dix.

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Je marche tête baissée. Depuis combien de temps ? Je n'en n'ai aucune idée. Serait-ce des secondes ? Ou bien des minutes ? Peut-être des heures ? Je ne sais pas. Je ne sais plus. Tout ce dont je suis consciente, c'est que j'ai l'apparence d'une humaine, mes agresseurs ne veulent pas m'aider et mon seul ami est Pega. Mon Pega.

Tiens, j'entends le doux son de l'eau qui s'égoutte. Je relève la tête : une drôle de sculpture contenant de l'eau est installée dans cet endroit. D'ailleurs, dans quel sorte d'endroit suis-je donc ? La verdure y est reine en tout cas, et plusieurs humains se promènent tandis que des jeunes humains s'amusent entre eux.

Cela me rappelle mon enfance : moi aussi, je jouais avec les autres wangs de mon âge. Rires, marques d'affections, jeux seuls ou en groupe, et la joie l'ont rythmée. J'étais si heureuse. Pourquoi a-t-il fallu que ces deux humains maléfiques me jettent cette espèce de malédiction ? Pourquoi n'ai-je pas réussi à m'échapper lorsque ce filet m'enveloppait ? La réponse est simple : en réalité, je suis faible.

Mais alors, pourquoi ai-je tant voulu explorer les contrées interdites ?

Je sens des gouttes perler sur mes pommettes. Cela me rappelle Framboise : lors de notre séparation, elle aussi pleurait. Est-ce qu'elle aurait ce genre de pensée, quotidiennement ? Ces pensées à faire pleurer un éléphant ? Cela expliquerait surement sa personnalité de petite fille innocente et peureuse...

Pega couine à mes pieds. Et de sa tête, il me caresse la main. Il est si attentionné. Comment ai-je pu penser qu'il voulait me dévorer alors qu'il cherchait simplement des amis ?

La sculpture se dressant devant moi mesure au moins deux fois la taille de mon apparence humaine. Le bassin m'arrive au nombril. La sculpture est constituée de trois étages et au dernier, la silhouette d'une humaine tenant un verseau à l'horizontale duquel de l'eau s'échappe est installée. C'est beau.

Je lis la pancarte installée sur un des étages de la sculpture : « Fontaine Filyka, Baignade interdite. ». Donc on appelle cette sculpture une fontaine.

Je m'assois dos au rebord de la fontaine. Lorsque j'allonge mes jambes, Pega s'y allonge tranquillement. Je souffre, mon dieu ! J'espère qu'il ne m'a pas cassé quelque chose, comme un os ou un muscle ! Il faut que j'arrête de penser à ça, après tout, lui aussi a besoin d'affection.

Je passe ma main dans les doux poils décorant sa tête. Je me demande que dirait Boisie si elle rencontrait cette bête... Je pense que cela dépends sous quelle forme elle se trouve... Quoiqu'il ne me semble pas que les lapins la terrorisent, contrairement à moi. Je crois que ce sont plutôt les fourmis, son point faible. Il est vrai que les fourmis peuvent être diaboliques lorsqu'elles sont en groupe.

Voilà que je repense à elle. Ma frangine et ma meilleure amie. Finalement, concernant les larmes, je lui ressemble un peu.

« - Eh ! Regardez la clodo ! Entendis-je pouffer. »

Voilà qu'il semblerait que mon ouïe de wang soit revenue. Ou peut-être que ne l'avais-je pas perdue. Je ne sais pas. Quoiqu'il en soit, c'est encore un mot que je ne connais point.

« - Eh, mais je le connais ce chien ! »

Ah cette voix, je relève la tête. C'est l'humaine désagréable à la peau café que j'ai rencontré, ou qui m'a bousculée, à la sortie du café « Papilles du chef ! » ! Son regard méprisant disparaît lorsqu'elle croise mon regard.

« - Est-ce moi qui est désignée de clodo ? Que cela signifie-t-il ? »

L'humaine malpolie est accompagnée de trois autres humains : une femelle de grande taille à la peau sombre et au regard pâle, et deux humains- Attendez ! Ce sont Mao et Rudy !

Je plonge mon regard dans les yeux de mon chien. Ils m'ont lancé cette malédiction qu'ils ne veulent pas lever. Ils ont bousillé ma vie. Enfin, le reste de ma vie. Et pour couronner le tout : ils se moquent de mon cas. Même s'ils m'auraient vendue alors que j'étais sous forme de wang, j'aurais pu m'échapper ! Mais maintenant je ne leur sers plus à rien donc ils m'ont abandonnée. Comme ils l'ont si bien dit, les humains me voient comme une chose, un objet, un truc.

J'aurais dû écouter Boisie et ne pas l'entrainer dans ce petit ruisseau. Elle est ma grande sœur mais je ne l'ai pas écouté. Peut-être que je mérite ce qui m'arrive...

« - Eh ! Bonjour ! Moi c'est- Commence l'un en me souriant joyeusement.

- Tiens, euh... J'ai une soudaine envie d'aller pisser ! Tu viens Mao ? »

Mao ne m'a pas reconnue ? Je lève les yeux en sa direction. J'ai l'impression d'y discerner une pointe de mal-être avant que Rudy ne l'emporte loin. Oh, je vois... Soit il m'ignore en se moquant de ma pauvre personne, soit il m'a rayé de son esprit en n'ayant plus rien à faire de moi ! Dans tous les cas, je suis la victime.

C'est bizarre de dire cela : d'habitude, je suis toujours une des amis de la victime et j'essaie de la réconforter. Aujourd'hui, je n'ai que Pega qui tient à moi. Cruelle vie.

Je sens une vague de froid me parcourir. Les deux humaines se sont accroupies devant moi et me cachent la vue de l'astre blond.

U N    E M O J I   P O U R    D E C R I R E   C E   S E G M E N T  ?

Votre avis sur la philosophie de Pistache ? Pourquoi les jumeaux ont-ils réagis de la sorte ?

Posté le 09/12/17

M E R C I   D E   V O T R E   L E C T U R E    E T    A    B I E N T O T !

Agréable Mauvais SortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant