DIX-NEUF

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Astride

Sous tous les angles, le monde céleste était des plus abstraits et subjectifs. Autant la palette de noir qui paraît le ciel nocturne semblait à première vue morne et uniforme, un soupçon d'attention suffisait pour apercevoir la beauté de ce noir. Jamais on aurait vu de jais, de noir d'encre, d'ombre, de ténèbres si sublimes et nuancés au monde des mortels.

C'était ces teintes qui permettait aux étoiles d'être si belles, d'en bas.

J'avais beaucoup de difficulté à évaluer les distances ici. Se déplacer d'un point A à un point B pouvait, selon les jours prendre plus ou moins de temps. Quoique même le temps n'existait pas vraiment. L'éternité ne se comptait pas encore.

Les seuls endroits où je savais me rendre étaient la maison et la frontières monde mortel. Malgré les avertissements, quand personne ne regardait, j'essayais de me faufiler au travers de la grille pour rejoindre L'en-bas.

Je voulais revoir ma mère, Auguste, Zara, Defontaine, Valériane et même Olivier.

Je voulais m'assurer qu'ils étaient bien vivants.

Je voulais les aider comme Cælesti l'avait fait pour moi de mon vivant.

Mais immanquablement, la sentinelle me ramenait de l'autre côté avant même que j'ai pu faire deux pas. Alors, je retournais en catimini à la maison et m'exerçais à ma nouvelle magie en attendant la prochaine occasion de filer entre les doigts de la sentinelle et descendre rejoindre mon chez-moi.

Le soir, Cælesti revenait et m'enseignait à maîtriser toutes les formes de magies. J'avais les pouvoirs d'Olivier, d'Auguste, de Valériane, Gaëlle, Karelle, tous les autres Ensorceleurs et même des pouvoirs que personne ne possédaient à L'En-Bas. Chacun d'eux avait ses particularités, ses difficultés et ses avantages. Je devais tous les maîtriser pour un jour pouvoir les transmettre à mon tour. La tâche était phénoménale, on me mettait au travail dès la tombée de la nuit et on ne me lâchait pas jusqu'à l'aube, je n'avais aucune vie sociale, aucun autre passe-temps.

Ma vie se résumais à apprendre, j'allais devenir folle. J'en avais assez de toute cette théorie, j'avais besoin de concret, j'avais besoin d'action. Même Cælesti était devenue ennuyeuse et monotone.

Alors, le jour venu, je m'entraînais pour faire avancer ma formation au plus vite, dans l'espoir de retourner rapidement à L'en-Bas.

Le pouvoir d'illusions m'avais tout de suite accroché, puisqu'il me rappelait Auguste.

C'est alors que j'ai découvert un moyen de descendre.

Extatique, je me précipitais à la frontière, où on voit briller Le Soleil au lointain horizon. Je modelais le pouvoir d'illusion en une forme scintillante qui se mua rapidement en jeune étoile. Moi-même, mon clone, mon leurre.

Le leurre commença à bruyamment grimper la clôture tandis que je me dirigeais vers la porte principale, laissée sans surveillance par les gardes qui interceptaient le leurre.

Et enfin, pour la première fois depuis je ne sais quand, j'atterris sur la terre ferme. Aussitôt, je repris conscience du temps. Nous étions à l'aube d'un matin d'octobre frisquet. L'espace était plus concret, la vie avait reprit son cours.

J'étais apparue justement au premier endroit auquel j'avais pensé, le Célestrium.

La cour était ornée de perles de rosée et personne ne s'était pointé le bout du nez.

Après un moment, je rentrais à l'intérieur, et, guidée par l'aura humaine, je montais plus loin dans le château pour me retrouver bien malgré moi dans les cartiers du prince Olivier.

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