Chapitre 38: Demyan.

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Ce soir là, je n'avais jamais autant voulu ne pas assister au bal. Les révélations de ma mère se faisaient encore ressentir, comme si mon cœur avait été arraché de ma poitrine et qu'il n'y restait que le néant. Je m'en voulais de ne pas l'avoir rattraper. J'aurais du lui dire que je ne lui en voulais pas, que rien n'était de sa faute. Elle avait succombé aux ordres de son manipulateur de mari. Personne ne pouvait lui résister. Et j'espérais en mon fort intérieur que Keryna serait celle qui y arriverait.

Un servante frappa alors à ma porte afin que je vienne au bal. J'étais en retard et je savais que cela ne plairait pas à mon père. Elle repartit sitôt venu, et j'inspirais en fermant les yeux pour me donner le courage d'y aller. Je devais à tout pris éviter de penser à ma mère. 

Une fois dans la salle de bal, j'eus du mal à me frayer un passage parmi tous ces aristocrates. Devant Rioz, j'inclinais la tête puis partais à la recherche de Pira; la seule qui pouvait faire en sorte que ce bal ne devienne pas un cauchemar. Mais le regard de mon père m'avait perturbé. Je continuais tout de même ma route, néanmoins j'avais toujours l'image de ses yeux, dont on voyait des ombres terrifiantes danser en leur sein. Heureusement, je vis Pira en cet instant et j'arrivais à oublier quelque peu cela. Ma seconde me sauta dans les bras et je fus heureux de constater qu'elle n'était plus froide avec moi. Depuis mon refus de me marier avec elle, ces derniers jours n'avaient pas été des plus chaleureux.

— Alors, ta mère se fait attendre? me lança-t-elle, tandis que je voyais toutes les têtes tournées sur le trône vide de la reine. 

 — Elle doit être souffrante...

Je changeais ensuite de sujet, n'ayant nullement envie de parler de cela. Après quelques temps, je m'asseyais un peu à l'écart, Pira toujours à mes côtés. J'observais les gens bavarder et danser, avec des sourires si faux que l'on aurait dit un mauvais jeu d'acteur. Je soupirais déjà d'ennui. Puis alors qu'une énième musique était jouée, j'eus l'idée d'aller voir la pierre des Scintillants. Cela faisait des années que je ne l'avais pas observé. Alors que je me levais, j'entendis mon père prétexter tout comme moi que ma mère se sentait mal, ce qui expliquait son absence.

— J'ai besoin de prendre l'air, dis-je alors à Pira en partant dans le couloir.

Je traversais de nombreuses pièces désertes, puis arrivais enfin dans les jardins sous la nuit tombée. Ceux-ci étaient fort bien tenus, et la pierre se trouvait au milieux de tous ces arbustes parfaitement taillés. Quatre gardes la protégeaient en permanence. Je ne comprenais pas vraiment pourquoi, mais mon père avait une forte tendance paranoïaque; et en même temps je ne pouvais pas le blâmer car il avait finalement raison. De plus, il n'avait pas voulu enlever les morceaux, il désirait les garder comme preuve de leur victoire. Je m'approchais en silence et voyais ses contours de plus en plus clairement.

Les deux parties de la pierre, autrefois en apesanteur, se délaissaient désormais sur les graviers. Lors du coup d'état, les Sans-Pouvoir s'étaient servis d'un dispositif à base d'ondes, venant d'Eytidy, pour la briser. Personne ne savait vraiment si cela allait fonctionner, alors cela avait été très risqué pour eux. 

La pierre était dénuée de toute couleur, aussi transparente qu'une eau de source. Les deux morceaux, de plus de deux mètres chacun, m'impressionnaient assez. Durant mon enfance, j'avais adorer les contempler. 

Je relevais ensuite la tête et fis attention à la sécurité. Outre les quatre gardes juste à côté, des dizaines d'archers surplombaient les jardins, en position sur le toit. Pour l'instant, je ne voyais pas comment la poignée de Scintillants pouvaient espérer réparer la pierre. J'étais toujours persuadé que cette mission les conduirait tous à la mort. Même si les legios ne pouvaient pas intervenir, les risques restaient toujours présents. Mais bon, Keryna affirmait avoir un plan, donc je tentais de lui faire confiance.

Je rentrais ensuite et retrouvais Pira, les joues rouges d'avoir dansé durant mon absence. Ses yeux, plus pétillants que jamais, m'indiquaient que je ne lui avais pas manqué tant que cela. 

— Tu en a mis du temps! constata-t-elle en replaçant derrière ses oreilles une mèche rebelle. 

Avec un sourire, je l'emmenais vers la piste et lui servais de cavalier. Mais durant ces danses, je voyais bien que son regard était porté vers un autre. Un des nombreux gardes du palais. Soulagé, j'espérais qu'elle avait enfin trouvé quelqu'un de bien.

Diadème de cendresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant