Prologue

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Mon cœur noirci, les épreuves m'ont trop endurci
J'dors le jour, passe mes nuits à noyer mes soucis
J'rattrape mes ières-pri, rien qu'j'arrête et reprends
L'impression d'passer pour un mytho quand je me repens
Je cède aux tentations, lutte contre mes addictions
M'retrouve en contradiction aux moindres signes d'ostentation

....

Je bouge la tête en écoutant les paroles qu'il dit. Rohff c'est un vrai ! Je passais mon temps à écouter cette chanson en boucle : Dounia. J'ai vraiment l'impression que cette chanson a été dédicacé pou moi. Pourquoi ? Je m'appelle Dounia. Chez moi, c'est la misère alors je m'évade comme que je peux à travers des lyrics qui me vont droit au coeur. La sonnerie retenti, je me lève et retourne en cours. Je suis en 5ème B.

Moi, je n'ai pas d'amis. Je passe la majorité de mon temps à écouter de la musique cachée derrière le self. Je suis seule et bien mieux comme ça. C'est pas pour faire la prétentieuse ou la meuf hautaine mais, tous les gens de ma classe sont puérils. Ils parlent de sujet qui ne m'intéressent vraiment pas. J'ai parfois l'impression d'être trop mâture pour leurs conneries. En même temps, je n'ai pas une vie commune.

Je vis à la cité Rose, à quelques minutes du collège. Et la majorité de ce collège de ZEP vient aussi de là. Là-bas c'est la galère. Parmi toutes les cités de France, il me semble que c'est une des plus chaudes. C'est vrai qu'il y a souvent des descentes, des règlements de comptes et tout le blabla. J'ai toujours vécu ici donc je sais vraiment pas à quoi ressemble la vie dehors. Ouais, pour moi, en dehors de cette cité c'est dehors, l'extérieur. Genre ici t'es enfermée dans une cage et quand tu sors, t'es libérée. T'as capté ?

Bref, en gros, c'est la misère. Je suis fille unique et mon père nous a abandonné ma mère et moi. 'Fin, selon lui ils nous a pas abandonné. Ma mère et lui ont divorcés à mes 5 ans et depuis plus de nouvelles. Il a quitté la ville sans rien nous dire et apparemment il s'est remarié. Il nous a abandonné quoi. Le pire c'est que depuis ça, ma mère va mal. Elle est totalement partie en couilles. À part la journée où elle fait la femme de ménage, elle passe tout son temps à se bourrer la gueule. Ouais, elle ne fait que ça. Elle se soûl jour et nuit. Au début c'était invivable et puis, tu t'habitues. Au moins elle paie les factures et nous permets de ne pas être à la rue.

Heureusement que j'ai de la famille ici. Ma mère n'a qu'une soeur en France. Tout le reste de sa famille se trouve en Algérie. Sa soeur, khelti Fatima est vraiment trop cool. Certes des fois elle est dur mais j'aime bien. C'est mieux qu'une mère qui s'en bats les couilles de moi.

Khelti Fatima est mariée à 3ami Hakim, lui aussi je l'aime beaucoup. Ensemble ils n'ont eu que deux enfants : Mourad et Amina. Les deux je les considère comme un frère et une soeur pour moi. Ils sont les personnes dont je suis le plus proche. Spécialement Amina, elle a beau n'avoir qu'un an de moins que moi, on se comprend parfaitement. On est pareil. Mourad lui a 17 ans, on a 4 ans d'écart quand même.

Et pour finir la chose la plus importante me concernant : je suis musulmane Al Hamdûllilah. J'aime Allah, j'aime ma religion et je la respecte. J'essaye chaque jour de devenir une meilleure personne, une meilleure servante du Tout Puissant. Même si je n'ai que 13 ans, je pense qu'il n'y a pas d'âge pour se mettre dans la religion.

J'entre en cours et m'installe au fond comme d'habitude. Le prof commence son cours lorsque 15 minutes plus tard on toque à la porte. Toute la classe savait déjà qui c'était, même le prof le savait. La porte s'ouvre et... Saïd ! Qui d'autre que lui de toute façon ? Saïd c'est un gars de ma classe, il est vraiment relou. Je l'aime pas, il est chiant. C'est trop le tuhg 2.0 là, sans conviction. Il traîne avec les grands de la cité, a une fiche de suivie et ça y est il se croit trop chaud. Vraiment faut qu'il redescende. Enfin bref, il s'assoit et commence comme à son habitude à perturber le cours.

Ça devenait du grand n'importe quoi, t'avais tout les suivistes qui foutaient le bordel avec lui. J'ai mis ma capuche, mes écouteurs et est plongée ma tête dans mes bras.

Kalashnikov chargé, toujours de la partie
Mais la patrie n'aime pas les négros, ça on ne me l'a pas dit
Alors je crache mon venin sur la basse et la batterie
N'aie pas peur de la vitesse quand c'est moi le conducteur
Ma tristesse au fond du chargeur et au fond du cœur
Parce que je pense qu'à crâner, j'vais sûrement cramer
Peu importe où j'irai, je serai thug à jamais

[...]

16:30, enfin la fin des cours. Je ramasse mes affaires et sors limite en courant. Tout le monde se précipitait vu que le bus est à quelques minutes de la sonnerie. On voit le bus, on tape tous un sprint pour l'avoir. Al Hamdûlillah je l'ai eu ! Je me voyais pas marcher 20 minutes jusqu'à chez moi.

Je descends du bus, la cité m'accueilli. Chaque jour c'est pareil. Les grands, les murs, les routes, l'odeur du shit et de la mort... Je marche jusqu'à mon bloc et rentre chez moi. Ma mère n'était pas là comme à son habitude. Je vais rattraper la prière puis me change en djellaba et me pose devant la télé. Rien d'intéressant comme d'habitude. Mon téléphone vibre.

1 nouveau message

📩 - Amina 💜 : «Tu dodo chez moi ?»

📨 - «Vas y !»

Je vais faire mon sac, je laisse un mot à ma mère au cas où elle rentrerait et je sors de chez moi. Écouteurs dans les oreilles, je marche jusqu'au bloc d'Amina lorsque j'entends des cris féminins. Ils venaient du bloc juste à côté de celui d'Amina. Les grands tenaient le mur de ce bloc, ils ont tous commencé à se regarder. Je reste figée, qu'est-ce qu'il se passe ? Les cris étaient mélangés à des sanglots, tu sentais la tristesse dans la voix. Tu sentais la détresse.

J'allais entrer dans le bloc de ma cousine lorsque je vois une silhouette qui sort en courant du bloc des cris. Je regarde la personne et reconnais Saïd. Il avait pas l'air bien. Je finis par monter chez Amina.

J'ai salué tout le monde, je suis partie faire un gros câlin à Mourad et avec Amina nous sommes parties dans sa chambre. On discutait de tout et de rien, je lui ai dit pour les cris et Saïd. Elle ne comprenait pas comme moi mais elle a finit par dire que de toute façon tout se sait donc, nous l'apprendrons un jour ou l'autre. Elle aimait trop dire cette phrase Amina : «Tout se sait». Je n'y croyais pas spécialement mais, à chaque fois qu'elle disait ça on finissait par connaître la vérité donc bon, j'ai bien fini par y croire.

Et au fond, j'avais raison d'y croire. Tout se sait vraiment et, en l'occurrence, j'ai su ce qui venait d'arriver à Saïd... Ce qui déclencha tout le reste.

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La chroniqueuuse😘

Nos cœurs noircis, les épreuves nous ont trop endurcisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant