Pas si froid que ça finalement...

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                       Après encore quelques échanges, Stanislas m'autorise à prendre congé. Je suis encore un peu bouleversée par ce que je viens de découvrir. Bien entendu, je n'ai rien dis au sujet de Luc, mais juste que j'essaierais de me souvenir.... Hors de question de mettre des tueurs russes aux trousses de mon meilleur ami avant que je n'ai éclaircis tout ça. Je manque de trébucher sur ces maudits escarpins. Un coup d'œil à droite, à gauche, avant de me baisser pour enlever la source de ma torture pédestre. Alléluia c'est beaucoup mieux! Je m'engage dans les escaliers (j'ai l'impression de toujours faire le même chemin, c'est flippant) avant de m'arrêter. J'ai envie d'aller dehors. Ca fait combien de temps que je n'ai pas sentis l'air sur mon visage? Une éternité... Je fonce alors vers la porte d'entrée et l'ouvre délicatement. Il ne neige pas, mais il flotte dans l'air une odeur de flocon. C'est très agréable, même si il fait terriblement froid. Les vêtements que je porte ne sont pas vraiment adaptés mais bon, je me souviens du moment où la Selena de mon histoire quitte la table du dîner pour s'enfuir dehors dans sa magnifique robe bleue nuit... Est-ce une coïncidence que ma robe d'hier soit de la même couleur? Je soupire et avance vers l'arbre le plus proche. Il y a du vent et tout est calme. Je me repais de ce moment apaisant. Je ne me doutais absolument pas que quelqu'un était tranquillement en train de m'observer depuis une fenêtre de l'étage....

Aleck

          Encore une autre réunion chiante à laquelle je suis obligé d'assister pour plaire à Père.... Barbant. Je repense à l'altercation d'hier avec cette petite trainée bourrée sur le balcon de la salle de réception. Je serre les dents en me remémorant les mots qu'elle a balancé au visage de la petite française protégée de ma mère... Je ne sais pas pourquoi mais putain, ça m'a fais péter un plomb... Sans réfléchir je lui ai collée une balle dans le crâne, sous le regard du mec bouclé et de la française. Je ne regrette pas mon geste, mon seul regret est qu'elle ait vu ce dont je suis capable... Elle a tellement flippé qu'elle s'est évanouie et que j'ai du la ramener dans sa chambre. On ne s'est pas recroisé aujourd'hui, tant mieux d'ailleurs. Pas que ça me dérange de la voir, elle et ses jolies fesses, mais j'avais aucune envie de m'expliquer sur ce qu'il s'est passé et encore moins de m'excuser. Cette fille est beaucoup trop fragile pour vivre dans ces murs... Elle côtoie des meurtriers sans même y faire attention. Je ne sais pas pourquoi mon frère veut la garder ici. Elle lui a dit tout ce qu'elle savait sur ma nièce, mais il s'obstine à ce qu'elle fasse partie intégrante de sa recherche, j'ai toujours pas compris pourquoi... Moi ça me fait chier qu'une fille aussi innocente découvre l'envers du décor de son monde qu'elle voyait parfait. J'ai l'impression de l'avoir salie le jour où elle est sortie de la pièce d'isolement: j'ai pas su détourner mes yeux de ses cuisses charnues qui dépassaient de ma propre chemise.... Fait chier! Perdu dans mes pensées et ne faisant absolument pas attention au reste de l'assemblée je m'approche de la fenêtre. Je souffle en voyant le vent secouer les branches du plus bel arbre du domaine. Il doit faire un véritable froid polaire. Même étant natif de ce pays, je n'arrive pas totalement à ne plus grelotter dehors si je ne suis pas équipé de ma parka doublée de polaire. Pathétique mon pauvre Leck... Je m'apprête à me détourner de la fenêtre quand du mouvement attire mon attention. Une forme blanche est assise au pied de l'arbre. Je me penche au plus prêt de la fenêtre et parvient à distinguer un visage blanc comme la neige parsemé de taches de rousseur avec des yeux caramels perdus dans le vide. Je me concentre et remarque qu'elle tremble et claque des dents. Mes yeux descendent et je m'aperçoit qu'elle ne porte même pas de manteau cette idiote! Certes nous ne sommes pas en hiver mais pas en été non plus! Elle veut attraper la mort ou quoi?! Mais pourquoi je m'inquiète pour cette débile de française aux fesses à se damner! J'en ai marre.... 

- Quelque chose ne va pas mon frère? 

J'hésite à répondre à Sasha. De toute façon vu sa façon de toujours me percer à jour ça sert à rien de lui cacher...

- Il y a l'idiote de française qui est sortie dans le froid sans manteau et même si ça me fais chier de l'admettre, je m'inquiète un peu pour elle. J'ai pas vraiment envie d'être contaminé par la grippe, si tu vois ce que je veux dire...

Une des commissures des lèvres de mon frère ainé se retrousse pour former ce fameux sourire en coin dont nous avons tous hérités. 

- Tu pourras dire ce que tu veux, n'empêche que cette "idiote" arrive à emmener ton esprit très, très loin de la Terre, et pour ça, c'est la première. Et puis je doute que ce soit la contamination qui te fasse réagir, mais plutôt le fait de la voir claquer des dents dans une bouche aux lèvres bleuies par le froid, voir même de ne plus la voir tout court....

- La ferme Sasha. Je ne la connais pas cette fille, j'ai pas le droit de m'inquiéter comme ça pour elle alors que ça fait que quelques jours qu'elle est parmi nous. Surtout qu'apparemment elle va pas rester longtemps donc bon...

- Il n'empêche que je ne t'ai jamais vu autant tourner en rond en grognant que quand tu as su qui était enfermé dans la pièce du sous sol. Tu t'es même battu avec Stanislas à cause de ça... Je pense que le sort de cette fille t'inquiétais dès que tu as vu son visage doux et son corps dénudé aux yeux des brutes épaisses qui s'occupaient d'elle pendant les interrogatoires. Tu ne te serais pas battu avec ton propre frère pour lui apporter une simple chemise dans ce cas.

Et le pire c'est qu'il a raison... Je passais souvent dans ce couloir sordide pour tenter de voir ses yeux, et parfois je croyais entendre mon prénom... Malheureusement c'était impossible, elle ne me connaissait pas, et je me disais que dès qu'elle me rencontrerait, si elle le pouvait un jour, elle me haïrait. J'ai eu la chance de la voir debout, et plus encore contre moi. Je deviens totalement loufoque ma parole! Je jette un coup d'œil à Sasha. Il me devance.

- Vas y, j'inventerai une excuse à Père.

Je lui murmure un rapide remerciement avant de sortir discrètement de la pièce. Je descend les marches, prend mon manteau et celui d'Evie (il faudra d'ailleurs que je pense à lui commander un manteau à cette française). Je passe la porte et me dirige à grand pas vers la silhouette blanche. A nous deux, Selena.


Yeux Gris Et Roulette RusseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant