Au petit matin, Rochenéré l'avait libérée.
« Pars, ne t'inquiète pas pour nous. Je saurai prendre soin de notre fils. Je sens bien que tu en meurs d'envie, de partir. Je ne veux pas que tu ais des regrets un jour et que tu m'en fasses le reproche. J'ai toujours su que tu partirais. Et puis, tu commençais à t'ennuyer ! Courir dans la montagne, capturer des cavales pour les dresser, compter les brebis et les vaches, les petits fromages qui s'alignent dans la laiterie, les ballots de laines... Tout ça, dans le fond, ce n'est pas pour toi ! Je le sais bien ! Même si cela t'amuse de jouer à la châtelaine. Il puis il y a Solen, et tes amies, Sacha... Cela fait longtemps que nous aurions dû repartir, que tu aurais dû les revoir mais je me sentais si bien ici que je ne disais rien. Tu es une guerrière, alors va, cours... et n'oublie pas de revenir ! »
Aradante céda donc à son désir et à la demande de son frère. Et au fond d'elle même, elle se souvenait de la prophétie de Béranger. Les troubles et les attaques qu'avait décrites Régis signifiaient que les deux peuples n'étaient toujours pas réunis et que la discorde était plus que jamais agitée entre eux.
Régis et Sacha repartirent dés le matin pour Chambaran, Iris et Aradante s'attardèrent à Gypse pour préparer leur voyage. Aradante proposa à Iris de monter saluer sa mère Séléné, avant de se mettre en route.
« Pourquoi faire ? Est-elle passée me voir quand elle a décidé de partir ? S'est elle souciée de moi ? Elle m'a laissé sans un mot... » Il y avait toujours de l'amertume, dans sa voix, la douleur de n'avoir jamais été l'enfant chérie de sa mère, contrairement à son frère Clément qu'elle adorait pourtant. Il avait tenté de compenser l'insouciance maternelle en devenant son mentor. Plus qu'à sa fée de mère, s'était grâce au jeune apothicaire, devenu médecin, qu'Iris devait ses pouvoirs et connaissances féeriques. Et l'affection, elle l'avait aussi trouvé auprès de son père et de Gudrum qui après sa convalescence à Malaré, avait décidé d'y rester, devenant une fière matrone aux côtés de Jacquet.
Aradante découvrit Iris devenue Zoé, une jeune fée talentueuse mais toujours aussi curieuse et malicieuse. Avec Gudrum, elle avait appris l'art théorique de la guerre et surtout celui de monter à cheval et de voltiger avec adresse et précision. Ce n'était pas cette magie guerrière qu'elle maîtrisait le mieux, car si elle aimait mener une jument, elle n'avait guère de goût à croiser le fer et tirer à l'arc. Gudrum lui avait confié quelques sorts et appris plusieurs charmes guerriers. Avec Clément, elle avait cultivé le savoir familial sur les plantes et les herbes, les potions et les élixirs. Médecin depuis peu, il lui avait montré quelques soins de premières nécessités. Enfin Sacha lui avait enseigné toute la magie du discours : incantations, évocations, enchantements, malédictions et anathèmes. Si ses penchants la ramenait du côté des plantes et des soins, s'était révélée douée dans tout ce qui touchait au discours et particulièrement dans les charmes d'empathie et de communication qui requéraient une compréhension et une connaissance attentive des personnes.
Avec l'aide d'Aradante, elles travaillèrent quelques jours sur les sorts, comme un petit clin d'œil à leur première rencontre. Aradante pensait en avoir besoin pour sa prochaine mission. Il s'agissait d'acquérir un amplificateur des sens. Elle en avait appris l'existence lors de ses lectures adolescentes et Sofia avait commencé à l'initier avant qu'elle ne parte pour la Capitale. Elle l'avait fait travailler en lui supprimant la vue qui l'emportait sur tout, pour aiguiser les autres sens. Zoé lui confirma avoir elle aussi lut une littérature sur le sujet. Il fallait découvrir le point de déclenchement en soi qui branchait le sort sur l'ouïe ou l'odorat ; c'était les deux sens qu'elles souhaitaient amplifier. Pour chacun, quelques formules magiques aidaient à se focaliser pour les matérialiser et Zoé savait y faire. A force d'exercices et d'incantations, elle réussit à faire prendre consistance au sort qui commença à s'enrouler et s'amalgamer. A ce stade, il pouvait se répandre comme un fluide pulsant à l'intérieur du corps et ouvrir les portes des sens. Au bout d'une journée d'entraînement acharné, au bord de l'épuisement, Zoé y parvint. Installée dans le jardin terrasse de la forteresse, ce fut une grâce mystique que d'entendre soudain le vent souffler sur les aiguilles de Gypse et le chamois s'élancer en déclenchant un éboulis dans le pierrier. Mais elle ne réussit pas à isoler le sort et le structurer pour former une boule magnétique presque palpable, c'est ainsi qu'on lui avait décrit l'opération qui matérialisait le sort en un objet que l'on pouvait emporter ou échanger. De toute façon, Aradante argumenta qu'elle devait se présenter à l'École Supérieure de Magie libre de tous ses sorts objectivés. Ce qui comptait, était qu'elle puisse en cas de besoin avoir recours à cette magie. Elle sautait ainsi la phase d'objectivation du sort pour accéder tout de suite à son incorporation. La manipulation du sort objectivé favorisait un jeu d'échanges et de démonstrations entre les fées et permettait d'éviter tout le travail fastidieux de création.
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Cinq ans après
FantasyCinq ans après, Aradante revient ! Après avoir chassé sa mère, la Grande Sorcière Héro, Le Prince a œuvré à plus d'égalité entre les deux peuples ouvrant écoles, administration, métiers, aux hommes. Mais cela n'est pas du goût de toutes. Certaines F...
