Les gens comme nous [Tome I]

60. Éponyme

Vendredi 25 février 2011 - Amélie

Tout le monde était déjà dans le salon lorsque j'arrivai aux alentours de dix neuf heures, ma guitare sur l'épaule. J'en voulais à Hannah d'avoir proposé aux autres de venir, mais Tae m'avait rapidement fait relativiser en me faisant remarquer que ça ferait un bon entraînement, et que ce n'était pas la première fois que je chantais devant eux, de toute façon. Quelques minutes plus tard, un verre de jus d'orange (alcool interdit ce soir, sous ordre d'Hannah), je me détendis un peu en écoutant les autres parler de tout sauf de la raison pour laquelle ils étaient là, à la base.

- Alors on stresse ? me lança Namjoon en s'asseyant soudainement sur l'accoudoir du fauteuil sur lequel je m'étais installée.

- M'en parle pas, je répondis en buvant une gorgée de mon verre, histoire de.

- T'inquiète pas, y'a que moi qui parle anglais, les autres comprendront rien. Tu vas gérer comme toujours, il termina avec un grand sourire qui soulignait ses fossettes.

Il avait raison, et puis si il croyait en moi je pouvais bien le faire aussi. Pour changer de sujet, je mentionnai Jin une fois avoir vérifié que personne ne faisait attention à nous. En effet, les autres garçons et Jiwoo étaient bien trop occupés à faire du karaoké sur des chansons coréennes pendant que les filles se foutaient de leurs gueules.

- Je sais pas... J'ai l'impression de voir des signes mais tu sais comment il est...

- Arrête de te voiler la face, je suis sûre qu'il t'aime bien. Faut que tu tentes un truc.

Namjoon poussa un petit soupir, et secoua la tête.

- Si t'as tort ce sera plus jamais comme avant entre nous. Regarde Hoseok et Yoongi, par exemple.

- C'est complètement différent ! Toi tu feras les choses bien. Et puis Jin n'a rien à voir avec Yoongi.

Il finit par s'avouer vaincu et me promit qu'il y réfléchirait, puis il se leva pour rejoindre les autres. Ne voulant pas rester seule, je lui emboîtai le pas, et Hugo lança aussitôt en me voyant arriver derrière Namjoon :

- Hé Amélie, on veut entendre ta chanson !

J'avais absolument voulu l'inviter, même si il avait été réticent au début. Je voulais que les autres voient à quel point il était gentil, et jusqu'ici ça avait eu l'air de marcher. Tout le monde s'entendait bien avec lui. Même Tae.

- Bon d'accord, je vais chercher ma guitare ! je répondis en souriant.

Vendredi 25 février 2011 - Jimin

Je m'assis sur le canapé aux côtés des autres, observant Amélie accorder son instrument, assise sur une chaise devant nous. Puis le même air concentré qu'elle avait pris au ski en jouant sa chanson fit son apparition.

Elle commença à jouer, et la pièce parut brusquement se réchauffer. Je croisai son regard et lui sourit. Je voyais bien qu'elle était un peu nerveuse, mais elle se débrouillait très bien quand même. Elle se mit soudain à chanter, et je tendis l'oreille pour essayer de comprendre les paroles.

C'était de l'anglais, donc pas vraiment ma matière forte. Je me tournai vers Namjoon qui lui, sans nulle doute, avait tout compris. Soudain, Amélie se stoppa, et, gênée, commença à se justifier :

- Désolé, elle est pas finie, c'est pour ça que je voulais pas le montrer à vous tous à la base mais...

Peu importe. Nous nous mîmes à l'applaudir chaleureusement, tandis qu'elle pouffait, gênée. Tae la couvrit de compliments encore plus que les autres, comme d'habitude. Amélie alla poser sa guitare dans un coin avant de se tourner vers Hugo en souriant. C'était le seul ici qui ne l'avait jamais entendue.

Vendredi 25 février 2011 - Amélie

- Alors ? je demandai, les joues encore cramoisies.

- C'était impressionnant ! J'avais remarqué ta voix quand tu chantais Le petit bonhomme en mousse...

- Ah, même avec l'accent belge ?

- C'était un accent belge ? il éclata de rire.

Après un petit silence, il me demanda timidement :

- Ça parle de quoi ?

- T'as vraiment rien compris aux paroles ?

Il secoua la tête.

- Cette heure de colle ne t'as donc servi à rien, soupirai-je, feignant l'agacement. Ça parle de notre groupe, de notre amitié, tout ça.

- C'est vrai ? demanda Jungkook.

- Oui !

- Trop mignonne, fit Jiwoo avant de me prendre dans ses bras.

Tae prit le relai en me prenant le bras. Il lança un petit regard en biais à Hugo avant de me regarder moi, puis lui de nouveau.

- T'en as pensé quoi Hugo ? lui demanda-t-il finalement après un temps.

- J'ai adoré.

- C'est vrai que c'était super... me complimenta-t-il à nouveau. Bref, on va prendre l'air Mel ? Ça te ferait du bien, t'es toute rouge.

Je souris à Hugo et suivis mon copain sur la terrasse. Je l'observai tandis qu'il allumait sa cigarette en plissant les yeux. Il m'en proposa une, mais je refusai poliment.

- On partagera.

Il me sourit et tira une taffe avant de me passer la clope, en profitant pour ramener une mèche de cheveux derrière mon oreille.

- Ce serait génial qu'on écrive une chanson ensemble, dit-il finalement en reprenant sa cigarette après un instant.

- En coréen et en anglais ? Ouais, ce serait bien, mais ça va être un peu dur non ? J'ai jamais écris une chanson avec quelqu'un d'autre...

- Mais non, ça ira. Fais moi confiance. Je suis un poète !

Je ne pu m'empêcher de sourire à ces mots. Il était vraiment trop mignon. C'était lui qui me donnait du courage quand j'avais envie d'abandonner ou quand j'avais du mal à croire en moi, que ce soit par rapport à la musique ou à l'équitation, et j'étais toujours là pour lui aussi. Mais il était un peu bizarre en ce moment, un peu possessif. Ça avait commencé avec Yoongi au ski, puis maintenant Hugo ? Il remarqua mon air perdu, et me demanda si ça allait.

- T'as quelque chose contre Hugo ? lui lançai-je d'un coup sans réfléchir.

- Non. Pourquoi ?

- Je sais pas, on dirait que t'essayes de m'éloigner de lui à chaque fois. Tout à l'heure, mercredi à la récré quand on parlait... T'es sûr que t'as rien contre lui ? je conclus en sondant ses grands yeux sombres, en quête d'une réponse qu'il n'allait sans doute jamais me donner avec des mots.

Il détourna le regard pour m'échapper et souffla que je me faisais des idées. Je fis semblant de laisser tomber, mais je savais qu'il y avait anguille sous roche, et j'allais vite découvrir la vérité.