"- À toutes les équipes! Retour immédiat au vaisseau dépêchez vous!
Fys tu m'entend? Fys? Répond bon sang.
Rubis! J'ai perdu le contact avec l'équipe de pionniers, l'eau monte de plus en plus!- Aby, je t'entends parfaitement. J'ai lancé un scan atmosphérique et il semblerait que la pluie ne cessera pas avant un certain temps. L'Aube est situé dans le lit du Fleuve Rouge, donc si la crue s'intensifie, nous n'aurons d'autre choix que de décoller. Quand est-ce que vos équipes seront rentrées?"
Dans la salle d'exploration, Aby s'active. Soudainement, la quiétude se transforme en effervescence et la jeune femme ne sait plus où donner de la tête. Elle recontacte les équipes qui s'occupaient de la récolte quotidienne de ressources alimentaires. Tous sont sur le chemin du retour. Mais Aby n'a pas le temps de se sentir soulagée. En effet, elle ne parvient toujours pas à joindre le pionnier.
Elle tente de contacter Calypso, mais une fois de plus, son signal d'appel reste sans réponse.
En désespoir de cause, elle recontacte Rubis pour lui exposer la situation:"- Rubis, les équipes rentreront dans deux petites minutes. J'ai perdu toute possibilité de contacter Fys et son équipe.
- Bien. Je vais délayer au maximum le décollage de l'Aube. Continuez d'essayer de joindre Fys, il est un facteur important pour notre survie", répond froidement le capitaine du vaisseau.
*
Pascal est inquiet. Depuis une quinzaine de minutes, il observe la montée des eaux depuis la grande baie vitrée du salon VIP, auquel il a accès sur ordre de Rubis. Il sait qu'Aby est sans nouvelles de Fys, et cela l'inquiète. Il faut dire que le petit homme s'attache rapidement, et qu'il apprécie particulièrement le pionnier. En effet, le silence de l'un permet à l'autre de parler autant qu'il le souhaite.
Alors que Pascal est plongé dans ses pensées, un bruit fort et sinistre se fait entendre, faisant contraste avec le son continu de la pluie s'abattant sur la carlingue de l'Aube. L'oreille du mécanicien reconnaît aussitôt la sonorité du métal déchiré, criant sous une énorme pression. Quelque part dans le vaisseau, le métal hautement résistant qui compose la coque est tiraillé par des forces monstrueusement puissantes. Dans le même temps, tout le vaisseau tremble. Comme dans une véritable caisse de résonance, le bruit est amplifié, démultiplié et semble provenir de partout à la fois. A la droite de Pascal, un homme laisse échapper un hoquet de terreur. La panique gagne instantanément le grand salon huppé.
Lorsque le mécanicien en chef jette un oeil à travers la large baie vitrée, son visage se décompose.
"V'la t'y pas qu'ça existe c'te bête"
Devant ses yeux ébahis, un énorme vers ondule en s'écartant du vaisseau. Aussitôt, Pascal comprend que c'est cette créature qui a causé la secousse.
" Oh déesse, t'as vu la taille d' l'asticot qu' y'a là? Y doit faire au moins vingt mètres de long l'bestiau"
Alors, le lifepad du mécanicien vibre. Il fixe son regard sur l'écran de son brassard et voir le visage effaré de Rubis.
"- Pascal, nous avons un problème. Rendez vous immédiatement avec votre matériel dans le secteur 6. Les capteurs indiquent une brèche dans la coque. C'est un ordre."
Le capitaine de vaisseau coupe la conversation avant que Pascal n'aie pu esquisser l'ombre d'une réponse. Quelques secondes plus tard, les haut-parleurs de l'Aube annoncent un décollage immédiat. Une sensation de mouvement indique au mécanisme que la procédure est déjà enclenchée. Il entend alors une plainte émanant d'un homme posté plus en retrait:
"-Mais! Ma femme est dehors en train de collecter de l'eau! On ne peut pas la laisser seule ici!".
Pascal contacte alors Aby, qui lui affirme alors que toutes les équipes sont rentrées saines et sauves au vaisseau. Il communique l'information à son voisin, qui semble rassuré, et quitte la salle aux côtés du petit homme chauve. L'un s'en va retrouver sa femme, l'autre se dirige vers la zone sinistrée, la section 6.
En chemin, il passe retrouver son assistant, Hank. Ce dernier l'attend, armé d'une panoplie d'outils.
Une fois sur place, les deux hommes constatent non seulement l'ampleur, mais aussi la singularité des dégâts.
Un trou parfaitement cylindrique de trois mètres de diamètre perfore la coque en alliage d'acier." C'est donc c't asticot qu'a fait ça! Tu vas pas m'croire Hank! J'ai vu d'mes yeux la bête qu'a fait ça mon gars, et c'est pas un p'tit rigolo!"
Alors qu'ils commencent la réparation, au dessus de deux-cents mètres de vide, Pascal raconte son histoire à son associé, soulignant plus que nécessaire son élan de gentillesse envers l'homme du salon. Fort heureusement, les dégâts ne sont que superficiels. Seules deux cabines resteront inutilisables. En à peine une demi-heure, les deux trous sont bouchés momentanément, en l'attente de réparations plus poussées.
*
Aux commandes du vaisseau, Rubis pilote avec attention depuis une quarantaine de minutes, lorsqu'elle aperçoit enfin ce qu'elle recherchait. Son scanner lui indique une clairière suffisamment grande pour que l'Aube puisse se poser sans encombre. Entre la pluie toujours battante et les arbres immenses, Rubis doit accorder une extrême attention à chacun de ses mouvements. Après deux minutes de manoeuvre, l'Aube est posé sur la mousse imbibée d'eau qui recouvre le sol sylvestre. Un sourire en coin, Rubis se remémore son examen de pilote. "Du jamais vu" selon son instructeur.
Pourtant, elle ne peut se permettre que deux secondes de satisfaction.
Elle recontacte Aby, cette jeune femme passée en quelques jours du statut de gardienne de porte à celui de centre névralgique des communications."- Jeune femme, comment évolue la situation?
- Tout le monde a eu le temps de rentrer dans la vaisseau avant le décollage. Bien heureusement tous vont bien.
Je n'ai toujours pas de nouvelles de Fys et des autres, et cela m'inquiète...- Je vous transmets leur dernière position enregistrée par les capteurs. Nous organiserons des recherches dès que possible. Et du côté de Pascal?"
Aby lui fait part du monologue ridiculement épique que le mécanicien lui tenait un peu plus tôt. Un frisson parcourt l'échine de Rubis à l'évocation de l'immense créature.
Aby s'interrompt. Sur son écran vient d'apparaître le visage crispé de Calypso.
VOUS LISEZ
Gyr
Science FictionIci, nous vivons. Nous vivons d'elle. Elle nous nourrit de sa peau, de sa chaleur et de ses entrailles. Elle est tout pour nous, mais nous en prenons si peu soin. Nous cherchons à la connaître mais elle nous étonne toujours, nous émerveille, nous m...