19 ; Poignet

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Il avait passé une bonne journée. Très bonne, même. Il avait très bien mangé à son réveil, un colis qu'il attendait depuis quelques semaines étaient enfin arrivé, il s'était reposé bien au chaud chez lui, il avait passé une excellente fin d'après-midi avec Émilie et elle avait même insisté pour lui faire découvrir un très bon endroit où manger.

Bref, une bonne journée, qui fut gâchée au moment où il aperçut son ami dans les bras de Stephen.

Enfin celui qu'il assumait être Stephen.
D'un autre côté, qui d'autre cet homme aurait pu être ? Puis le bouclé le lui avait confirmé.

Il les voyait encore. L'un dans les bras de l'autre, les yeux fermés et il aurait juré avoir entendu une sorte de gémissement.

Lorsqu'il entra dans le restaurant sa vision devenait floue, étant incapable de se concentrer sur ce qui l'entourait, trop absorbé par cette chaleur désagréable qui l'envahissait et qui changeait tellement de choses en lui : son cœur battait démesurément vite, il le sentait. Il n'entendait presque rien, tout lui semblait lointain. Il savait également sa respiration très lourde, lente et pourtant forte. Ses épaules et sa mâchoire étaient contractés également, ses poings aussi probablement.

« Damien..! »

Une voix proche, et pourtant étouffée lui parvint. Il tourna sa tête un peu brutalement vers la source de ce qui ressemblait à une plainte et vit le visage d'Émilie exprimant de la douleur.

Son champ de vision s'élargit ; sa respiration se calma subitement, le faisant haleter et il lâcha la main de la jeune femme qui s'empressa de la frotter et de faire tourner son poignet. Son cœur battait toujours aussi vite mais cette fois l'inquiétude était la coupable.

Est-ce que... Est-ce que je viens de la blesser ?

Thomas lui sortit alors totalement de la tête.

« Ça fait une minute que je t'appelle et que t'as l'air totalement perdu dans tes pensées... Puis t'as commencé à serrer mon poignet super fort...

- Merde je- j'suis désolée, j'voulais pas...

- Je me doute... Fais juste attention s'il te plaît, j'ai besoin de ma main pour écrire. Bon, on commande ? Sinon ça va fermer.

- Ouais... »

Elle le devança et prit une carte pour la tendre à Damien, qui se sentait coupable. Certes, elle ne semblait pas lui en vouloir mais il l'avait tout de même légèrement blessée.

Elle lui tendit un menu pour qu'il choisisse et le brun lui lança un dernier coup d'œil pour être certain qu'elle allait bien et qu'elle ne lui en voulait pas.

Durant l'attente de leur repas, qu'ils allaient manger chez la jeune femme, cette dernière était très silencieuse, regardant un point fixe sur la table qui les séparait. Le plus grand l'avait déjà vu se perdre dans ses pensées de cette façon, parfois cela pouvait durer plusieurs minutes sans qu'elle me revienne à la réalité, ignorant tout ce qui l'entourait. Lorsqu'elle faisait ça, elle affichait une expression neutre, ne laissant deviner à personne ce à quoi elle pouvait penser, et quand elle revenait à elle, la plupart du temps elle avait trouvé une solution, une réponse, une issue ou n'importe quoi qui pouvait ressembler à une fin à la situation qui l'avait poussée à réfléchir ainsi. Enfin, uniquement si elle revenait d'elle-même, si on l'interrompait, toute sa réflexion semblait être oubliée.

Une fois elle n'avait pas parlé pendant une demi-heure pour réfléchir à la question de comment différencier lorsque le Mike Wazowski de Monsters Inc. fait un clin d'œil de quand il cligne normalement.

Une autre parce qu'elle se demandait quels seraient les impacts sur une personne et son entourage si cette dernière ne cessait de revivre une journée encore et encore, en étant la seule à s'en rendre compte.

Il se leva et attrapa le paquet qu'un employé lui tendait et se tourna vers sa copine remarquant qu'en se levant il avait interrompu le cours de ses pensées.

« Tu pensais à quoi cette fois ?

- À... si ça serait pas plus simple au lieu d'avance et reculer d'une heure tous les six mois, de le faire d'une demi-heure et plus jamais y toucher. Mais après on a presque plus aucun appareil qui n'est pas connecté au réseau donc ils se mettent à jour seuls du coup, est-ce... »

En voyant le monologue qui arrivait, le brun regrettait presque de lui avoir demandé, mais lorsque le sujet auquel elle réfléchissait était intéressant, il prenait plaisir à l'écouter avancer ses arguments et ses idées.
La jeune femme s'était éventuellement arrêtée lorsqu'elle eut enfin son repas en face d'elle.

« Alors ?

- Alors quoi ?

- Tu les trouves comment les burgers de là-bas ?

- Ah ! Ils sont super bons, et leurs frites ? Wow ! »

Il me mentait pas. Vraiment, ceux-là étaient parmi les meilleurs qu'il avait mangé, et Dieu sait qu'il en avait mangé beaucoup au cours de sa vie.

Alors qu'ils étaient tous les deux allongés dans le lit, attendant patiemment que le sommeil les accueille, une vibration suivie d'une forte lumière les aveugla momentanément.

Le brun grogna alors qu'Émilie se précipita dessus pour baisser la luminosité au point minimum.

En voyant pourquoi son appareil s'était allumé, elle laissa échapper un léger «Ugh» avant de l'éteindre et de s'étaler à nouveau sur son lit.

« C'était quoi ?

- Un message. Mes cours demain ils sont prolongés et en dès que je sors je dois aller une fête.

- Ça te fait si chier que ça ?

- Pas vraiment. Juste le fait qu ils aient décidé de le dire alors que j'étais sur le point de dormir, si.

- Du coup on se verra pas demain ? Et si tu vas à une fête je suppose qu'après-demain non plus.

- Probablement ouais... Que tu me vois avec une gueule de bois c'est peut-être pas la meilleure idée.

- Mmh ? C'est un anniversaire de qui ?

- Le copain de ma meilleure amie, vu qu'il va essentiellement y avoir ses amis à lui, elle veut pas rester seule.

- T'inquiète pas, tu vas t'amuser. »

Elle le regarda intensément pendant quelques secondes puis plongea sa tête dans son oreiller, souhaitant une bonne nuit au brun qui s'endormit dans les minutes suivantes.
Il ne put donc entendre sa copine soupirer et reprendre le cours de ses pensées et murmurer une bonne demi-heure plus tard le nom de son ami.

« Thomas, hein..? Putain... »



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𝑭𝒐𝒐𝒍𝒔 ; TerrainkOù les histoires vivent. Découvrez maintenant