Daress Tome 2

Chapitre 47

Chapitre 47
Culpabilité

Les pieds dans l’eau, Agathe avait un grand vide qui s’insinuait dans ses entrailles. Son ventre lui faisait mal, l’angoisse lui broyait la gorge… Cela lui semblait absurde que son père ait disparu de la sorte… Qui s’occuperait du pays ? Et est-ce qu’il reviendrait un jour ? Ces questions lui pesaient douloureusement sur le moral, la rendant amorphe. Surtout avec la révélation sur l’identité de Dérime… Pendant un instant, la jeune fille avait tenté d’imaginer ce qui avait pu pousser cet homme à devenir ainsi. Et surtout, pourquoi jamais personne, mis à part Roye, n’avait été au courant de son existence ! Si d’habitude, elle se serait lancée avec enthousiasme dans des théories, elle ne pouvait pas le faire aujourd’hui… Elle avait l’impression de revenir à la réalité.

    Tout le voyage qu’ils avaient entrepris sur Terre, cela lui semblait être un rêve. Ils avaient été coupés de Daress trop longtemps et même si elle y était retourné plus tôt que les autres, elle se rendait maintenant compte à quel point ils avaient manqué à leur monde. Elle se sentait coupable : elle aurait dû être là pour pouvoir empêcher tout cela… Et son souffle se coupait seulement à l’idée du réveil de Maxime. Il fallait que cela arrive rapidement, mais elle ne le voulait pas. Elle redoutait le moment où elle devrait lui faire face, alors qu’il aurait tout appris. Agathe entendit des pas s’approcher, derrière elle. Cependant, elle ne se retourna pas, elle n’avait envie d’affronter le regard de personne.

    Faust s’assit lourdement à ses côtés avec un grognement, sa jambe de fer se cogna bruyamment contre le carrelage du bord du bassin, dont le son résonna un moment, au milieu des clapotis de l’eau. Agathe n’osa pas lever la tête, le regard fixé sur ses pieds et les lèvres pincées. Faust, lui, soupira d’aise en enlevant ses bottes et en plongeant à son tour ses pieds dans le bassin. Il sourit :

- J’espère que ma prothèse ne va pas rouiller ! Lança-t-il

    Agathe ne lui répondit pas. Faust réfléchit un instant : il ne savait pas réellement comment faire pour la rassurer… A vrai dire, lui aussi bouillonnait, ses émotions s’entrechoquant sans cesse. La colère s'emmêlait dans ses entrailles, mais il fallait qu’il la retienne. Du moins, pour l’instant. Il prit une profonde respiration :

- Tu sais… Moi non plus je n’aime pas être bloqué comme ça.

    La fille de l’Ouest sentit les paroles du jeune homme résonner en elle : ils ne pouvaient pas bouger du Sud, en attendant que Maxime se réveille. C’était si dur d’être obligés de ne pas bouger ! De se sentir si impuissants ! Elle serra ses poings, imprimant la marque de ses ongles dans ses paumes :

- J’aimerais tellement que l’on soit au Nord. Maintenant. Pour qu’enfin tout cela s’arrête. J’en ai assez de tout ça, j’aimerai que l’on arrête de nous faire peser le poids du monde sur les épaules.

    Les yeux de Faust brillèrent d’une étrange lumière, il se demanda soudainement ce qu’Agathe avait bien pu ressentir quand elle avait dû lutter contre lui… Les mots de Roye lui revinrent en mémoire : elle l’avait haïs… Assez pour être prête à le tuer. Il tacha de chasser ces pensées : il savait que les circonstances avaient été particulières. Et ce n’était pas le moment de penser à cela. Il lui prit la main, la chaleur qui dégageait de la sienne réconfortait le cœur d’Agathe, qui trouva enfin le courage de lever ses yeux remplis de larmes :

- Je n’ai pas envie de perdre mon père, Faust… J’en ai marre de perdre des gens… Je ne veux plus subir ça. Et je ne veux pas voir la douleur de Maxime. J’ai n’ai pas envie de voir d’anciennes blessures se rouvrir. Ça a déjà été assez dur une première fois… Souffla-t-elle d’une voix faible et tremblante