Chapitre 21

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Isadora jugula au mieux sa panique après que ses mots soient sortis de sa bouche plus vite qu'elle ne l'aurait voulu. Elle leva la tête, forcée de constater que tous avaient les yeux braqués sur elle, et que l'intéressé était figé, le regard braqué dans sa direction. Isadora tourna lentement sa tête vers lui et sur le reste de la table.

— Enfin je supposais. Dit-elle d'un ton détaché.

Les yeux de Jafar étaient toujours braqués sur elle, chargés d'intrigues.

— Vous supposez que j'aime le chocolat noir ? Et non le blanc ? Questionna-t-il enfin en l'observant avec insistance.

— Et bien oui, mais peut-être que je me trompe.

Son cœur fit une embardé quand il se pencha mains jointes vers elle.

— Et bien non, mais ce qui me trouble c'est l'étrange façon avec laquelle vous avez émis votre point de vu.

Isadora ne le lâcha pas du regard. Si jamais elle baissait les yeux s'en était fini pour elle.

— Mon père est un amateur de chocolat suisse, il n'aime que ceux au chocolat noirs, cela m'a paru tellement évident qu'un homme de caractère tel que vous puisse aimer les noirs.

Bravo Isadora ! Se maugréa-t-elle intérieurement en voyant dans ses yeux une lueur d'amusement.

Sa théorie fonctionnait, mais il ne semblait pas totalement convaincu de ses dires abracadabrantesques.

Elle s'humecta les lèvres nerveusement alors qu'il reprit sa place en indiquant enfin son choix à la jeune fille.

Le chocolat noir triompha laissant Isabelle sur la touche.

— Bravo Isadora, je dois admettre que vous êtes...

Jafar s'arrêta dans son compliment quand sa femme posa sa main sur sa cuisse. Laquelle des deux méritaient son attention ?

Jafar n'eut d'autre chose que de poser sa main sur celle d'Isabelle afin de lui ordonner d'arrêter. Il avait très vite compris qu'elle était piquée par l'intervention de sa sœur.

— S'il te plaît Isabelle. Murmura-t-il en serrant sa main. Arrête, ne m'oblige pas à me mettre en colère ici.

Isadora n'avait pas pu s'empêcher de tendre l'oreille. Pourquoi Isabelle cherchait tant à se faire voir de lui ? Par jalousie ? Depuis sa tendre enfance déjà, elle s'amusait à cacher ses jouets quand elle ne retrouvait pas les siens.

Peinée d'être toujours celle qui doit rester l'ombre, Isadora se leva en prétextant dans ton son appel, un détour aux toilettes. Les mains moites, elle se dirigea vers les toilettes du restaurant et s'enferma dans une cabine. Le cœur serré, elle s'efforça de refouler ses larmes en sachant que dans peu de temps sa sœur allait la rejoindre.

Quand le cliquetis de ses talons se fit entendre, Isadora déverrouilla la cabine et en sortit le menton levé.

— Je peux savoir à quoi tu joues ? Demanda-t-elle en croisant les bras.

— À rien du tout.

— Oh je t'en prie ! Pourquoi tu es ici Isadora ? Explosa sa sœur rouge de colère.

Isadora se dirigea vers les lavabos en haussant négligemment des épaules.

— Parce que j'ai été invité et que je ne me voyais pas contredire ton mari.

— Oh et tu t'es dit pourquoi pas venir jouer avec le feu au milieu de Baraht ? Dit Isabelle sur un ton méprisant.

Isadora la foudroya du regard.

— Je te rappelle que c'est toi qui as tout fait pour que cette situation en devienne ainsi Isabelle. Rétorqua-t-elle en allant s'essuyer les mains. Tout ça pour aller t'amuser sur un yacht en compagnie d'un homme inconnu et surtout, tu t'es fait passer pour moi !

— Tu as intérêt de tenir ta langue ! Si jamais Jafar venait à apprendre la vérité je n'hésiterai pas à mentir.

Isadora blêmit en la dévisageant.

— Tu serais prête à me sacrifier ? Moi ta sœur ?

Isabelle baissa les yeux avec un jeu de menton.

— Et bien oui.

Isadora déglutit avec l'impression qu'on venait de lui donner un coup de poignard.

— Tu me fais honte Isabelle. Déclara-t-elle en grimaçant amèrement. Tu n'es qu'une petite peste qui mérite malheur et pauvreté.

Elle éclata de rire puis s'approcha d'elle en venant se pencher près de son oreille.

— Mais en attendant, Jafar est mon mari et il ne t'a même pas reconnu ce qui veut dire que tu ne l'as pas autant touché que tu l'espérés. Chuchota-t-elle avec un petit gloussement.

Sous le choc, Isadora la regarda partir fièrement des toilettes. Elle l'impression d'avoir reçu une douche glacée.

Comme un automate, elle quitta les toilettes et emprunta la direction opposée du banquet. Une fois à l'extérieur du restaurant, elle s'engagea vers la rue étroite de la ville sans trop savoir où cette destination allait la mener. Elle retira ses chaussures et traversa la ruelle en petite foulée, la rage au ventre. Elle se retint de pleurer quant au bout de quelques minutes, elle se retrouva sur la route qui menait au palais. La grande ville de Baraht n'était plus qu'un minuscule paysage en toile de fond. Elle ouvrit son sac tout en marchant et but une gorgée dans sa bouteille d'eau. Au bout d'un temps infini, Isadora commençait à se rendre compte que son plan de rentrer seule au palais dans le but de rassembler ses affaires et quitter Baraht devenait risible. Ridicule.

Comme le joueur de flûte de Hamelin, elle fut attirée par un chant silencieux des dunes. Quand elle fut au cœur du sommet, Isadora fit un tour sur elle-même et ne vit que des tas de dunes identiques et trompeuses. La ville en toile de fond avait complètement disparue.

Perdue, elle se laissa tomber sur le haut de la dune alors que la chaleur étouffante l'empêchait de respirer.

Un souffle d'air chaud fit voler des grains de sable autour d'elle. Le cœur battant, elle constata terrifiée qu'elle était le seul être humain des alentours.

Ses lèvres asséchées lui indiquaient que très bientôt elle allait disparaître de la surface de la terre, emportant son bébé avec elle.

Sa première pensée fut pour son père avant qu'un bruit ne la fasse retourner.

L'espoir se raviva en elle lorsqu'elle vit un homme sur un cheval venir dans sa direction. Elle se leva pour accourir vers lui.

— Oh s'il vous plaît aider moi je suis perdue !

L'homme darda sur elle un regard peu agréable et immédiatement, elle se frotta les bras lorsque des frissons d'appréhension parcoururent sa peau.

— Où allez-vous ? Demanda-t-il d'une voix rude et pressante.

— A..u palais du roi.

Isadora étudia l'homme timidement et ce n'est qu'après un long moment d'égarement qu'elle le reconnut.

Seigneur ! Pas ça !

Réprimant un sanglot, elle s'écarta du cheval sans le lâcher du regard.

Dégoûtant fut le premier mot qui lui monta à l'esprit quand il continua à promener son regard sur elle.

L'ennemi de Jafar était devant elle.

Est-ce que le destin en avait après elle ?

La Mystérieuse épouse du cheikhOù les histoires vivent. Découvrez maintenant