Je suis tellement surprise par sa présence que ma gorge est nouée. Il ne peut pas être là, il y a quelques heures Astrid affirmait qu'il était aux Enfers. Je ne pense pas que le temps de vol entre ici et là-bas soit aussi rapide.
- Bah voilà, c'est déjà mieux, murmure-t-il.
Je lui lance un regard interrogateur car je ne comprends pas de quoi il parlait. Amory s'installe sur mon lit et me fait signe de le rejoindre, mon coeur bat la chamade tandis que je m'assieds à ses côtés. Cette soudaine proximité après une semaine d'absence me dérange. Mais une question me taraude, alors je mets ma gêne de côté.
- Qu'est-ce que t'as dit par rapport à mes yeux ?
Il sourit, comme s'il attendait à ce que je pose cette question. Je lui rend un sourire mais de manière beaucoup moins franche. Il reprend alors un air sérieux et commence à répondre à ma question.
- Nous, les démons en général, les sirène, comme les anges déchus, comme les métamorphes, avons lorsque notre "côté démoniaque" prend le dessus, les yeux qui deviennent rouge sang.
Je me rappelle alors dans un des mes rêves lorsque j'ai cru apercevoir des reflets rouges dans les yeux de mon père. J'aurai dû trouver que c'était étrange et en parler directement à quelqu'un. Tout s'explique désormais, j'aimerai juste pas avoir à en apprendre encore sur ma nature de cette manière, je préfère être au courant.
- Y a-t-il d'autres choses que je savoir ? Ajouté-je, sèchement.
J'ai le droit d'être froide car il revient comme une fleur après une semaine d'absence et il me fait des reproches sur mes yeux. Sa main se pose sur la mienne, mais je l'enlève brusquement, les endroit où sa peau était en contact avec la mienne me picotent.
- Quel est le problème ? S'inquiète-t-il.
Il semble sincèrement ne pas voir où est le problème. Peut-être le fait-il exprès. Et puis il y a cette lueur d'innocence qui brille dans ses yeux cendres.
- Tu vois vraiment pas ? Ironisé-je en me levant brusquement.
Je ne pensais même plus être capable de m'énerver contre lui.
- Summer, calme toi.
Pour la deuxième fois en quelques minutes, mon poing va s'écraser contre le mur. Sauf que, cette fois, c'est plus fort et les jointure de mes doigts sont légèrement ouvertes.
Pourquoi ne peut-il pas juste comprendre ?
- Tu trouves ça normal de partir juste en me laissant une pauvre lettre ? Tu trouves ça normal de revenir comme si de rien n'était en me disant "ah oui d'ailleurs, tes yeux deviennent rouges quand tu ton côté démone prendra le contrôle ! Mais c'est vrai que cette information n'est pas existentielle Amory !
Il serre la mâchoire, encaissant, comme je l'ai si souvent fait. Mais Je ne veux pas qu'il reste calme, je veux qu'il sente la solitude à travers laquelle j'ai passé ces derniers jours. Donc je ne m'arrête pas et en rajoute une couche.
- Et d'ailleurs, tu sais que je viens d'apprendre qu'Astrid et une sirène, chose que tu devais forcément savoir et dont tu ne m'as partagée ! Ah oui, aussi mon oncle vient de m'apprendre qu'il savait quand je mentait, chose que j'ai faite des milliards de fois ! Et devine quoi ? Je me fais drôlement chier au lycée sans toi ! Sinon c'était vraiment génial, merci de demander !
Il me regarde un sourcil haussé et finit par se lever. Ses poings sont serrés et ses ongles s'enfoncent dans ses paumes. Une goutte de sang tombe sur le sol de ma chambre tandis qu'il en sort.
J'aimerais tant le rattraper et lui dire combien je regrette et ne pensais pas tout ce que j'ai dit, mais j'ai beaucoup trop d'ego pour faire ça. Mon ouïe s'est d'elle-même mise à écouter le bruit de ses pas qui s'éloigne. Il ne vas pas revenir. La porte de l'entrée claque. Il est partit. Encore une fois, alors que je venais de le retrouver.
Je me laisse tomber sur mes oreillers et prends mon téléphone, j'aperçois alors mon reflet dans la vitre, mes yeux, ils sont rouges, rouge sang. C'est donc à ça que je ressemblais lorsque je lui ai balancé toutes ces horreurs à la figure. Je respire profondément pour me calmer. Je ne peux pas rester ainsi. Il faut que je pense à quelque chose d'heureux, comme mon voyage aux Etats-Unis ou la venue de mes correspondants ici.
Mais, quoi que je fasse, des images d'Amory envahissent mon esprit.
Pense à Wayne.
Je ne sais pas d'où vient cette voix mais je la connais, sans arriver à savoir à qui elle appartient. J'imagine mon attache le plus clairement possible, chaque mèche de cheveux à sa place, ses yeux verts, son rire. Il est au Five Guys, à rigoler avec Matthew et Lewis. Un sachet de frites presque vide est posé sur la table au milieu d'eux, il en prend distraitement quelques-unes avant de les enfourner dans sa bouche. Comme ce matin-là où il avait mangé une assiette remplie d'oeufs et de bacon très rapidement. Un sourire se forme sur mes lèvres : je ne voulais pas monter sur sa moto. Celà me semble ridicule désormais.
Mes paupières sont lourdes, elles finissent par tomber sur mes yeux. Je laisse alors le sommeil m'emporter.
***
Je suis toujours dans ma chambre, sauf que la nuit est tombée dehors. Sans réfléchir, je sors de mon lit, ouvre la fenêtre et saute dans le vide. Une douleur déchirante dans le dos et mes ailes se déploient, m'empêchant de tomber. La sensation de voler m'avait manquée, je monte de plus en plus haut, touchant les nuages du bout des ailes.
Je replis mes ailes et me laisse tomber, l'air siffle dans mes oreilles, je les redéploie en arrivant au niveau du toit des immeubles. Le vent me fait alors retourner au niveau des nuages.
Pour la première fois depuis quelques temps, je suis libre.
Je sens alors deux présences derrière moi, je me retourne et vois Samaël et mon père. Ma première idée et de partir. Partir le plus loin possible, mais la curiosité me pousse à rester.
Ce n'est qu'un rêve après tout.
Mon géniteur avance vers moi, laissant Samaël en retrait. Je recule pour garder une distance raisonnable entre nous. Il tend sa main vers ma joue, je suis pétrifiée, ses doigts effleurent ma peau. Je frissonne, et, retrouvant l'usage des mes ailes, me décale en quelques battements.
- Summer, murmure-t-il.
Je regarde notre immeuble à quelques dizaines de mètre en dessous de nous. Je prends une grande inspiration avant de descendre vers le sol en chute libre. Je m'engouffre par la fenêtre ouverte de ma chambre et, après l'avoir soigneusement renfermée, me recouche dans mon lit.
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I WAS NOBODY
FantasySummer pensait être humaine. Et lui rêvait de la rencontrer. Une fille. Un démon. Une histoire. "Tout amour fait toujours une mauvaise fin. D'autant plus mauvaise qu'il était plus divin." Charles Baudelaire. #1 dans fantastique le 3/11/2019 #1...