Partie 12

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  Devant la boutique fermée, je pose mes mains sur une fenêtre poussiéreuse et regarde à l'intérieur.

-  Mon grand-père habite au premier étage. Pour entrer, on passe par la cour ; derrière la boutique. M'informe mon ami.

  Till saisis mon poignet et m'entraîne dans une petite ruelle. Nous passons par une porte en fer forgé, et entrons dans une cour intérieure. Vieille et magnifique, elle chantonne de vie. Le sol dallé de vieilles pierres est bordé de larges bandes de terre où poussent de petits arbustes, arbres un peu biscornus et plantes aux couleurs d'automne. Au pieds des arbres dépourvus de feuilles,l'herbe ondule avec le vent. Du lierre monte le long de la bâtisse,déborde et se niche dans les encadrés des fenêtres. Au fond de la cour l'escalier de pierre permet de monter à l'étage. Cachée sous les marches une vieille porte en bois ouvre sur l'arrière boutique de la librairie.

En haut de l'escalier, sur le palier, Bernard nous attend. Le vieillard est chaussé de grosses pantoufles à carreaux, d'un vieux vert jauni. Il nous embrasse, en finissant par son fils.

  En entrant dans l'appartement qui sent le café et les biscuits secs,une vieille dame nous appelle de la cuisine. Jeanne, la grand-mère de Timoté, patiente sur une chaise aussi vieille qu'elle. En entrant elle se lève et nous embrasse. Chaque bise est accompagnée un bruit d'aspiration d'air par une bouche en cul de poule.

-  Enchantée madame. Je m'appelle Lune, dis-je en lui souriant.

-  C'est la jeune fille dont je t'ai parlé, ma chérie. Bernard pose ses mains sur mes épaules et me fait un clin d'œil discret.

-  Ravie de rencontrer la jeune Lune dont tous ces garçons me parlent ! Elle sourit. Mais je t'en prie assieds toi !

  Elle me regarde, son visage ridé mais lumineux est plein de vie et rayonne de bonheur. La vieille Jeanne pose devant nous un set de tasse de thé en porcelaine blanche avec des petites fleurs violettes peintes dessus, sur une soucoupe blanche à fleur. Le père de Till saisit la théière en regardant sa mère de ses yeux bleu clair, il verse soigneusement le thé noir qu'elle vient de préparer. Au centre de la table il y a une boite ancienne, elle est décorée de peintures de gâteaux. Les gâteaux secs en débordent.

  Le vieux couple est adorable. L'un à côté de l'autre ils se regardent toujours avec la même passion. C'est incroyable comme l'amour peut être intense et durable : c'est magique.

-  Je crois que c'est le moment ou jamais pour descendre dans la librairie. Till se lasse de leurs conversations et cherchait désespérément une échappatoire.

  Je lui souris, un peu gênée de quitter la table au milieu de la conversation. Sa grand-mère me regarde avec un rictus aux lèvres.Je prends un dernier gâteau sec à la vanille puis suis le garçon.

  Arrivée en bas des escaliers en bois, je regarde autour de moi. Seule dans la boutique je n'aperçois pas mon ami. Tranquillement je passe entre les hautes étagères et attrape un énorme livre poussiéreux qui est à portée de main. Il laisse une marque de poussière sur la planche de bois.

  Je le tiens à deux mains et lis « Les Bêtes Mystiques. ».Je gonfle mes poumons. Je m'apprêtais à souffler sur la couverture lorsque Till me surprend. Je me retourne et, dans un souffle involontaire, projette la poussière accumulée sur le livre dans ses yeux. Aveuglé, il n'arrête pas de tousser comme un fou et recule jusqu'à un siège. Je repose le livre sur la tablette et me précipite vers lui. Il se frotte douloureusement les yeux. Doucement j'enlève la poussière de ses joues et de ses cheveux.

-  Till, ça va ? Dis-moi que ça va ? Dis-je inquiète.

-  Ouais, ouais, ça va. Il me regarde, les yeux plissés, gonflés et rouges.

Le Croissant de Lune - Livre 1 La Nouvelle Constellation [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant