un frémissement parcourut sa mâchoire. Ce n'est pas parce qu'on est porté par un courant guerrier qu'on est plus fort. Au fond, il n'avait jamais cessé d'être un hylien. Et cela lui allait très bien ainsi.
Son cœur battait encore d'un rythme motivé par la pensée de Zelda. Ses lèvres douces, ses mains tièdes, son sourire espiègle, ses murmures à son intention. Son parfum subtil et délicat, dont il n'arrivait plus à se défaire. Comme... Une sorte de cocon. Tout doux, tout chaud, tout bien.
Cette nouvelle relation était une soie fragile, un tissu qui attendait de broder un nouveau motif, qui nécessitait patience et délicatesse. Un cap à franchir.
Les deux élèves avaient pris tranquillement le chemin du retour dans un silence inhabituel, sans se trahir. Parfois, il n'y a pas besoin de mots pour entrer en communion avec l'autre. Dans ce silence ému, Link avait à peine osé effleurer le bras de Zelda. Leurs doigts avaient été si proches, appelant au toucher.
Cela faisait une bonne heure maintenant qu'il tentait désespérément de se concentrer sur ses derniers cours. En vain. Les mots, les concepts glissaient dans sa tête comme de l'eau sur l'étrave d'un bateau. Il avait l'impression d'être face à un mur glissant, récalcitrant, ou à une porte fermée...
... Porte que quelqu'un frappa, l'arrachant à sa frustration. Link s'empressa d'aller y répondre, curieux de cette interruption.
Le battant s'ouvrit... sur Zelda.
Ses cours pouvaient tout aussi bien tomber en poussière.
Son cœur recommença ses acrobaties dans sa poitrine. Un vrai singe farceur, à présent qu'il avait été libéré.
« Je peux entrer ? s'enquit la jeune femme, les mains jointes dans son dos et le corps légèrement penché en avant, comme un enfant demanderait une faveur.
— Bien sûr. »
Il s'écarta pour la laisser passer. Elle jeta un regard circulaire à la pièce, comme si elle n'y était jamais venue. A nouveau, il perçut cette timidité en elle. D'aussi loin que remontaient ses souvenirs, il ne l'avait jamais ressentie.
« Je crois qu'il faut qu'on parle, Link.
— A propos de ce qu'il s'est passé ? s'enquit-il, un nœud dans l'estomac.
— Oui. Ne t'inquiète pas, je... Je ne retire rien du tout. » le nœud se dissipa avec le soulagement. « Ce que j'ai dit, et fait... Était en toute conscience. » elle repoussa une poussière du bout du pied. « Mais je préférerais que personne ne sache, pour l'instant. J'ai besoin... De temps, pour m'y faire, tu comprends ? »
Link acquiesça. Lui aussi aurait besoin de temps pour s'adapter à cette nouvelle relation.
« Je comprends.
— Je... je me suis rarement sentie aussi chamboulée. »
Elle se mordit la lèvre. Surpris, il haussa les sourcils. Zelda n'avait pas pour habitude d'exprimer ce qu'elle ressentait. Il fallait qu'elle lui accorde une confiance absolue pour confier ce qu'elle avait sur le cœur. Il répondit :
« Tu n'as pas à avoir peur. » elle détourna les yeux vers le mur en face d'elle. « Si tu savais à quel point je me sentais gauche, et stressé, tout à l'heure... Je devais vraiment avoir l'air niais », ajouta-t-il dans un sourire crispé.
La jeune femme reporta son attention vers lui.
« Tu n'es pas niais du tout, Link. »
Ce fut à son tour de détourner le regard. Il se sentait déstabilisé par l'intensité de ses mots, par la vibrance de ses yeux. Il l'entendit s'approcher, puis poser une main ferme sur son épaule.
« Ce que tu as fait, je n'en aurais pas eu le courage, admit-elle. Et je me demande qui se serait lancé de cette façon. C'était ta manière à toi de le faire. Je suis fière que mon meilleur ami... et compagnon... soit une personne comme toi. »
Link se sentit rougir à l'évocation de ce tout nouveau terme. Compagnon. Cette porte vers une relation nouvelle, vers une nouvelle approche des événements à venir. Il remonta son regard sur ses genoux, sa poitrine, son cou, jusqu'à l'infini bleuté de ses yeux.
« Merci. »
Il recouvrit la main qui tenait son épaule de la sienne. Il ne savait pas quoi dire d'autre. Les mots semblaient glisser traitreusement jusqu'au fond de sa gorge, pour être aspirés dans le néant.
Mais Zelda n''avait pas besoin de plus. Elle s'approcha de lui et nicha sa tête dans le creux de son cou, ramenant ses bras autour de ses omoplates. Ses cheveux lui chatouillèrent le menton. Il songea avec amusement aux pissenlits qu'elle lui mettait dans le nez pour qu'il souffle dessus, quand le printemps venait. C'était la même douceur, la même volupté.
Soudain, un gargouillis sonore brisa le silence de leur étreinte. Zelda redressa la tête et sourit d'un air espiègle.
« Je crois que ton estomac essaie de communiquer. Ou c'est toi qui communiques à travers ton estomac, releva-t-elle en souriant de toutes ses dents.
— Mais je ne te permets pas de te moquer, se récria-t-il d'un air faussement vexé. Puisque c'est comme ça... le dernier qui arrive au self doit dire à Hergo à quel point il est beau, subtil et poétique !
— Hein ? »
Mais Link se dégagea rapidement d'elle, ouvrit la porte à la volée et déboula dans le couloir sans demander son reste. L'espace d'un instant, la jeune femme ne réagit pas.
Un court instant seulement.
« Oh ! Tu vas le regretter ! C'est moi qui vais gagner ! »
Et Zelda le suivit en courant, riant de bon cœur.
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Jusqu'aux étoiles
FanfictionEt si l'histoire de Skyward Sword n'était pas encore terminée ... Loin de là ? Fiction accessible aux non-initiés ;) Célesbourg, ville paisible et berceau des hyliens, protégés de la Déesse Hylia, est descendue du ciel dans lequel elle flottait depu...