Les gens comme nous [Tome I]

36. Contretemps

Mardi 1er février 2011 - Hannah

Jimin, Taehyung et moi étions tous les trois assis dans la navette qui nous allait nous mener à la station de ski. Je regardais le paysage défiler pour me détendre, car les deux garçons m'avaient contaminé avec leur nervosité. Jusqu'ici, j'avais réussi à contenir mon stress, un exploit en soi, car j'étais quelqu'un de très nerveux de nature. Mais maintenant, mon assurance avait complètement disparue. En plus, Jimin avait décidé de s'asseoir à côté de moi et je n'arrêtais pas de sentir sa jambe remuer.

- Jimin calme toi on dirait qu'on t'emmène à l'abattoir, lui lançai-je en me collant un peu plus contre la fenêtre pour m'éloigner de lui.

Celui-ci me jeta un coup d'œil, soupira et me répondit qu'il avait peur de se faire mal, faisant référence à sa légendaire maladresse. Taehyung lui répondit, sans ciller, que même à pied il risquait de se faire mal de toute façon.

- Je te jure Namjoon et toi vous êtes pas possible, ajouta-t-il en retournant à son occupation précédente, c'est à dire son téléphone.

- Tu parles à qui Taehyung ? lui demandai-je pour l'embarrasser, ce qui fonctionna très bien, celui-ci rougissant instantanément.

Il me répondit, sans nous regarder, moi et Jimin :

- Je parle à Mel, elle me dit qu'ils sont encore au centre, ils ont des problèmes de navette.

- Nan, encore ? s'insurgea Jimin. Ils vont rester là jusqu'à midi à ce rythme !

J'ignorai leur discussion animée, et voulu retourner à mon paysage, mais le bus s'arrêta et les profs nous ordonnèrent de descendre dans le calme, ce que nous fîmes, tentant de ne pas glisser à cause de nos grosses chaussures de skis dans lesquelles il était très fastidieux de marcher. Arrivés sur le parking, tous les trois sains et saufs, nous commençâmes à nous diriger vers notre groupe, tous affairés à récupérer leurs skis, qui avaient été amenés dans des sortes de petits containers en métal.

Je mis quelques minutes avant de trouver les miens et Jimin dû m'aider mais, finalement, je les récupérai et nous fîmes notre chemin vers les cabines. Notre moniteur, un homme grisonnant et très grand, nous expliqua comment enfiler et enlever des skis, et nous donna des consignes pour les cabines : pas plus de huit, la porte se refermerait seule, ne pas trop bouger pendant le trajet, et pleins d'autres que j'écoutai d'une oreille, trop fatiguée pour me concentrer entièrement. Dans la file, Jimin plaisanta en annonçant que si l'on tombait, la neige amortirait la chute.

- Tu rigoles ? s'exclama Taehyung. T'as pas vu les rochers ?

- Quels rochers ? lui demanda Jimin, son visage ayant soudainement quelque peu perdu de ses couleurs.

- C'est vrai ça, quels rochers ? demandai-je à mon tour, pas très rassurée non plus.

- Je rigole, lâcha Taehyung en lança un coup de coude dans les côtes de Jimin.

Très drôle, Taehyung.

Mardi 1er février 2011 - Hoseok

- Tae et les autres sont déjà dans les cabines ! s'indigna Amélie en remettant rageusement son téléphone dans la poche de sa veste de ski.

C'est vrai que cela faisait bien vingt minutes que tout le monde était parti et même probablement déjà arrivés, et nous, nous restions coincés là. Nous, c'était les premières étoiles, et les "experts", qui étaient encore plus énervés que nous, harcelant les profs pour avoir des informations.

J'aperçus Yoongi, qui était appuyé, nonchalant, sur le bus qui aurait du faire son départ vers le centre il y a de ça au moins vingt minutes. Ils voulaient que tout le monde partent en même temps, et il n'y avait pas assez de place pour les deux groupes dans un seul bus. Décidément, les problèmes d'organisation étaient constants.

Quand nos regards se croisèrent, il me sourit. Mais c'était différent, cette fois. Ce n'était plus un sourire amical, doux et sincère comme avant. Celui là était profond, presque séducteur, et ses yeux bruns me sondaient de haut en bas. Peut être que notre amitié avait changé, en fin de compte.

Je pensais que notre relation allait en rester au sexe occasionnel, mais il en voulait toujours plus. Tant mieux, cela m'avait permis d'oublier Taehyung, mais maintenant, j'avais l'impression que, doucement, il commençait à prendre sa place. Putain, qu'est-ce qu'il m'arrivait ? Pourquoi est-ce que je pensais ça ?

Mardi 1er février 2011 - Namjoon

Je voyais les profs courir dans tout les sens, leurs téléphones à la main, sûrement pour régler ces problèmes de navettes. Je décidai de marcher un peu, et tombai sur Amélie, derrière le bus, occupée à regarder son téléphone.

Elle devait sûrement envoyer des messages à Taehyung, vu la tête qu'elle faisait. Mais la personne qui retint mon attention, c'était Jin, juste derrière elle, qui attendait à côté de Jungkook. Même en combinaison de ski, c'est à dire pas la tenue la plus flatteuse du monde, je le trouvai magnifique.

J'avais beau chercher dans ma mémoire, je ne me souvenais pas vraiment du moment où j'avais commencé à avoir des sentiments pour lui. Au fond de moi, je pensais que j'en avais peut-être toujours eu, sans savoir poser des mots sur la chose... Mais c'était vraiment difficile de me confesser à lui. Face à lui, je perdais toute ma confiance en moi (et Dieu seul sait que j'en avais à revendre) et je n'étais même pas sûr qu'il soit gay.

Et si Amélie avait tort, et il ne parlait pas du tout de moi ? Ce n'était pas impossible. J'avais peur de le dégoûter si je lui avouais mes sentiments sans que ceux-ci ne soient réciproques, et des conséquences : il n'allait plus vouloir me parler, ni même me regarder. J'avais besoin de lui, je ne pouvais pas imaginer ma vie sans lui...

- Namjoon ça fait dix minutes que t'as les yeux dans le vide ça va ? me demanda Amélie en claquant des mains devant moi pour me sortir de mes pensées.

- Oui, je réfléchissais juste. T'as des nouvelles ?

- Apparemment y'a un bus en route. Mais on m'a dit ça y'a vingt minutes quand j'ai demandé aussi, donc je sais pas trop ce que ça vaut.

- On aura jamais le temps de skier, geignit Jin en regardant sa montre.

Puis il me regarda, droit dans les yeux, et j'eus l'impression que j'allais tomber en arrière.

- J'espère qu'elle vaut le coup, leur piste noire, ajouta-t-il, toujours avec ce même regard déstabilisant.

Il fallait que je me reprenne.