Chapitre 27

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(avant-propos : lisez ce chapitre en écoutant cette musique, elle résume tout)

Si Méaly avait pensé s'en sortir un jour, ce n'était plus qu'un lointain souvenir désormais. Il lui semblait que toute sa vie partait en lambeaux, et qu'elle était incapable d'agir, pétrifiée. Elle ne pouvait que se regarder se détruire, et voir la fin se rapprocher.

Elle ne savait plus comment elle en était arrivée là. Cela avait peut-être commencé avec des phrases anodines de ses parents concernant sa fac, et le logement dont elle devait bientôt aller récupérer les clés. Elle avait volontairement repoussé cette idée, et maintenant que c'était face à elle, elle n'était pas prête.

« 12/08/2015
Aujourd'hui, mon père et ma mère m'ont encore parlé de l'université. Je ne veux pas, je ne veux rien entendre. Je ne veux pas y aller, je n'y arrive pas, c'est au-dessus de mes forces.
J'ai choisi cette filière totalement au hasard, je ne peux pas entrer là dedans, je refuse de passer cinq ans dans des études qui ne me plairont pas, pour faire un travail que je haïrai. Je pensais avoir le temps de choisir ma vie, mais ce n'est pas le cas.
Je ne veux pas avoir cette vie. Je veux vivre libre, voyager, partir. Je ne peux pas rentrer dans des études maintenant.
J'ai peur, j'ai tellement peur, parce que je n'ai plus le choix, et que je vais finir par aller à la fac. Je ne veux pas, ça me fait tellement peur que ça me réveille en pleine nuit. J'en ai tellement assez de voir que les angoisses reviennent sans cesse. Peu importe le temps pendant lequel elles ne sont pas là, elles finissent toujours pas revenir. Je pensais avoir assez souffert pour un bon moment, mais apparemment, non.
Ce n'est jamais la fin, j'ai juste une pause, un peu de répit.
Ce matin, Ray m'a dit de partir. Il m'a dit que personne ne pouvait contrôler ma vie, et que je devais partir pour vivre mes rêves et voyager. Il m'a dit que j'aurais tout le temps de faire des études plus tard. Il m'a dit que je n'avais pas à être l'esclave d'un système qui ne veut que ma mort. Il m'avait manqué, lui, et toutes ses convictions.
J'aimerais tellement le croire, j'aimerais tellement que cela soit possible. Mais je sais que ça ne l'est pas. Je suis rationnelle.
J'ai l'impression d'être condamnée à vivre une vie dont je ne veux pas.
Je n'en veux pas. Je veux partir. »

Après cette discussion avec ses parents, Méaly avait commencé à aller de plus en plus mal. Elle ne dormait presque plus, et mangeait très mal. Pourtant, elle semblait heureuse aux yeux de tous.

Elle continuait de voir Matthew chaque jour, parfois ils dormaient ensemble. Elle n'hésitait plus à se dénuder pour lui désormais. Elle avait toujours envie qu'il la touche, qu'il l'embrasse. Elle le désirait plus que tout, il embrasait son corps, il la guérissait de chacun de ses complexes, de chacune de ses plaies. Même si elle n'arrivait toujours pas à le lui dire, elle l'aimait. Elle l'aimait bien plus qu'elle, bien plus que sa propre vie.

A l'extérieur, tout allait tellement bien. Elle riait, elle sortait avec ses amis, la vie avec ses parents n'avait jamais été aussi belle. Elle faisait des efforts, ses parents aussi. Tout allait bien, elle n'avait absolument aucune raison d'aller mal.

Et pourtant, chaque nuit, elle sentait tout son corps se déchirer.

« 13/08/2015
J'ai peur, je flippe tellement que je m'étonne de ne pas mourir de peur.
Qu'est-ce que je vais faire de ma vie ? Est-ce que je la gâche ? Est-ce que j'aurais des regrets ?
Mais qu'est-ce que je flippe, ça me bouffe littéralement le ventre, ça me fait des trous dans le cerveau. Je m'énerve, pourquoi je ne peux pas être comme tout le monde ?
Je n'ai plus le courage de me poser autant de questions. Je crois que je vais juste essayer de dormir un peu, et d'oublier tout ça. »

« 16/08/2016
Comme une grosse mélancolie ce soir. L'idée que rien ne va, et que rien n'ira mieux. Le temps n'apaise pas les blessures, il n'aide en rien, lui non plus.
J'ai l'impression que rien n'ira jamais.
J'avais retrouvé l'espoir que le meilleur était à venir, que les plus belles années d'une vie sont celles que l'on n'a pas encore vécues. Mais j'en doute de plus en plus aujourd'hui.
Je n'arrive plus à réfléchir à ma vie, à mon avenir, sans devenir folle. J'ai peur de devenir comme eux, comme la foule de gens qui passe en bas de ma fenêtre. Je n'ai pas envie de finir comme eux.
Je n'ai pas envie d'être inutile, je n'ai pas envie d'être un cliché.
J'ai peur de vivre et de me rendre compte que tout cela ne sert à rien, que je ne sers à rien.
J'ai peur, j'ai peur, j'ai tout le temps peur.
J'ai peur d'être rien, pour personne. »

AutodestructionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant