Les gens comme nous [Tome I]

49. Target

Mardi 8 février 2011 - Hoseok

Le lendemain, Yoongi ne m'avait toujours pas adressé la parole, alors je décidai de le prendre à part à la récré pour mettre les choses au point.

- Pourquoi tu veux pas me parler ?

Il soupira et regarda autour de lui, avant de me répondre de façon nonchalante :

- T'as pris ta décision. On couche plus ensemble, on reste amis. Voilà.

- Oui, amis. Là, on dirait que tu m'en veux pour un truc.

- Bah... Je sais pas trop pourquoi t'as voulu arrêter, en fait. On était bien, non ?

En finissant sa phrase, il plongea son regard dans le mien, cherchant l'approbation. Je baissai les yeux vers le sol jonché de mégots de cigarette pour me laisser le temps de trouver une réponse. Oui, on était bien. Mais il m'utilisait, et se servait de moi à sa guise, comme si je lui appartenais. Et je ne voulais pas de ça avec lui.

Quand je lui fis part de mes raisons, il rit jaune, et me répliqua que si je m'attendait à du romantisme avec lui, je rêvais. Et la voilà, ma deuxième raison. Je m'étais attaché à lui, parce qu'il était le seul à bien avoir voulu m'écouter, mais bien plus que ce que j'aurais jamais pu imaginer. Il avait fini par me plaire, et je détestais chaque seconde de ma vie depuis que mon cœur s'était mit à battre pour lui.

- C'est pourtant toi qui était jaloux des autres parce qu'ils pouvaient s'exposer, et maintenant tu me dis que l'amour t'intéresse pas ?

Interloqué, il fit un pas en arrière, pas sûr d'avoir compris.

- J'étais pas jaloux, c'était un état de fait. L'amour ça marche pas à 90% du temps, au cas où t'aurais pas encore remarqué, continua-t-il en faisant probablement référence à Taehyung. Je prends ce que je veux et je m'en vais, t'attends pas à mieux, Hoseok.

Il avait dit mon prénom avec tellement de mépris que j'avais presque envie de lui en foutre une, mais je me retins. Il avait changé. Il était passé d'un meilleur ami qui tenait à moi, à un monstre froid et distant. Les autres nous regardaient de temps à autre, se demandant sans doute ce que l'on faisait, et je lui lançai finalement pour le faire craquer :

- Donc ça te fait rien si je leur dis ?

C'était mon seul moyen de pression. Moi, je me foutais que mes amis sachent que j'étais gay, après tout Amélie et Jin le savaient déjà. Lui, beaucoup moins.

- Hoseok si tu fais ça...

- Si je fais ça quoi ? Tu vas me casser la gueule ? Putain de merde, Yoongi, on en est où là ? Y'a quelque mois tout allait bien, tout était normal puis y'a eu cette putain de soirée et...

- Tu regrettes ?

Je sondai ses yeux, mais je ne trouvai rien de plus qu'un regard sombre et perméable. Yoongi avait disparu, et je m'en rendais compte maintenant. Tout ça à cause de moi, toujours à cause de moi. Sans un mot, je me retournai et me mit à marcher dans la direction opposée, et il me regarda partir sans bouger. J'avais besoin d'air.

Mardi 8 février 2011 - Hannah

Hoseok avait séché le sport, et Yoongi avait refusé de nous expliquer de quoi ils avaient parlé pour le mener à s'en aller comme ça. Je me doutais bien que ça avait un rapport avec leur relation, mais précisément ? Jimin et moi avions pris la décision de lui dire que nous savions, car il nous était impossible d'ignorer sa souffrance désormais.

Assise en cours d'anglais, je ne pouvais m'empêcher de penser à cette histoire. J'étais terriblement inquiète, et je n'arrivais pas à me concentrer sur le cours qui se déroulait devant moi. Amélie, assise à côté de moi, n'était pas beaucoup plus attentive, mais comme elle le répétait à chaque fois que je lui faisais remarquer, elle pouvait se le permettre, elle.

Taehyung et cette dernière n'arrêtaient pas de se lancer des petits regards en coin, et Namjoon levait les yeux au ciel à chaque fois qu'il les voyait faire. Maintenant que c'était officiel, ils ne se cachaient vraiment plus pour quoi que ce soit. Soudain, Amélie se tourna vers moi pour me demander un stylo rouge, et quand je lui répondis que je n'en avais pas, elle se mit à mendier auprès des autres élèves assis autour de nous.

Hugo, à l'autre bout de la salle, répondit positivement à son appel, et il fouilla dans sa trousse avant de lui en lancer un. Malheureusement, madame Dupuis avait décidé de passer dans cette rangée au mauvais moment, et le pauvre stylo finit sa course sur son visage. La classe éclata de rire, et quand le calme revint, elle bouillonnait.

- Qui a lancé ce stylo ?! hurla-t-elle d'une voix fluette qui n'inspirait pas vraiment l'obéissance.

Hugo leva timidement la main, sachant déjà à quoi s'attendre.

- Une heure de colle mercredi de onze heures à midi, et je te donne du boulot. C'est inadmissible, vous pensez que c'est un jeu ?

Amélie se dénonça à son tour en levant la main :

- C'est ma faute, c'est moi qui lui ai demandé un stylo, il voulait juste m'aider.

La prof haussa les sourcils, choquée qu'une bonne élève dérange son cours.

- Amélie, tu me déçois. Une heure mercredi aussi.

Celle-ci accepta la sentence en baissant la tête, de toute façon elle n'avait pas le choix. Elle aurait tout autant pu ne rien dire, mais elle n'aurait pas toléré que seul Hugo prenne le blâme. A la sortie, celui-ci vint la remercier de s'être dénoncée, et elle le remercia, un peu prise de court, avant de descendre les escaliers avec moi, emboîtant le pas aux garçons.

Nous n'avions plus cours de l'après-midi, alors nous avions prévu de tous aller chez Jungkook, mais certains s'étaient déjà désistés, comme Amélie et Namjoon par exemple, prétextant des devoirs à faire. Hoseok et Yoongi ne nous avaient pas accompagné non plus, bien entendu. Tant pis pour eux. Moi, Sarah, Jungkook, Jimin, Jin, Jiwoo et Taehyung parcourûmes les petites rues étroites de la ville avant d'arriver devant la maison de Jungkook.