Chapitre Cinq

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- pdv Louis -

Ne jamais juger quelqu'un en fonction de ses actes. C'est la première chose qu'on nous enseigne en criminologie. Ne jamais juger. Après tout, nous ne pouvons savoir dans quel état se trouve une personne à un certain moment de sa vie. Nous savons rien de ce qu'à traversé cette dite personne, ni ce qui l'a amené à poser ce quelconque geste. Non sans parler du fait qu'il existe diverses explications psychiatriques qui peuvent expliquer le pourquoi du comment. Notre métier ne sera jamais de juger, ni de regarder ce qui a été fait par le passé, mais plutôt de les guider vers un futur meilleur et, on l'espère, pacifique. C'est ce que je veux faire plus tard. Aider les gens qui ont commis une ou des erreurs, car je crois aux deuxième chances. Je pense qu'il y a moyen de trouver du bon chez chacun et assez pour couvrir la noirceur qu'ils ont seulement ou dernièrement connue. Voir le positif est une de mes plus grande force.

Cependant, connaître le crime posé et le voir en direct, ce sont deux choses complètement différentes. Je n'aurais jamais cru voir ça un jour en fait. Et ça me fait questionner énormément, sur le monde, ces deux hommes, mais sur moi également. Parce que bien que c'est normalement inné chez moi, de voir le positif, cette fois-ci j'avoue ne pas y arriver. Après tout, il n'y a rien de positif dans ce qui est arrivé ce soir. Et si, tout au long de mes études à l'université, j'étais confiant de pouvoir faire une différence et de ramener les criminelles à la raison, je réalise que ce n'est peut-être pas toujours possible. Parce que c'est difficile d'imaginer un possible futur vers le droit chemin après avoir vu ce que cette personne est capable de faire. Et j'essaie. J'essaie de penser à tout ce qu'on nous apprend, ce qu'on nous dit de faire pour aider, me demandant si ça fonctionne vraiment une fois en action, sur le marché du travail. Et surtout, j'essaie de ne pas juger. J'essaie très fort, parce que c'est la règle numéro un. Mais c'est plus fort que moi. Comment voir un bon côté chez lui, alors que je l'ai vu en chair et en os, poignarder sa victime de sang froid? Alors qu'il le regardait droit dans les yeux et a vu la vie s'éteindre dans ces derniers. Alors qu'il n'avait rien demandé.

Je fais tout le chemin du retour en courant, non sans regarder par dessus mon épaule, effrayé à l'idée de voir quelqu'un me suivre. J'ignore à mainte reprise la douleur dans mon ventre lorsqu'une crampe fait surface. Pour être honnête, la douleur physique me distrait de ce que mon esprit fait rejouer en boucle dans ma tête. Et lorsque j'arrive chez moi, je m'arrête, à la fois soulagé et stressé. C'est mon chez moi, mon confort, la sécurité, mais je ne peux négliger le fait que je ne suis pas en état de faire face à ma famille présentement. Je reste devant, reprenant mon souffle en appuyant mes mains contre mes genoux. J'ai envie de crier jusqu'à en perdre la voix, juste pour faire sortir cette boule coincée dans ma gorge et arrêter les tiraillements dans mon estomac qui me tord les entrailles. Je n'arrive pas à calmer les tremblements de mon corps et je crains de faire une crise panique à chaque fois qu'il m'est difficile d'inspirer. Je regarde ma maison et... c'est foutu. Je sais pertinemment que je ne pourrai pas faire comme si rien ne s'était passé, c'est impossible. Je ne devrais même pas être ici. Je devrais être avec la police, je devrais être en train de remettre une déposition, de raconter tout ce que j'ai vu ce soir pour que ce mec se fasse mettre derrière les barreaux.

Je passe mes mains sur mon visage et inspire fortement, comme pour me redonner une certaine contenance. Mon regard tombe de nouveau sur ma maison et je m'y dirige d'un pas rapide, avant que je ne change d'idée, avec la ferme intention de rejoindre ma chambre et crouler sous les couvertures. Je compte y aller sans m'arrêter et sans parler à personne - tâche généralement assez difficile avec la famille que j'ai. Une fois à l'intérieur, je me débarrasse de mon manteau et de mes chaussures, traversant  le salon sans même jeter le moindre regard en direction du divan, allant grimper directement les escaliers. J'entends vaguement quelqu'un parler, mais les mots n'atteignent même pas mon cerveau, ne sachant si les paroles m'étaient destinées ou non.Quand j'arrive dans ma chambre, je ferme la porte et m'appuie contre celle-ci. Je ferme les yeux, tentative pour me calmer, mais je réalise très vite que ce n'était pas une bonne idée lorsque je revois la scène se dérouler à nouveau derrière mes paupières. Je les rouvre donc aussitôt, mais il m'est toujours impossible de me calmer, c'est même pire, je dirais. Mon cœur bat si fort, que je n'entends que ses battements dans mes oreilles. Je ramasse ce dont j'ai besoin et sors de la pièce pour rejoindre la salle de bain.

Descente aux enfersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant