Danse de Nuit

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Au milieu de la nuit, alors que les étoiles se faisaient plus vives et le ciel plus obscur, le célestrier atterrit à la frontière nord de la forêt de Firone. Le Vallon du Sceau était loin au sud. Le royaume du Levant ne s'étendait pas jusque là, mais ils avaient encore du chemin à parcourir. 

Une fois à terre, Link remercia son fidèle compagnon d'une caresse sur le cou. Le lien qu'il partageait avec lui était aussi un puissant lien de cœur, mais d'une nature différente. Il n'y avait pas de mots ; juste des sensations, des idées. Un lien à l'égard duquel Zelda s'était d'ailleurs souvent montrée jalouse...

Il aida la jeune femme à descendre en lui tendant une main.

« Si ma dame veut bien mettre pied à terre, dit-il dans une révérence exagérée.

— Mais avec plaisir, mon seigneur. »

Elle se laissa glisser sur l'encolure du célestrier et atterrit galamment sur ses deux pieds. Elle était si belle. Ses yeux étincelaient dans le clair-obscur.

Elle tournoya sur elle-même et Link fut entraîné par son mouvement. D'une douce torsion de bras, elle le rapprocha d'elle. Lui saisit son autre bras et, alors qu'ils étaient sur le point de se rejoindre, les firent s'éloigner de nouveau. Ils entamèrent ainsi une valse fluide et souple, en accord avec l'autre, tantôt s'approchant, tantôt s'éloignant, tournoyant au milieu de la prairie calme et tranquille, sous l'œil rond et plein de la lune.

« Cet endroit est magique, chuchota Zelda en interrompant leur danse, le regard porté vers l'horizon. Tu ne trouves pas ?

— Si, souffla-t-il, un bras entourant sa hanche. C'est la pleine lune, ce soir... (il leva les yeux et observa pensivement l'astre). On devrait se reposer à couvert. Nous sommes à la limite de la frontière, après tout.

— Oui. Ton célestrier l'a déjà compris, d'ailleurs ! »

L'oiseau tentait de se frayer un chemin parmi la fronde des arbres, gêné par les branches basses et les myriades de feuilles.

Link sourit et lui transmit une image de calme et de repos ; le feuillage des arbres, vu d'en-dessous, comme quand on s'allonge et qu'on porte le regard devant soi. J'ai confiance en toi, indiqua-t-il sans trop savoir si son compagnon le comprendrait.

Cela sembla l'apaiser, toutefois. Il avança avec plus de calme et d'assurance.

A ses côtés, Zelda se pressa un peu plus contre lui. Link croisa son regard et posa sa tête contre la sienne, le cœur en paix.


                                 ***


Link s'éveilla en même temps que le jour. Les nuages dans le ciel naissant lui évoquait des traînées de lait dans un milk-shake à la fraise. Il ramena ses mains sous sa nuque et se laissa bercer par l'instant. Le Levant n'existait plus... Ils rentraient tranquillement à Célesbourg... Ils n'étaient pas en danger... Tout allait bien.

Enfin, si on exceptait les gargouillis de l'estomac réclamant son dû.

Ça, c'était un autre problème... S'il avait fallu deux jours à Zelda pour rallier le Vallon du Sceau à Célesbourg, combien en faudrait-il du Levant jusqu'à leur ville natale ?

Ah, mais il ne fallait pas croire que Link était parti du Château sans précautions.

Link ne partait jamais sans une promesse d'estomac plein.

Pendant sa conversation avec Églantine, la jeune noble du banquet, il en avait profité pour subtiliser quelques toasts au miel. Il fallait dire qu'il leur faisait de l'œil, ceux-là. Comme le miel était particulièrement gluant, il lui avait suffi de coller plusieurs tranches les unes aux autres, face miel contre pain, et le tour était joué.

Jusqu'aux étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant