Escortée jusqu'à la grande salle, Isadora serra ses mains contre son ventre, le cœur battant. L'épreuve d'hier lui semblait être la plus facile, car aujourd'hui, le palais était vide, du moins il n'avait pas la même résonance que la veille.
Soudain l'envie d'étrangler sa sœur lui monta à l'esprit au moment de franchir le seuil du salon.
Il était assis, les traits figés comme hier, sauf que cette fois-ci, il était rivé sur son téléphone. L'air grave.
Avait-il découvert la supercherie.
— Bonjour votre altesse.
D'un geste de la main, sans se daigner à la regarder, il lui ordonna de s'asseoir.
Le côté réservé de sa personnalité, de ses convictions et de ses méfiances à l'égard des hommes eurent raison d'elle.
Isadora n'avait pas la moindre envie de se faire passer pour sa sœur.
De moins pas maintenant. Elle laissa tomber sur sa chaise sans un mot.
— Avez-vous bien dormi ? Demanda Jafar en lisant les commentaires de la presse étrangère sur son mariage.
Des commentaires affligeants.
— Assez et vous ?
Il fit l'effort de regarder sa femme. Qui encore, malgré le geste qu'il venait de faire pour le pays résonnait déjà comme une erreur.
Surpris par le teint pâle de son menton, Jafar releva complément la tête.
Il fut surpris de voir que sans artifices, Isabelle Smith pouvait se montrer infiniment séduisante. Ses yeux en amandes n'avaient ni retouche, ni exagération. Ils étaient d'un vert émeraude profond, son petit nez en trompette était difficilement reconnaissable. Quant à sa bouche...il préféra inspirer que de s'imaginer la toucher. Trop d'hommes avaient posé leurs bouches sur la sienne. Il suffisait de regarder les photos sur internet pour en avoir la preuve.
— J'aurai aimé dormir davantage, mais hélas j'ai dû affronter quelques soucis.
Ses yeux d'une beauté qu'il ne put ignorer se plantèrent dans les siens.
— Lesquelles votre Altesse ? Je peux...
— .....m'aider ? Hasarda Jafar avec mépris. En effet vous allez pouvoir m'aider puisque vous êtes le souci principal.
Ses lèvres tremblèrent légèrement. De fureur ? De peur ? Jafar ne sut le déterminer.
— J'ai conscience d'avoir un passé fâcheux mais il serait peut-être temps de tourner la page non ?
Devant cet affront, Jafar préféra sourire.
— Alors commencez déjà par demander au monde de le faire.
Il lui tendit son téléphone.
Isadora effleura ses doigts. Un fourmillement monta jusqu'à son cou. Elle avala douloureusement sa salive quand elle commença à lire les commentaires venus de son propre pays, sur l'union de sa sœur et du roi.
Les commentaires étaient absolument ignobles, mais reflétaient la réalité.
Elle préféra lui redonner son téléphone avant d'avoir la nausée.
— Dites-moi ce que je dois faire pour vous aider.
Ses yeux opaques la firent frissonner. Pendant un moment, Isadora se demandait si sa sœur aurait pu réagir aussi calmement qu'elle. Peut-être devait-elle utiliser ces deux jours sous le nom de sa sœur pour redorer l'image d'Isabelle afin que le roi ne regrette pas son choix.
— Pour l'instant rien, mais cette après-midi vous m'accompagnerez à la réunion prévue.
La réunion avec les commanditaires. Isadora en avait eu vent par son père. Il fallait à tout prix qu'elle révise les dossiers laissés par son père.
— Très bien.
Il se leva, la dominant de toute sa hauteur affolante. Elle baissa les yeux sur les dattes disposées dans son assiette.
Son parfum épicé et viril emplissait la pièce.
— Isabelle. Ne me faites pas honte. Sinon je risque de faire annuler le mariage aussi vite qu'il n'a été prononcé.
Elle pâlit.
Quand elle tourna la tête vers lui, Isadora dut affronter son regard menaçant.
— Jamais je n'oserais, j'aurais trop peur de mourir.
Elle se serait attendue à ce qu'il éclate de rire devant l'ironie de sa phrase, mais au lieu de ça, il plissa des yeux, visiblement curieux.
— Je ne tue pas les femmes. Même si vous mériteriez une bonne punition pour avoir sali votre vertu.
Au bord de la crise de panique, Isadora préféra se terrer dans le silence. Comment pouvait-elle défendre l'indéfendable ?
— Soyez sans crainte votre altesse, je ferais preuve d'une grande bienveillance.
Il la dévisagea profondément puis sans un mot quitta le grand salon oriental.
Lorsqu'elle se retrouva seule, elle avala un déjeuner peu consistant et courut jusqu'à sa chambre en manquant de tomber sur les dalles.
La réunion était la seule chose qui pourrait sans doute sauver l'honneur de sa sœur. Isadora s'empara des dossiers et les consulta un à un.
Elle sursauta quand son téléphone sonna. Le gros dossier tomba à terre, laissant les feuilles s'éparpiller sur le sol. Elle se précipita vers son téléphone et décrocha.
— Allo ?
— Ma petite chérie mais où es-tu ?
Quand la voix de son père résonna à son oreille, Isadora se figea.
— Papa ! Oh...je suis partie en vacances.
— Quoi ? En vacances ? Je ne t'ai pas vu une seule fois au mariage de ta sœur. Isadora pourquoi es-tu partie ?
Elle se pinça les lèvres nerveusement.
— J'avais besoin de me reposer papa, ne t'en fait pas. Dans deux ou trois jours je suis de retour.
— Je n'aime pas te savoir loin de moi. Tu m'en veux pour le mariage de ta sœur ?
Isadora se redressa.
— Non ! Enfin pourquoi tu dis ça ? Pourquoi devrais-je t'en vouloir ?
Son père inspira assez fort pour qu'elle sente qu'il était nerveux.
— Je l'ignore, je ne t'ai pratiquement pas vu au mariage et tu disparais.
Comment pouvait-elle lui dire la vérité.
— Ce n'était pas dirigé contre toi papa, c'est juste que j'avais besoin de penser à moi. Murmura Isadora en ramassant les feuilles.
— Je sais. Je t'ai délaissé...je suis désolée mon ange mais tu n'imagines pas à quel point cela a été très difficile pour moi ces derniers jours. Si jamais Isabelle saccage ce mariage nous sommes perdus.
Isadora resta muette. Elle savait à présent ce que ce mariage représenté et c'est bien pour ça qu'elle devait impérativement connaitre ce fichu dossier sur le bout des ongles.
— Je sais et je suis certaine qu'elle va s'en sortir papa.
— Que dieu t'entende mon enfant !
— Je reviens dans quelques jours papa je te le promets. Je t'aime.
Isadora raccrocha et déjà, elle sentait la situation lui échapper.
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La Mystérieuse épouse du cheikh
Romance" Ce n'est l'affaire que deux ou trois jours " À ces mots, Isadora accepte avec appréhension de remplacer sa soeur jumelle le jour de son mariage avec le roi Jafar Al Zorah. Mais quand l'échéance de ces deux jours prend fin, Isadora sent la situatio...