Mardi 11 septembre 2012

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Adossé contre son bureau, un sourire presque arrogant coincé au coin des lèvres, Monsieur Alexandre saluait ses secondes qui quittaient son cours. Son regard glissa sur la blonde qui s'avançait vers lui, une enveloppe marron en main.

« Tu t'es décidée ? Demande-t-il en haussant un sourcil.

- Je n'ai pas changé d'avis. Vous allez être déçu.

- Tu as envie que je le sois ?

- Non, je veux juste vous prouver que je n'ai pas de talent. Sinon vous allez insister et croire que j'aurais pu devenir je ne sais trop qui. Vous serez déçu plus tôt, la déception sera moins grande. »

Paul aimait beaucoup cette jeune fille, sans timidité avec un franc-parler remarquable. Tout en elle lui plaisait. Il saisit l'enveloppe et y jeta un coup d'œil. Un paquet de feuilles manuscrites s'entassaient au fond de l'enveloppe.

« Tu n'as pas tout écrit cette nuit rassure moi ?

- Plus ou moins, j'avais l'idée depuis un moment, j'avais fait des essais. J'ai simplement tout repris au propre.

- Tu as dormis au moins ? Il y a énormément de travail là dedans. »

Un simple haussement d'épaule répondit à sa question. Les cernes sous les yeux de la lycéenne, elles, étaient témoins de son manque visible de sommeil. Cela ne gâchait pourtant en rien la beauté de ce visage pâle et rayonnant. Un nouveau moment de flottement, identique à celui passé la veille pris place. Les yeux dans les yeux tous deux se scrutaient, se cherchaient, se contemplaient. Il n'y avait dans la salle qu'eux et la pièce semblait de nouveau suspendu dans le temps. Ils étaient transportés dans un autre lieu. Un lieu où ils étaient seuls.

Rosa fut celle qui brisa leur bulle spatio-temporelle en retroussant ses lèvres dans un sourire doux qui fit frisonner le professeur de par sa candeur. Elle le salua d'une voix tranquille.

« Repose-toi, ne put s'empêche de lancer Paul avant qu'elle ne franchisse la pote »

Et elle disparu dans le flot d'élèves qui passaient devant la salle, aspirée dans le brouhaha de la cours de récréation. Pourtant, Monsieur Alexandre la voyait encore, son visage en face du sien, sa silhouette dans le cadre de la porte, sa robe rouge, ses longs cheveux blonds. Il saisit l'enveloppe qu'elle lui avait laissé et ne put s'empêcher de la porter à ses narines. Un parfum, léger, quasiment imperceptible au milieu du goût du papier, se dégageait. Le professeur apprécia chacune des notes, repris une inspiration de l'adorable odeur et rangea à contre cœur le tout dans son sac.

L'esprit encore embrumé par les effets qu'avait sur luu la jeune fille, l'homme partit rejoindre son collègue qui l'attendait à l'entrée du restaurant scolaire. Le professeur de maths et lui étaient devenu, ce que l'on peut appeler de vrais amis, ils échangeaient beaucoup et sur des sujets très variés. Les deux étaient devenus plus que des collègues de travail . Cela ravissait Paul, de savoir qu'il aurait toujours quelqu'un qui l'épaulerai.

« Tu sais que la prof de musique est toujours sur toi ? En salle  blanche je l'ai entendue, elle ne parle que de toi, raconta le matheux. Un seul mot et elle est toute à toi.

- Ca ne m'intéresse absolument pas, elle n'est pas le genre de femme que j'aime. J'apprécie sa gentillesse mais elle un peu trop... coincé pour moi. J'ai besoin d'autre chose, d'une relation qui me stimule, qui me fasse ressentir des sentiments que je n'ai jamais exploré auparavant, il faut qu'il y ai de l'action, des enjeux. »

Les mots sortaient au fil de sa pensée. Plus son raisonnement avançait plus l'image de Rosa lui revenait en tête. Ces yeux noisette s'imposèrent à lui, ainsi que son teint pâle, sa bouche rose et ses cheveux blonds. Et son corps dans l'embrasure de la porte. Il eut même l'impression de sentir à nouveau son parfum, plus fort encore que celui qui était encré sur l'enveloppe. Ses souvenirs se mélangeaient à une vitesse folle, lui remontrant tous les courts instants passés en tête à tête avec la jeune fille. Avec son élève.

« Et puis on ne sort pas avec une collègue, ca gâche toujours l'ambiance, ajouta-t-il comme pour se disculper. »

Cher professeur.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant